« Des cauchemars ont commencé à peupler mes nuits, et des insomnies à les rendre redoutables, je suis tombée malade, j’ai perdu du poids, le médecin m’a proposé des calmants, des somnifères, je l’ai envoyé au diable. Les idées noires dans ma tête s’étalaient comme une nappe de mazout sur la mer. Nous nous aimions ? Oui. Si fort. »
Martha a fait un virage à 180 degrés. Un accident très grave lui a fait perdre la mémoire et l’a rendue fragile, meurtrie. Certes, sa tête ressemble à un kaléidoscope, une radio à laquelle on a débranché certains câbles mais elle a gardé un cœur immense et le sens de l’émerveillement. C’est peut-être cela qui la tient debout… Autour d’elle il y a Martin, qui traduit des romans. Martin, son frère jumeau, son confident, le seul qui arrive à décortiquer les fragments de son âme meurtrie et qui l’aide petit à petit à sortir de sa thébaïde. Martha a un fils qui la croit atteinte d’une amnésie et de maux irréversibles et ne l’aide pas le moins du monde à reconstruire le château de cartes ébranlé qu’elle cloisonne dans sa tête.
C’est l’été, la nature a revêtu son manteau vert liseré de bleu, de ces fleurs sauvages qui portent le très beau nom de Veronica Longifolia. Martin emmène sa Martha dans un coin de Bourgogne, bercé par le clapotis d’une rivière. Une panne de voiture leur fait rencontrer Septime, un charmant garagiste, renié par sa famille de vignerons, qui se propose de les conduire chez leur hôte qu’il connaît bien. Puisque la réparation de la voiture prendra environ une semaine, ils profiteront de l’endroit et se laisseront porter par la quiétude du village. Au cours de leur séjour, ils se rendront chez Jeanne, une femme qui a compté dans la vie du père de Martin et Martha. Peu à peu, Jeanne s’épanche et finit par leur dévoiler les écorchures de son passé sentimental, jamais cicatrisées.
Et tandis qu’au cœur de ce village préservé, Jeanne se reconstruit doucement, Martin doit se rendre d’urgence en Irlande pour y retrouver l’auteur qu’il a traduit, soupçonné de plagiat.
À travers une plume délicate et éblouissante, que les habitués de l’auteur reconnaîtront d’emblée, nous voici dans un coin de Bourgogne, auprès de la douce Martha qui renaît vaille que vaille d’un drame qui la laissait pour morte deux ans auparavant.
L’amour et les émotions s’immiscent entre chaque ligne de ce récit. L’auteur esquive avec brio le caractère larmoyant et le pathos s’accrochant à l’histoire et l’on finit par retrouver, à travers la force et le sourire de Martha, l’audace de croire à la vie, même si celle-ci a basculé un jour.
Parmi les personnages, tous émouvants, j’aime particulièrement celui de Jeanne qui me parle, pour avoir connu des bouts de vie qui ressemblent aux siens.
Un ravissement. Indéniablement…
Martha ou la plus grande joie de Francis Dannemark
Date de parution : 16/6/2017