Ce matin, en me levant tel un lapin Duracell, j'ai décidé qu'il était temps de mettre un terme à la petite léthargie bloquesque installée depuis un mois et demi. La rentrée (et la météo très instable) faisant leur approche, les nouvelles résolutions sont de mises. Et puis bon, ça fait un paquet de semaines que je voulais parler de ce Songe à la douceur. Sans surprise aucune, c'est un joubi.
De quoi ça cause ?
Tatiana a 14 ans quand elle tombe follement amoureuse d' Eugène, adolescent de 17 ans, meilleur ami du petit ami d'Olga, la soeur de Tatiana. Le problème, outre la différence d'âge qui à cette période de la vie est ultra importante, Eugène est un garçon particulièrement désabusé, dépressif, prétentieux et exécrable. Même s'il ressent quelque chose pour Tatiana, il la rejette durement. Une dizaine d'année plus tard, voilà t'y pas qu'Eugène et Tatiana se retrouve par hasard. Tous deux ont bien changé, mise à part qu'ils sont toujours amoureux l'un de l'autre. C'est balot.
Alors, c'était comment ?
Librement adapté d'un roman de Pouchkine, Eugène Oneguine, Clémentine Beauvaistransposele récit au XXIe siècle avec une grâce et un talent qui m'a laissée sur le carreau en PLS/JPP, me rendant compte que je ne pourrais jamais atteindre un tel niveau de perfection.
L'histoire d'amour en elle-même pourrait être très banale. Un garçon, une fille. Ils s'aiment, mais n'osent pas se l'avouer. Séparés par des non-dits et un événement tragique, impossible de dire " je t'aime " comme ça, c'est sûr. Mais c'était sans compter sur le talent immense (je le répéterai jamais assez) de Clémentine Beauvais.
1- C'est drôle. Enfin pas toujours " HA HA ", parce que c'est quand même inspiré de Pouchkine et Poupouch' c'est pas drôle. En fait, tout l'humour du roman vient de la narratrice (alors moi je dis que c'est une femme, mais je crois qu'il y a pas d'éléments concrets concernant l'identité sexuelle de la personne). That's fucking narratrice ! Le genre de narratrice qui parle à son lecteur, mais surtout le genre qui engueule son héros parce qu'il dit pas à la fille qu'il aime, bah QU'IL L'AIME. Très personnellement, j'avais Emma Thompson dans ma tête. Maman poule-sarcastique-qui a la main un peu lourde sur la bouteille de gin. Voyez l'genre.
2- L'écriture. Oh My. Déjà, il faut avoir de sacrées cojones pour proposer une réécriture de Pouchkine (Ecrivains russes/français XIXe = dieux). C'est comme si je décidais de réécrire Au Bonheur des dames d'Emile Zola façon contemporain. Wait... Bref. L'écriture , comme je disais, est non seulement bourrée d'humour, avec en prime un sens tout particulier de la tragédie (je rappelle Poupouch' c'est pas drôle) (donc déjà la nana fait un mélange de tons et ça marche), mais en plus EN PLUS, ça rime. Yep. Aidée par une mise en page éclatée, toute sautillante, l'écriture est MAGNIFIQUE. Si bien que j'ai lu la moitié du bouquin à voix haute pour entendre les sons chantants et le rythme des phrases. Ce que je ne fais jamais, est-ce utile de le préciser ?
3- Collection Exprim' de Tibo Bérard, chez Sarbacane. Je pourrais m'arrêter là rien qu'en balançant le blaze du grand Monsieur de la maison d'édition. Je savais que ce gars là était une sorte de petit génie du milieu qui te propose des trucs oufissimes en terme de qualité et qui ne prend pas les jeunes lecteurs pour des teubés, mais ça faisait longtemps que j'en avais pas eu la preuve sous les yeux (parce que je n'ai pas ouvert un Sarbacane depuis ma première année de fac sivouvoulétousavoir). C'est dingue quand on pense que ce roman exigeant, poétique et faisant référence à un classique de la littérature russe, en gros tout ce qui rebuterait n'importe qui (ou presque), est accessible pour les jeunes (à partir de 13 ans). D'ailleurs, jeunes ou vieux, ce livre est à lire, un point c'est tout. Je trouve ça formidable, moi. Voilà.
Si si j'vais conclure
Parfait alliage entre classique et modernité, aussi bien sur la forme que dans le fond, avec un langage adulte, poétique, des réflexions sur la vie, l'amour, le sexe qui passent à travers les pensées des protagonistes, Songe à la douceur est un délice. Même si je n'ai pas été aussi emportée que j'aurais aimé par l'histoire d'amour (parce que j'ai eu beaucoup de mal avec le héros masculin qui me rappelait en plus quelqu'un que j'avais connu), j'en suis ressortie enchantée. Merci Clémentine Beauvais. pour ce moment. Je vous aime d'amour.
PS : HONTE A MOI. J'ai oublié de parler de la BO (sisi), la liste de titres à écouter (j'ai supposé) pendant la lecture (ce que j'ai fait). Parce qu'en plus Beauvais a d'excellents goûts musicaux. Y a trop de perfection chez cette jeune femme. C'est carrément louche...