C'est vrai que c'est un genre rare, peu abordé en France. Néanmoins l'objectif n'était pas tant d'écrire quelque chose d'original que de sortir une idée de la confidentialité, celle de la démocratie participative. Le roman par son processus narratif et l'identification aux personnages permet de faire passer des messages, même ardus. J'observe le monde qui m'entoure et je suis affligé par les réponses immatures et irresponsables de nos dirigeants qui préfèrent entrer dans des querelles partisanes, souffler sur les braises plutôt que de prendre de la hauteur et de trouver des solutions à plusieurs. Nos représentants ne sont au niveau requis pour les enjeux de société. Les journalistes ont aussi leur part de responsabilité quand ils relayent les tweets assassins ou les petites phrases, quand ils tombent dans le sensationnalisme. La défiance vis à vis des élites est telle que l'abstention est record et que cela a fait le lit du FN, de Trump qui se disent hors système et qui en réalité en profitent tout autant. La démocratie est perdante. Tout cela est connu mais on ne propose pas grand chose comme alternative car nous sommes convaincu que le système de démocratie représentative, élective est le seul possible. Or il en existe d'autres dont la démocratie directe, participative. Ce processus de décision n'est pas récent. Sous la République Athénienne, elle était même très utilisée. Puis elle a disparu des radars, notamment car on nous a fait croire que la démocratie représentative était la seule alternative. En réalité c'est un choix de l'histoire. Pour faire court, peu après 1789, certains avaient tellement peur du peuple qu'ils se sont évertués à mettre en place la démocratie représentative. Elle a fait son temps mais force est de constater qu'elle ne fonctionne plus. La démocratie directe et participative peut être plus performante que la démocratie représentative pour répondre aux enjeux de sociétés. Il y a de plus en plus d'articles, d'essais, d'émissions consacrés à cette forme de démocratie mais ils ne sont lus que par une petite frange de la population. Je voulais que cette alternative crédible au marasme politique actuel soit diffusé au plus grand nombre, d'où ce roman. Je voulais en particulier que les plus jeunes, se sentent impliqués d'où le ton employé et le choix des personnages. Ce sont ceux par qui quelque chose peut se passer et ils sont l'avenir du monde. Ultra connectés, les jeunes de cette planète ont un rôle prépondérant à jouer dans la reformulation de la démocratie.
Qu'est ce qui a vous inspiré pour écrire ce roman ( musique, film, livre...) ?
Ni livre, ni film, ni roman mais bien la situation de notre pays et plus généralement de notre planète. Personnellement, je vis bien, je pourrais tout à fait continuer à faire comme si de rien n'était, mais je ne peux pas me contenter de vivre convenablement dans ce monde si autour de moi, les choses empirent. Le principal étant sans doute le danger écologique.On ne se rend pas compte qu'on a qu'une seule planète et qu'on ne pourra rien faire si elle s'emballe, ce qu'elle a déjà commencé à faire. Et si l'on peut nier le réchauffement climatique, on ne peut nier la pollution de l'air, des océans, des rivières. Il y a urgence et pour autant on peut rapidement changer les choses si on s'y met tous. Ajoutons à cela la répartition très inégale des richesses, le capitalisme technologique qui s'immisce chaque jour un peu plus dans nos vies privées et nous rend esclaves, les discours xénophobes, homophobes et misogynes de certains dirigeants. Heureusement, il y a des raisons de croire à un avenir meilleur. Il y d'abord la technologie, et notamment les nouveaux outils du numérique qui pour peu qu'ils soient mis au service de l'être humain sont de formidables outils pour échanger. Nous avons aussi de plus en plus conscience que nous sommes interdépendants, pour le pire et aussi pour le meilleur. Il y a aussi et surtout les jeunes, dont celle des millenial. Un grand nombre d'études montrent que les jeunes du monde entier partagent de nombreuses valeurs communes, plus qu'avec leurs concitoyens plus âgés en tous les cas. Leurs points communs sont bien supérieurs à leurs différences. Les réseaux sociaux, internet n'y sont pas étrangers. C'est pour moi l'espoir d'une nouvelle solidarité, allez disons-le carrément humanité.
Pensez vous que la démocratie participative soit réellement applicable dans notre pays à notre époque ?
Si je devais répondre simplement, entre oui et non, je dirais non. Je suis lucide. Si l'on ne fait rien, cela n'ira que de mal en pis. Cela n'est pas du catastrophisme, c'est assez lucide. Néanmoins, pour de multiples raisons, tant technologiques que sociologiques et politiques, à moyen terme cette démocratie (plus) directe et participative, citoyenne a des chances d'aboutir. Même si cela prendra du temps car cela ne peut se faire que par étape, la nature humaine ayant horreur du vide. Il faut un début un tout et ce roman apporte sa pierre à l'édifice. Nous sommes tous interdépendants, nous sommes donc tous le problème et la solution, c'est donc trivialement tous ensemble que nous pourrons faire bouger les choses. Même des cette forme de démocratie participative, la politique ne se fera pas sans heurt, l'organisation de la société n'est pas un long fleuve tranquille mais on doit pouvoir discuter sans se massacrer physiquement et verbalement. Le consensus est un processus long fait d'opinions diverses qui se confrontent, et non pas qui s'affrontent. Sur le plan opérationnel, ce type de démocratie peut assez facilement se mettre en place au niveau local. On peut espérer que au fur et à mesure de la pratique de cette démocratie par les citoyens, l'on puisse monter les échelles géographiques.
En utilisant comme personnage principal celui qui finalement dans ce trio est le moins idéaliste vous avez souhaité ainsi proposer au lecteur un personnage a qui on peux plus facilement s'identifier, mais vous concernant, vous vous sentez plus proche de qui ?
Tout d'abord, je vous confirme ce que vous dites. L'idée étant de favoriser l'identification, le personnage principal devait être au plus proche de ce que pensent les jeunes français et les jeunes en particulier, à savoir qu'il faudrait changer les choses mais à la fois on ne sait pas comment faire et puis, il y a une certaine urgence à trouver un travail, se loger, aimer... bref vivre. Pour répondre à votre question, je crois que je suis un peu des 3. Le personnage principal pour le coté désabusé par rapport à la politique mais aussi par rapport aux autres. Sans donner de leçon de morale, je suis souvent surpris par les comportements égoïstes de mes concitoyens surtout lorsque cela ne leur profite pas vraiment, qu'ils n'ont pas grand chose à gagner et que c'est juste de la paresse. Je suis assez proche de Lana également dans le sens où je reste optimiste sur la nature humaine, pas de manière idéologique et crédule, mais parce que concrètement, je vois que l'être humain peut s'améliorer si on lui en donne les possibilités. Il en a même envie. Et puis, comme Aurélien, j'ai longtemps cru que internet et les nouveaux outils technologique ouvraient la voie à un monde meilleur. Comme lui, j'ai déchanté et j'ai maintenant peur de vivre un jour dans un monde où l'on est tous tracké, surveillé, que cela soit une société privée ou un Etat. On a tous quelque chose à cacher, notre liberté est à ce prix.
Pourquoi ne pas avoir donné de nom à votre personnage principal ?
J'ai hésité mais cela rejoint le point précédent. L'idée était que la maximum de lecteurs puissent s'identifier à ce personnage principal. Un prénom en dit beaucoup sur les origines sociales, ethniques. J'avais envie de laisser le moins de lecteurs possible sur le bord du chemin et puis cela ne nuit pas tellement à la narration. Pour tout dire, j'ai même essayé de ne pas lui donner de genre, c'est à dire ne pas indiquer si c'était un homme ou une femme mais c'était trop casse-gueule car pour le coup cela nuisait à l'identification.
Finalement, en temps que lecteur on ne sait pas réellement ce qui est arrivé à Lana ni à Aurélien , pour vous que s'est il réellement passé ?
L'on sait quad même que Lana est décédée d'une longue maladie et que Aurélien s'est noyé. Après c'est vrai qu'on ne connait pas exactement les circonstances. C'est voulu, ce doute est censé servir la narration. Cela permet d'entretenir une forme de méfiance par rapport aux versions officielles des forces de police et du gouvernement et à la fois, c'est potentiellement la vérité.Sans tomber dans la théorie du complot, je suis suffisamment l'actualité pour ne pas croire les versions officielles que nous servent nos gouvernements et nos médias. Même moi, je ne le sais pas. Si je devais me prononcer, je dirais qu'Aurélien est mort comme les policiers l'ont dit, quant à Lana, le gouvernement a su tiré parti de sa maladie. .
Vous dites aux jeunes qu'il est très important pour eux d'aller voter, mais que faire si aucuns partis n'arrivent à les convaincre ?
Je ne dis pas qu'il est important d'aller voter, je dis qu'il est important qu'ils prennent leur destin en main. Il y a plusieurs façons de le faire. En votant, simplement j'ai envie de dire, ou en participant à la vie de la cité, à travers un parti, un mouvement, en créant des entreprises. Les start-up citoyennes sont légions. Je n'en citerai aucune pour n'oublier personne mais c'est réellement très impressionnant ( cf Social good Week). Même nos achats quotidiens sont des actes politiques. Les jeunes ne doivent pas se laisser voler leur futur par des dirigeants trop âgés et loin de leurs préoccupations. Je n'ai rien contre les "vieux" mais il ne peux pas y avoir que cette catégorie au pouvoir. Il doit y avoir plus de jeunes, de femmes, de personnes issues des classes défavorisées... Je comprends totalement que les jeunes ne soient pas convaincus par ce que proposent les partis. Ces derniers sont essentiellement composés d'hommes blancs âgés. Certaines catégories socio-professionnels sont sur-représentés. Les idées, les programmes sont d'ailleurs souvent décidés par un petit groupe, le bureau politique. Ce manque de diversité n'est pas propice à la confrontation et donc à l'émergence d'idées nouvelles dans un monde mouvant. En réalité, ce n'est même pas ou plus tellement leur objectif d'avoir des idées. Ce sont des organisations qui servent à présenter des élus moyennant un financement public. Soit on laisse agir cette oligarchie dans son coin, soit on agit. Les manifestations c'est très bien mais le mieux c'est encore d'avoir le pouvoir et de décider.
Pensez vous que le statut du vote blanc doit être évalué ?
Oui, et si le vote blanc est celui qui a récolté le plus de suffrages, alors, on devrait revoter et changer tous les candidats. Mais encore une fois, je ne m'inscris pas véritablement dans le système de démocratie représentative. Je crois plutôt qu'il faut changer de type de démocratie.
Depuis quand écrivez vous ?
Cela dépend de quelle type d'écriture vous parlez. J'ai toujours écris ou inventé des histoires. Quand j'étais enfant, je faisais des petites BD, même si je n'avais aucun talent pour le dessin.Puis, je me suis mis à écrire des scénario de court et long métrages, j'ai pris des cours d'écriture au scénarii et j'ai crée une société de production. J'ai aussi "écrit" des documentaires, et enfin plus récemment, effectivement, je me suis mis à écrire des romans. Si l'on ne parle que de romans, cela fait environ 4 ans.
Quel est le roman qui a vous le plus fait réfléchir sur la société ?
Je ne vais pas être très original, je vais dire " 1984 " de G. Orwell. D'une manière générale, les romans de science-fiction m'ont beaucoup fait réfléchir De Barjavel, en passant par Philipp K Dick et Azimov ils m'ont ouvert les yeux sur le champs des possibles dans le futur. Le progrès technologique n'est pas la panacée, cela dépend de ce qu'on en fait. Science sans conscience n'est que ruine de l'âme. Et sauf à me prouver le contraire, ce sont les êtres humains, les être vivants qui font a beauté de ce monde, pas les machines.
Écoutez vous de la musique en écrivant ?
Pas quand j'écris un roman. J'ai surtout besoin d'entendre la musique des mots. C'est vrai quand j'écris des scénarii car cela peut m'aider à me mettre dans l'ambiance de la scène.
Pensez vous écrire prochainement un roman dans le même genre ?
Si j'écris un autre roman de politique-fiction, je crois que je poursuivrais celui-là. Cela pourrait être en 2022 car je crains que peu de choses aient changé. Je ne suis pas très optimiste à court terme.
Quel serait votre rêve en temps qu' écrivain ?
De pouvoir continuer à écrire tout simplement. Après si il y a du succès, si cela plait, c'est tant mieux. Pour répondre plus classiquement à la question, d'apporter quelque chose au lecteur, en le touchant par des mots et en l'emmenant là où il n'était jamais allé par lui-même. Dans mon précédent roman, Xotic, j'ai par exemple essayé de plonger le lecteur dans un monde parallèle qui n'est constitué de rien d'autre que ce qui constitue l'être humain. Cela parait un peu éthéré comme cela mais quand/si vous le lisez, vous comprendrez.
Quel conseil donneriez vous à quelqu'un qui souhaite devenir écrivain ?
D'abord d'aimer écrire. D'écrire souvent, même peu, c'est une gymnastique. De ne pas avoir peur des autres et d'avoir des proches bienveillants avec qui l'on peut partager nos premiers pas. Se dire "pourquoi pas " (écrire) plutôt que " à quoi bon " (écrire). C'est parfois difficile mais on ne regrette jamais. Cela fait grandir.
Question personnelle de la part de l'auteur: j'aimerais savoir si cela vous a fait un peu/beaucoup changé d'avis sur la politique et l'engagement citoyen ?
Je ne dirai pas que cela m'a fait changé d'avis, mais votre roman m'a ouvert d'autres horizons, en particulier la démocratie participative, un concept qui me plaît pas mal ! De plus vous pouvez considéré que vous avez réussi car vous m'avez fait découvrir une nouvelle possibilité et ce n'est pas rien !