Le dessin est confié principalement à trois artistes. Paolo Rivera, Marcos Martin (le plus caricatural et expressionniste des trois) et Chris Samnee (dont le story telling est parfait pour se marier avec l'écriture de Waid) ont fait un choix commun, celui de se concentrer sur de nombreuses petites vignettes, sur l'instauration d'une narration en images resserrée, riche, complexe, sans concéder aux splash pages et effets de manches qui peuvent épater par un réalisme vertigineux, mais ne servent pas le discours visuel dans sa linéarité (encore que Rivera en est aussi capable). Pas de pause arrêts sur images, pour la galerie, mais une fluidité inventive, qui a recours à tous les trucs, points de vue, toutes les variations, pour apporter à ces épisodes une touche versatile qui impressionne.
Et ceci se fait dans la durée, comme animée d'une force tranquille. Le run de Mark Waid n'entend pas bouleverser (au départ) l'existence décennale du personnage. Il veut s'inscrire dans une certaine crédibilité, construire avant de déconstruire, tout en gardant pour Matt un regard bienveillant, et ne pas l'emmener au plus profond du désespoir, juste pour le goût de l'épreuve. C'est un run épique, formidable, qui épate quand on le regarde depuis son aboutissement, alors qu'il naît en apparence dans la modestie. Un tour de force sans forcer, mais qui se déguste, dans ce format exhaustif, avec un immense plaisir assumé.
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