Vermine. Déjà, le fait de porter ce genre de nom de code n'est pas une bonne chose pour l'amour-propre. Encore moins quand vous avez été victime d'expériences sadiques (merci le Baron Zemo) qui vous ont transformé en un monstre cannibale, qui vit dans les égouts et attaque tout ce qui bouge. Cet ennemi de Spider-Man, aussi dangereux que pathétique, a été pris en charge par le docteur Kafka, qui n'a pas son pareil pour aider les cas désespérés, savoir les écouter et atteindre le peu d'humanité qu'il reste en eux. Seulement voilà, Vermine s'est échappé et il a semé derrière lui des cadavres ensanglantés. Spider-Man se sent en partie responsable de ces morts et la colère gronde en lui : aurait-il dû se débarrasser définitivement de son adversaire, plutôt qu'espérer en des soins miraculeux qui n'ont finalement pas fonctionné? Le tisseur ne va pas très bien. Il a récemment été enseveli vivant par Kraven le Chasseur, et même s'il est parvenu à se sortir de terre et vaincre une fois encore le terrible russe, son esprit en a gardé des séquelles. De plus, le traumatisme de la disparition prématurée de ses parents biologiques n'a jamais été affronté sérieusement. Autre personnage pris dans la spirale des failles psychologiques qui s'ouvrent à l'improviste, l'ami de toujours, Harry Osborn. Il n'arrête pas d'halluciner et voir le fantôme de Norman son père Norman, qui le pousse vers un chemin de violence, menant inéluctablement à la haine, à l'héritage familial, celui du Bouffon Vert, dans lequel les Osborn ont tendance à se perdre. Entre colère, manque de confiance en soi, doute et traumatisme de l'enfance, les personnages de cet album magnifique se mettent à nu devant le lecteur, et semblent plus faillible que jamais. Pauvre Vermine, dont le père avait les mains baladeuses et la mère préférait ne pas savoir, pauvre Harry, dont le géniteur a tué une des meilleures amies, et lui a légué un titre de criminel psychopathe, avec planeur et bombes citrouilles inclus. La famille, ce n'est pas toujours drôle.
Il faut dire que le scénariste Jean-Marc DeMatteis n'a pas son pareil, dès lors qu'il s'agit d'aller creuser dans ce qui se passe au plus profond de la psyché des supers héros auxquels il s'attache. Certes nous avons de l'action, des mano a mano puissants (et en cela le style anguleux et incisif de Sal Buscema est particulièrement efficace, et permet une lecture aussi agréable que claire) mais c'est surtout l'approfondissement psychologique et intime qui fait de cet "enfant intérieur" une sortie totalement indispensable. Au risque de sembler un peu trop exalté, je remercie infiniment Panini Comics pour avoir exhumé des cartons cette aventure, autrefois publiée en VF dans les pages de Nova. Excellente revue d'antan mais qui proposait ces épisodes dans un petit format, qui ne convenait pas à la beauté de ces récits introspectifs. Derrière le héros se cache l'homme, et l'homme très souvent est le résultat des affects reçus ou dont il a été privé. L'homme est ce qu'il est car il met sous silence ses instincts les plus bas et tente de s'élever, jour après jour, au risque parfois de chuter avant de se relever, mais pour des individus comme vermine, existe-t-il une possibilité de se racheter, de devenir quelqu'un d'autre? Sera-t-il possible pour Norman Osborn de s'affranchir de la malédiction paternelle, ou faudra-t-il un ultime affrontement entre le Bouffon et Spider-Man pour que les deux amis se déchirent, jusqu'au conséquences les plus extrêmes et que triomphe la folie? Voici une série d'épisodes absolument somptueux. Tout est écrit avec une sensibilité remarquable, à la virgule près. On ressent ce que ressentent les personnages, on tremble et on souffre avec leurs souffrances... rarement une parution présentant un récit super héroïque dégage autant d'humanité et d'honnêteté que cet "enfant intérieur". Certes la colorisation et quelques tics d'écriture trahissent l'époque à laquelle appartient cette aventure, mais que cela ne vous empêche pas de vous jeter dessus. C'est une véritable perle et tous les fans de Spider-Man ou de récits mûrs et profonds se doivent absolument de le posséder, dans leurs bibliothèques garnis. Pour nous l'album totalement incontournable du mois de juin.
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