Éditions Le livre de poche, 2015 (296 pages)
Ma note : 15/20
Quatrième de couverture …
Tandis qu’elle s’ennuie sur la berge d’un fleuve, Alice voit tout à coup passer un lapin blanc, ce qui n’a rien d’exceptionnel, mais, chose surprenante, elle le voit également tirer une montre de la poche de son gilet. Intriguée, la voilà qui se lance à sa poursuite. Le lapin disparaît dans un grand terrier : elle décide d’y descendre à son tour.
C’est à la demande d’une vraie petite fille, justement prénommée Alice, que Charles Dodgson, professeur de mathématiques à Oxford, couche sur le papier l’histoire qu’il lui a racontée, en promenade, un jour de l’été 1862. Trois ans plus tard, sous le pseudonyme de Lewis Carroll, il la fait paraître et, encouragé par l’accueil de la presse, lui donne pour suite La traversée du miroir dont le succès, en 1871, est encore plus considérable. C’est que l’auteur sait prendre l’enfant au sérieux, et du coup toucher les adultes, comme il sait se dégager assez de l’Angleterre victorienne pour ouvrir à son livre l’avenir d’une œuvre classique.
La première phrase
« Alice commençait à en avoir assez de rester assise sur la berge, à côté de sa sœur, sans rien à faire. »
Mon avis …
Depuis toute petite, Alice au pays des merveilles n’est autre que mon Disney préféré. S’il a souvent été décrié, de nombreuses scènes me faisaient alors profondément rêver (la chanson des fleurs, la rencontre avec la Chenille ou encore la tea party avec le Lièvre de Mars et le Chapelier fou). Devenue adulte, il me tardait donc de découvrir le merveilleux conte imaginé par Lewis Carroll. Curieusement, j’ai différé ma lecture à de nombreuses reprises : la peur d’être déçue, la crainte de ne pas accrocher au registre de l’absurde. L’occasion d’une lecture commune, avec ma copine de blog La tête dans les livres, était trop belle pour passer à côté. J’ai choisi cette édition car elle comprend les deux volets des aventures d’Alice, mais aussi les illustrations de John Tenniel (bourrées de charme) qui apportent une plus-value à l’ensemble.
Lewis Carroll nous embarque dans un monde onirique, où la logique n’est pas franchement de la partie. Alice rencontre ainsi des créatures étranges, des animaux qui parlent. Elle grandit et rapetisse en fonction des aliments qu’elle choisit de manger (des biscuits, des morceaux de champignon). Elle se retrouve seule (le monde des adultes et les règles instaurées sont totalement absentes). Ceci pourrait être plutôt angoissant, mais la petite fille se débrouille finalement plutôt bien, même si elle se montre souvent en quête de repères.
Avec cette lecture, j’ai beaucoup aimé retrouver les personnages emblématiques de l’univers d’Alice au pays des merveilles. La Chenille. Le Chat du Cheshire. Le Morse et le Charpentier. Tweedle-Dee et Tweedle-Dum (devenus Tralalère et Tralali avec la traduction de mon édition). Ils sont tous là, même s’ils n’occupent parfois qu’un seul petit chapitre. Je me suis vite aperçue que la version de Walt Disney mélange des passages d’Alice au pays des merveilles et de La traversée du miroir. Grâce à cette lecture des œuvres d’origine, je me suis également dit qu’Alice au pays des merveilles est finalement bien plus qu’un simple conte destiné aux enfants : tout a un sens plus ou moins caché. Les jeux de mots foisonnent. Certains personnages feraient écho à des personnalités de la société victorienne d’alors. J’ai beaucoup aimé m’interroger sur ces différents aspects, même si je vous avoue avoir été parfois un peu perdue. J’ai l’impression de ne pas toujours avoir tout saisi, ce qui a été frustrant ! J’imagine que d’autres détails m’apparaîtront si je relis un jour ces deux romans.
Je pense avoir préféré Alice au pays des merveilles à La traversée du miroir, principalement pour les scènes que le premier roman propose. Alice apparaît pourtant de manière très différente selon l’opus que l’on considère. Si on peut sentir la petite fille un peu perdue (voire passive) face à ses étranges rencontres dans le premier volet, on ressent qu’Alice a pris de l’assurance dans La traversée du miroir. Avant de devenir reine, elle n’hésitera pas à taper du poing sur la table face aux deux Reines (la reine blanche et la reine rouge) rencontrées pendant la partie d’échecs. J’ai trouvé cet aspect plutôt intéressant.
En bref, j’ai été ravie de retrouver les personnages emblématiques de l’univers d’Alice au pays des merveilles. J’ai été amusée par certains, fortement ennuyée par d’autres… D’où une lecture parfois inégale. J’aime en tous cas énormément ces romans qui offrent une double interprétation. Ces deux volets peuvent donc tout autant plaire aux enfants qu’aux adultes. Avec son univers si singulier, si loufoque mais inoubliable, Lewis Carroll frappe fort. Mon moment préféré reste incontestablement la fameuse scène du thé.
Extraits …
« Devant la maison, sous un arbre, était dressée une table où le Lièvre de Mars et le Chapelier prenaient le thé ; entre eux était assis un Loir, que les deux autres utilisaient comme coussin, posant leurs coudes sur lui et parlant par-dessus sa tête. “Très inconfortable pour le Loir, se dit Alice, mais comme il dort, je suppose que ça ne le dérange pas.”
La table était grande, mais ces trois personnages se serraient dans un coin.
– Pas de place ! Pas de place ! s’écrièrent-ils en voyant arriver Alice.
– Il y a plein de place ! protesta Alice, indignée, avant de s’asseoir dans un grand fauteuil à un bout de la table.
– Prenez donc du vin, dit le Lièvre de Mars d’un ton encourageant.
Alice examina toute la table, mais il n’y avait là que du thé.
– Je ne vois pas de vin, fit-elle remarquer.
– Il n’y en a pas, dit le Lièvre.
– Alors ce n’était pas très poli de m’en proposer, dit Alice avec colère.
– Ce n’était pas très poli de vous asseoir sans être invitée, répliqua le Lièvre.
– Je ne savais pas que c’était votre table ; le couvert est mis pour bien plus que trois.
– Il est temps d’aller vous faire couper les cheveux, dit le Chapelier.
Depuis un moment, il observait Alice avec une vive curiosité et ce furent les premiers mots qu’il prononça. »