J'ai découvert Agnès Marot avec I.R.L. il y a un an grâce à la blogosphère et quelle découverte, mes amis ! J'avais vraiment adoré ce roman et j'étais tombée en pâmoison devant la personne, gentille, ouverte et drôle, sur . Du coup, lorsque j'ai eu vent d'un nouveau roman, je peux vous jurer que je l'ai attendu de pied ferme et l'ai acheté le jour même de sa sortie. MAIS comme je suis toujours une andouille couplée à un brocoli (je ne vous raconte pas les odeurs pendant et après la cuisson), j'ai attendu au moins 30 ans pour le lire. Heureusement, la vie se charge parfois de mettre des coups de pieds dans mon humble fessier et la perspective de rencontrer Agnès Marot aux Imaginales m'a fait sortir (les doigts du même fessier) Quelques pas de plus de ma PAL.
Sora vient d'apprendre qu' elle doit passer le reste de sa vie à béquilles. Son quotidien se résumera désormais aux cours au lycée et aux séances de kiné. Elle pourrait s'y faire si Kay, la grande sœur qui l'a quasiment élevée, tenait le coup ; mais cette dernière, qui a toujours été la plus forte des deux, est en pleine descente aux enfers. Alors Sora décide de prendre les choses en main et d'enfiler la cape de ces super-héros qu'elle aime tant. Objectif : changer sa vie. Son meilleur atout : l'héritage navajo laissé par sa mère. Un ancien pouvoir de guérison qui pourrait les sauver, elle et sa sœur. Le problème, c'est qu'elles ne sont pas les seules à le chercher et que leur rival est prêt à les suivre au bout du monde pour parvenir à ses fins.
L'avis qui prend la route
Ma faute à moi toute seule (ou peut-être en partie à une quatrième de couverture qui en dit bien peu), je n'avais pas du tout compris où je mettais les pieds en ouvrant ce livre. Là où je pensais atterrir dans un roman contemporain (comprendre non SF/Fantasy/Fantastique, etc.), je vois petit à petit surgir des éléments absolument pas en raccord à la réalité. Vous auriez vu ma tête ! Un océan de perplexitude et incompréhension. Puis, au fil de ma lecture, portée par l'écriture fluide d' Agnès Marot, j'ai compris : j'étais en train de lire un roman fantastique ! Le fantastique est un genre assez rare en littérature finalement, il caractérise les récits où, au beau milieu de notre monde à nous, bien réel et cartésien, apparaissent des composants surnaturels, qui n'ont rien à faire là et qui choquent un tant soit peu les personnages. Une fois que j'ai capté la chose et que j'ai arrêté de me questionner sur ma santé mentale ou sur ma capacité à suivre correctement une histoire, c'était reparti comme sur des roulettes !
Outre ses éléments fantastiques étonnants, Quelques pas de plus est d'une originalité hallucinante. Sa première thématique, le handicap invisible, n'est pas souvent (pour ne pas dire, jamais) traité en littérature, ado et adulte, et, lorsque, comme moi, on n'y connait rien, c'est passionnant et ça a le mérite d'instruire, d'ouvrir les yeux sur une réalité peu connue. Par exemple, une grande place est faite à la théorie de la cuillère, que je ne connaissais que de nom (je vous encourage à jeter un œil à cette vidéo qui vous l'expliquera bien mieux que moi) et qui est absolument nécessaire pour parler des souffrances quotidiennes que subissent certaines personnes (plus nombreuses que ce que l'on croit !).
Mais, malgré cette thématique autour du handicap, jamais ce roman ne tombe dans le pathos, au contraire ! Les deux personnages, féminins (bon point !), sont forts, durs et restent optimistes. Moi, valide, je ne suis pas sûre d'avoir le courage de partir aux États-Unis, pour un road-trip, avec un truc chelou qui me poursuit. Chapeau bas. Et d'ailleurs, même sans cette histoire de road-trip, c'est tout une réflexion sur le "comment vivre au quotidien avec un handicap" qui est présente. C'est diablement intéressant.
La délicate plume d'Agnès Marot est aussi au rendez-vous, avec une très bonne maîtrise d'une double temporalité (le présent et sa course poursuite dans le Grand Canyon et le passé avec le pourquoi du comment) qui rythme agréablement le récit. Comme dans I.R.L., elle glisse de nombreuses petites références geeks qui ancrent l'histoire (Big up pour la référence à Play your life !), on rit, on s'amuse, on flippe un peu quand même (y a du fantastique, j'ai dit) et les pages se tournent facilement.
Pour revenir au fantastique, Agnès Marot a choisi de s'intéresser à la culture Navajo que je ne connaissais pas du tout. Original et peu répandu, le traitement de cette culture apporte une bonne grosse dose de magies et de mystères. C'est apporté doucement, par petits morceaux, et l'on s'imprègne assez facilement de cette nouveauté. Encore plus fort, c'est tellement bien amené qu'on finirait presque par y croire !
Malgré un démarrage un peu chaotique, je suis rapidement (et une nouvelle fois) tombée sous le charme de l'imagination d' Agnès Marot. Moi qui ne suis pas particulièrement fan de road-trip, j'ai aimé ce partage entre la vie difficile, quotidienne et lycéenne de Sora et la grosse course-poursuite au milieu du désert, preuve que le sujet est hyper bien fichu ! Les deux héroïnes sont très bien construites mais j'ai toutefois eu une petite préférence pour Kay, la grande sœur, femme forte et protectrice mais qui a une sacrée part d'ombre et beaucoup de faiblesses bien dissimulées. S'il fallait mettre un bémol tout de même, je suis un peu déçue de ne pas en avoir appris un peu plus sur Marc, le "méchant garçon", le fait qu'il n'était pas "méchant" sans raison m'avait plu, mais hélas, on passe un peu rapidement sur son destin. Et last, but not least, elle n'est pas magnifique, cette couverture ?!