Une psychologue (F. Dolto) disait que l’adolescence était comme la mue d’un homard. Ce crustacé avait une carapace solide lors de l’enfance, mais adulte, il devait s’en construire une nouvelle. Entre ces deux périodes, il y en a une sans carapace, où il est vulnérable à toutes les attaques extérieures. Comparant l’adolescence à cette période de mue, elle souligne le caractère sensible et vulnérable du jeune pour qui une accumulation de choses qui nous semblent si anodines pour nous les adultes, peut avoir des conséquences dramatiques.
Et puis, il y a ces choses, moins anodines encore, mais qui elles aussi passent inaperçues. Ces espèces de coups de poignards pris encore et encore, mais gardés sous silence…
Aujourd’hui, je voulais vous parler de la série que j’ai terminé hier, qui m’a fait chavirer, pleurer, m’énerver. Une série qui frise le sensationnel, qui a obtenu un record de popularité historique, oui, je vous parle bien sûr de cette série :
Adapté d’un roman de Jay Asher, cette série raconte l’histoire de Clay, un jeune garçon bouleversé par le suicide d’une de ses amies de lycée : Hannah. Un soir, il reçoit une boîte avec des cassettes audios. Lorsqu’il commence à les écouter, c’est le voix d’Hannah qu’il entend. Celle-ci lui apprend alors que ces cassettes sont les raisons qui l’ont poussé à passer à l’acte et que s’il les a en sa possession, c’est qu’il en fait lui même partie. Commence alors une descente aux enfers dans l’univers des lycéens américains.
Attention, même si j’y prends garde, il se peut que quelques spoilers se glissent dans la suite de l’article.
Pourquoi il faut absolument regarder cette série ?
- La série met parfaitement en évidence les mécanismes du harcèlement scolaire. Tout part d’un point, d’une personne qui souhaite nuire… Ou qui n’a absolument pas conscience du mal qu’il fait ! Et puis tout s’enchaîne jusqu’à l’escalade.
- La série met en évidence une des principales caractéristiques des ados : la nécessité d’appartenir à un groupe à tout prix. Quitte à nuire à autrui. Mais aussi les dégâts que cela engendre quand le jeune se sent (et j’insiste, sur l impression) rejeté par tout le monde.
- La série met en évidence l’importance de la réputation. Surtout à cet âge ! L’importance du paraître contre la vérité. Quitte à mentir et à ne pas assumer ses actes. Dans la même veine, on peut aussi découvrir les « avantages » de cette popularité. Personne en effet, n’osera s’en prendre à un élève populaire.
- La série soulève aussi un point important : la violence que subissent certaines jeunes filles quotidiennement à l’école. Le sexisme y est ambiant et certains garçons s’imaginent tout permis. Cela peut venir d’une phrase, ou pire encore, d’un geste. Et tout ça se fait dans la plus grande des indifférences.
- Enfin, la série souligne une chose capitale : même avec la meilleure volonté du monde, parfois, on ne peut rien faire ou on s’y prend mal. Quand on regarde cette série, tout est évident pour nous, car on connaît déjà sa funeste fin. Mais lorsque le suicide n’a pas encore eu lieu, il est tellement difficile d’en repérer les signes !
Ces choses là vous parlent ? Probablement si vous vivez avec des jeunes ou si vous travaillez avec eux et autour d’eux. Quant à la question de savoir si chaque personne présente sur les cassettes y méritent sa place, je vous laisse en juger, car cette série pousse à la réflexion, à la remise en question. Certains basculent dans le remord, d’autres préfèrent se voiler la face… A chacun son mécanisme de défense. Et nous ? Si nous étions à leurs places ?
Cette série a le mérite de ne pas en faire de trop (eh oui ! Même si certains pensent que certaines choses n’étaient pas à montrer, je pense que si !). Elle traite les choses sans aucune concession et avec un réalisme troublant, dérangeant ! Elle nous flanque des réalités en pleine figure comme des claques!
D’autres critiques souligneront parfois « l’exagération » d’Hannah dans certaines cassettes. En vérité, on oublie que ces cassettes représentent son point de vue d’adolescente, sensible, que tout transperce comme des poignards. Cela ne reste jamais que le point de vue d’une personne en souffrance, qui se confie avant d’en finir.
Que l’on aime ou pas, la série aura eu le mérite de nous bousculer et de nous interroger sur la dépression et le suicide. Sur le fait que les plus proches sont souvent ceux qui ne voient pas les signes avant-coureurs. Que tout commence parfois d’un « simple geste ». Elle soulignera aussi la difficulté parfois d’être une fille en classe, d’être une fille tout court.
Une série poignante, qui s’adresse d’abord aux adolescents, mais qui devraient aussi s’adresser à nous : professeurs, éducateurs, adultes, parents. Un récit poignant dont on ne sort pas indemne.
NOTE GLOBALE ♥ ♥ ♥ ♥ ♡