Ici tout commence par un épisode tiré de Gotham Knights #8, en noir et blanc, finalement assez anecdotique par rapport à ce qui va suivre. Nous trouvons un arc narratif intitulé Broken City justement, en 6 parties, publié juste après le Silence de Jeph Loeb et Jim Lee. Batman tente de retrouver la trace d'un malfrat accusé d'avoir tué sa propre sœur, cette dernière était enceinte et durant l'enquête, le justicier croise aussi la route d'un gamin devenu orphelin, dont les parents ont été abattus dans une ruelle de la ville. Ce qui n'est pas sans évoquer de tristes souvenirs, qui finissent par remonter à la surface et nuire à la lucidité et à l'efficacité du super-héros. Azzarello joue un peu trop sur les clichés par moments, l'histoire devient caricaturale avec comme tout bon polar angoissé et angoissant, la femme fatale et vénéneuse, des didascalies un peu pompeuses et des criminels sans foi ni loi. Au passage on voit le Pingouin qui pointe le bout de son nez crochu, toujours très utile lorsqu'il s'agit de savoir ce qui se passe dans les sous-bois de la pègre à Gotham. Mais aussi Killer Croc, qui se fait exploser la dentition par Batman, à plusieurs reprises, mais trouve toujours de l'argent pour un nouveau joli sourire dès le lendemain, ce qui n'est pas sans éveiller des soupçons. Eduardo Risso est excellent au dessin comme à son habitude, pour peu qu'on apprécie son style : il y a une réelle économie de traits dans ces planches, et une science des ombres et de la mise en page qui colle parfaitement au ton du récit. Nous sommes loin du super-héroïsme classique et nous baignons totalement dans les méandres d'une ville pervertie et sale, où l'argent et les délits ruines les âmes et les corps. Plutôt intéressant et artistiquement abouti, même si je le répète, pas forcément très original sur le fonds.
Broken City est l'exemple type d'un album artistiquement ambitieux et qui sort des sentiers battus, avec de fort jolies planches d'un bout à l'autre, et un vrai univers poisseux à souhait. Mais qui s'appuie aussi sur pas mal de redites, de codes éculés du polar, dont le scénariste Azzarello a tendance à abuser par endroits. Dans l'ensemble, recommandé uniquement à ceux que 100 Bullets emballent vraiment (j'en fais partie) ou aux aficionados de l'univers Flashpoint.
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