Sweet Sixteen, de Annelise Heurtier
Il y a quelques temps, je suis allée voir Les Figures de l’Ombre au cinéma (que je vous conseille fortement au passage). On y suit l’histoire de trois afro-américaines embauchées à la NASA en tant que calculatrice humaine (si, si, dans les années 60, c’était un véritable job). Bien entendu, la ségrégation qui fait rage aux Etats-Unis ne les épargne pas. Comme quoi, on a beau être la personne la plus intelligente du monde, si on est né(e) de la mauvaise couleur et du mauvais sexe, on ne sera jamais écouté(e).
Enfin bref, tout ça pour vous dire que le film est génial et que pour rester dans ce thème, je vais dépoussiérer ma PileALire et vous présenter aujourd’hui Sweet Sixteen de Annelise Heurtier. Il faut dire que le livre date de 2013 et qu’il est depuis à peu près autant de temps dans ma PAL. Sa couverture, retraçant la séparation blanc/noir qui régnait pendant la ségrégation, et son résumé m’avaient tapé dans l’œil. Seulement, j’avais aussi peur que l’histoire ne soit triste, trop triste et c’est ainsi que le livre s’est quelque peu perdu dans ma PAL. Ne me jugez pas, l’être humain est contradictoire
Molly Castello a 13 ans lorsqu’elle se porte volontaire pour ce qu’elle croie n’être qu’une farce administrative. Mais trois ans plus tard, elle doit se faire une raison : elle fait bien partie des neuf « chanceux » qui vont faire leur entrée au lycée de Little Rock, jusqu’alors constitué uniquement d’élèves blancs. Le sujet devient un débat national et bientôt la résistance blanche s’organise. Tous les coups semblent permis pour empêcher les noirs de « contaminer » le lycée. Et ce n’est pas Grace Anderson, élève de ce lycée, qui va s’en préoccuper. Trop concentrée sur ses problèmes de cœur, elle ne s’occupe guère de la révolution qui gronde à côté d’elle. A moins que le destin ne se charge de lui montrer ….
Ce récit est inspiré d’une histoire vraie, celle des neuf étudiants noirs qui ont eu le courage de se battre contre presque toute la nation pour obtenir le même droit que les blancs. La ségrégation touchait à sa fin, mais les protestations n’en étaient pas moins violentes.
A tel point que les premiers enfants noirs étudiants dans des écoles blanches étaient protégés en permanence par des marshals
Voir ici le point de vue de deux héroïnes à la couleur de peau aussi différente que le statut social est donc un excellent choix narratif. On y voit alors beaucoup plus nettement les arguments pro-ségrégation, qui peuvent paraître ahurissants de nos jours, et le silence pesant de ceux qui n’étaient ni pour, ni contre, comme Grace. Cela permet au livre de ne pas tomber dans un extrême ou un autre et de nous présenter la ségrégation dans toute sa complexité.
D’ailleurs les deux héroïnes n’en sont pas vraiment. Aucune d’elle ne fera d’acte héroïque au sens propre du terme : Molly essaie juste de survivre dans un monde qui ne veut clairement pas d’elle ; Grace tente de savoir qui elle est. Du coup, il est nettement plus simple de s’identifier à l’une ou à l’autre.
Pour ce qui est de l’écriture en elle-même, elle est fluide et directe. L’alternance des deux points de vue rythme la lecture et fait qu’on avale très vite les pages.
Et c’est un peu le seul reproche que je ferais au livre. Les actions se passent trop vite et la fin n’offre aucune conclusion à l’histoire. J’aurais vraiment aimé une fin plus développée. Parce que là, on reste vraiment sur sa faim (quel humour ! ).
En bref, c’est un très bon livre pour faire découvrir sans mélodrame ou débordement de bons sentiments, la ségrégation aux enfants. C’est, comme bien d’autres, un chapitre de l’Histoire sur lequel l’Ecole passe malheureusement trop vite. Et pourtant, aujourd’hui plus que jamais, il serait de bon ton de se souvenir des erreurs passées de l’Humanité.
Bonne lecture les Cocos !