Les choix et le destin du Québec… un texte d’Alain Gagnon

Le choix dans le temps —. L’obligation que nous avons de faire constamment des choix dans notre quotidien m’incite à publier ce poème en brève prose :

Cercle des dix mille portes. Autour du cavalier perdu. Choisir la bonne sans cesse. Car, si par-devant l’avenir est multiple et cajoleur, dans l’instant, il est unique et cruel. Le dur choix s’ordonne. Granit, il se dresse au cœur de ma rivière, du monde mien. Incontournable, l’instant exige, bien arrimé à la machine du temps.

Le Québec —. Parler du temps et parler de choix mènent à parler du destin. Celui de notre pays, géant d’espace et minuscule de géographie, nous apparaît dans le moment trouble, incertain. Certains cherchent, tâtonnent, à gauche, à droite du spectre politique ; d’autres haussent les épaules et abandonnent, prêts à céder à tous les appels du pied. Et une proportion de plus en plus grande a décidé de faire comme si la politique n’existait pas, n’existait plus. Et cette dernière catégorie ira en augmentant. Le Québec n’a plus d’âme. Il n’a que des sursauts nostalgiques, ici et là.Les choix et le destin du Québec… un texte d’Alain Gagnon
Nous ne chantons plus que dans d’autres langues. Nos créateurs littéraires parlent en majorité d’une vie calfeutrée et, parfois, ont des outrances qui font bien rire, mais ne rallient plus personne, sauf le temps d’un rire.
La détestation de soi a tout balayé. Spirituellement, culturellement, historiquement, nous étions riches, et nous sommes maintenant pauvres. Et heureux de l’être, car personne ne se souvient de cette richesse.
À Ottawa, rien à attendre d’un fédéralisme fermé, pour lequel nous sommes déjà acadienisés, louisianisés. À Québec, partis sans envergure qui n’enthousiasment plus, et auraient à peine l’énergie, la clairvoyance et l’audace de gérer un dépanneur.

Souvent, toutefois, c’est dans ces conditions historiques apparemment bouchées que surgissent des remèdes efficaces… mais amers à avaler.

L’auteur : Alain Gagnon a remporté à deux reprises le Prix fiction roman du Salon du Livre du Saguenay–Lac-Saint-Jean pour Sud (Pleine Lune, 1996) et Thomas K(Pleine Lune, 1998). Quatre de ses ouvrages en prose ont ensuite paru chez Triptyque : Lélie ou la vie horizontale(2003), Jakob, fils de Jakob (2004), Le truc de l’oncle Henry (2006) et Les Dames de l’Estuaire (2013). Il a reçu à quatreLes choix et le destin du Québec… un texte d’Alain Gagnon reprises le Prix poésie du même salon pour Ces oiseaux de mémoire (Le Loup de Gouttière, 2003), L’espace de la musique(Triptyque, 2005), Les versets du pluriel(Triptyque, 2008) et Chants d’août (Triptyque, 2011). En octobre 2011, on lui décernera le Prix littéraire Intérêt général pour son essai, Propos pour Jacob (La Grenouille Bleue, 2010). Il a aussi publié quelques ouvrages du genre fantastique, dont Kassauan,Chronique d’Euxémie et Cornes (Éd. du CRAM), et Le bal des dieux(MBNE) ; récemment il publiait un essai, Fantômes d’étoiles, chez ce même éditeur. On compte également plusieurs parutions chez Lanctôt Éditeur (Michel Brûlé), Pierre Tisseyre et JCL. De novembre 2008 à décembre 2009, il a joué le rôle d’éditeur associé à la Grenouille bleue. Il gère aujourd’hui un blogue qui est devenu un véritable magazine littéraire : Le Chat Qui Louche 1 et 2 (https://maykan.wordpress.com).

(Une invitation à visiter le jumeau du Chat Qui Louche :https://maykan2.wordpress.com/)

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