Le plus loin possible.Maureen McCarthy.Editions Denoël.427 pages.En librairie depuis le 9 mars 2017.
Résumé:
Tess, vingt et un ans, vit avec son mari Jay et leur petite fille de trois ans dans une ferme isolée en Australie. Elle est régulièrement battue par son mari, mais les frères et la mère de Jay font semblant de ne rien voir. Un jour, un jeune couple qui voyage à travers le pays s’arrête dans leur village. Tess décide de saisir sa chance et, à l’aube, en cachette de tous, elle monte dans la voiture des inconnus avec sa petite fille. Un périlleux chemin vers la liberté commence alors...Mon avis:Comme vous le savez sans doute si vous me suivez depuis quelque temps, j'aime diversifier mes lectures, aborder des sujets différents en littérature. Le plus loin possible m'a intéressé parce qu'il traitait des violences conjugales. Je remercie donc beaucoup les Editions Denoël pour l'envoi de ce titre.Ce roman avait à mon sens beaucoup de potentiel. Je savais que son thème difficile et le personnage de Tess cette jeune mère de famille de 21 ans qui décide après le coup de trop d'échapper en pleine nuit à son mari, allait vraiment me toucher. C'est malheureusement un problème familial beaucoup plus répandu que ce que l'on croit, souvent tu ou ignoré parce que souvent les victimes ont peur d'en parler. J'avoue également que j'espérais que cette histoire me permettrait de mieux comprendre justement pourquoi ces victimes restent la plupart du temps avec leur bourreau malgré tout, plutôt que de s'enfuir. Et en ce sens le personnage de Tess a apporté quelques réponses à mes questions et m'a permis de me mettre le temps de quelques pages à la place de ces personnes battues. Tess est une jeune femme qui au départ avant même de croiser la route de Jay était à mon sens fragile psychologiquement du fait de son enfance un peu chaotique. Peu douée pour les études, alors que ses frères et sœurs sont tous très bons, elle a toujours été en quelque sorte le vilain petit canard de la famille. Peu proche d'eux, elle entretient par contre une grande complicité avec son père qui malheureusement se donne la mort sans explication alors qu'elle n'est encore qu'une petite fille. Suite à cette tragédie sa mère disparaît également du jour au lendemain. On comprend alors que tous ces événements mis bout à bout l'ont fragilisé, l'ont fait se sentir abandonnée. Une incompréhension et un mal-être qui perdurent encore aujourd'hui à l'âge adulte. A mon sens, la recherche d'une certaine protection, peut peut-être expliquer la raison pour laquelle elle s'est attachée à cet homme plus âgé, alors même qu'elle sentait au fond d'elle qu'il n'était pas un homme bien et ce malgré le fait que tout le monde la mettait en garde. J'ai trouvé ce premier point intéressant car il nous permet de comprendre comment on peut se laisser séduire, embrigader, contrôler par ce genre de personne peu recommandable.Jay use pendant des années de la faiblesse de Tess pour appuyer son emprise sur elle, l'humiliant, la maltraitant, la rabaissant sans cesse. C'est un homme que j'ai bien évidemment détesté. On comprend qu'il fait payer à Tess sa situation et les problèmes qu'il rencontre au sein de son travail et notamment avec ses frères. C'est un homme tout simplement méchant, lâche, sans cœur, qui nous fait peur et on comprend ainsi pourquoi Tess est restée trois longues années avec lui. On se rend compte de l'isolement, de la honte, de la terreur que peuvent éprouver les victimes de maltraitance, qui les empêchent complètement d'agir. Ne pas savoir où aller, vers qui se tourner, la peur d'échouer, d'être retrouvé et ensuite tué. C'est une femme qui malgré tout m'a touché pour sa force et son courage, sa volontéde protéger coûte que coûte et d'offrir un avenir meilleur à sa fille Nellie, qui on le voit bien dans sa façon de s'exprimer et de se comporter vis à vis de Tess est marquée par ce que son père a infligé à sa mère. J'ai par contre moins aimé le côté passé familiale de Tess, qui venait entrecouper les moments présents. Si j'ai compris la nécessité de parler de son enfance pour comprendre sa psychologie, j'ai moins compris l’intérêt de l’histoire de son arrière-grand-mère internée dans un hôpital psychiatrique. Alors oui on comprend que Tess a peur d'avoir les mêmes gènes qu'elle, de devenir folle à son tour, mais j'ai trouvé que cela n'apportait en réalité pas grand-chose à l'histoire, et j'ai eu du mal à croire à certaines choses comme le fait qu'elle aperçoit de temps en temps son fantôme. De plus j'ai trouvé que le schéma narratif était un peu brouillon. Au fil de sa cavale on en apprend plus sur sa famille, sur son passé, mais j'ai trouvé que ces différents retours en arrière étaient mal amenés, il n'y avait pas vraiment de liens entre eux, et du coup cela manquait de fluidité.Enfin, j'ai été un peu déçue de la fin car plein de questions restent sans réponses. On reste un peu dans le flou concernant Jay, concernant la mère de Tess, concernant sa relation avec Harry, le jeune homme qui l'a aidé à s'échapper, et avec qui elle a noué une un lien très fort. J'aurais aimé que l'auteure aille au bout de l’histoire de ses personnages. Lorsqu'on lit un tel livre, quand on a ressenti une certaine tension pendant tout le roman, parce que l'on a peur de voir resurgir Jay, et parce qu'on a peur que Tess ne s'en sorte pas, on a envie de savoir clairement comment va se terminer leur relation. Pour conclure:Un roman qui ne m'a pas touché comme je l'aurais pensé, notamment parce que certains passages avaient peu d’intérêt ou étaient mal amenés, et la fin est à mon sens inachevée. Cependant, la psychologie des personnages est poussée, le lecteur arrive facilement à se mettre dans la peau d'une personne battue, et en ce sens l'auteure nous permet mieux de comprendre les personnes qui sont dans ce genre de situation et la peur qui les tétanise. C'est un premier roman malgré tout réussi. Maureen McCarthy arrive quand même à susciter notre intérêt jusqu'à la dernière page, et je suis curieuse de lire ses prochains écrits car on sent qu'elle a un certain talent pour l'écriture qui ne demande qu'à être amélioré.Ma note: 14/20.