La chaleur était insoutenable. Je ne comprenais pas pourquoi j’étais là. J’entendais des bruits étranges, mais familiers. Ma mère peut-être ! Mon père ? Tout était très sourd et je me sentais de plus en plus inconfortable dans ce lieu trop petit pour déplier mes jambes que je devais tenir entre mes bras pour ressentir un peu de confort.
J’avais très envie de pleurer. Je grelottais même s’il faisait très chaud, mais personne ne venait à mon secours. J’étais incapable de hurler et j’étais bien trop petit pour vivre une si épouvantable terreur. Je ne me voyais pas, je n’avais pas les mots ou les connaissances, mais je savais que j’étais petit et fragile…
Soudain ma tête tourna vers le bas. Je sentis dès lors tourner le sang qui me chauffait les oreilles et le nez puis remplir mes lèvres, qui devaient être toutes gonflées et bleuies. Volontairement, je fermai mes yeux pour ne pas discerner la noirceur qui m’effrayait comme les gros vampires et les monstres les plus horribles, ceux qui n’existent que dans les livres. Je voulais tant voir la lumière. Où étais-je et pourquoi étais-je incapable de recevoir juste un tout petit peu de clarté pour me rassurer et pour donner une chance à mon pauvre cœur affolé qui battait la chamade ?
Depuis combien de temps étais-je là ? Je ne saurais répondre. Tout ce que je sais, c’est que j’étais transi, apeuré, mourant et que le lieu trop étroit m’empêchait de respirer. Une toute petite musique, douce comme un ruisseau, me donna l’espoir que quelqu’un passerait par là, par un hasard incroyable, humerait ma présence et me sortirait des antres de la noirceur lugubre de cette prison qui serait peut-être mon tombeau.
Un bruit de cliquetis et de tonnerre plus fort que tous les autres me fit croire pendant quelques secondes que des hommes armés embrayaient leurs mitraillettes. Où suis-je ? Comment puis-je analyser ma situation dans cette pièce qui sent la poussière et où il n’y aurait même pas assez d’air pour qu’une mouche y survive ?
Je pleurais en silence en entendant ma maman qui se lamentait en hurlant mon prénom. Sébastien ! Sébastien ! Elle avait le ton de ces gens qui souffrent et qui ont mal aux entrailles. Je lui avais fait mal ! Cette voix douce était mon seul salut.
J’espérais si fort, j’étais épuisé. J’allais mourir avec les lamentations de ma mère et les bruits de l’ambulance ou de la police en sourdine. Ces derniers bruits m’accompagneraient jusqu’à ma mort. Je tenais maintenant très fermement mes jambes, je fermai très fort les yeux, je priai une ou deux fois le petit Jésus et Marie, la maman du monde.
Je tins bon comme le meilleur petit garçon de trois ans du monde jusqu’à ce que ma mère en larmes et deux policiers ouvrent enfin la porte de la sécheuse !
Notice biographique
Née à Roberval en 1969, Chantale Potvin enseigne le français de 5e secondaire depuis 1993. Elle a publié cinq romans soit :
-Le génocide culturel camouflé des indiens
-Ta gueule, maman
-Les dessous de l’intimidation
-Des fleurs pour Rosy
-T’as besoin de moi au ciel ?