La série consacrée aux Defenders était disponible sur Netflix depuis moins de temps qu'il n'en faut pour regarder les 8 épisodes à la suite, que déjà une litanie de critique globalement mauvaises fleurissaient sur la toile. Je cite par exemple ce commentaire absurde, en point d'orgue de ce que j'ai pu lire : c'est une très mauvaise série... comme toutes les autres avant, à part Daredevil, qui est ma préférée et la seule que j'ai regardé... certains spectateurs sont des génies, assurément. Soyons un peu plus sérieux, et revenons à nos Défenseurs. Le problème avec ces épisodes, c'est le manque de rythme au départ, et cela peut se comprendre. Il fallait resituer un peu tout le monde et surtout trouver une raison pour rapprocher quatre personnages qui jusque-là n'interagissaient pas vraiment ensemble. Du coup la mise en scène, le montage, la narration sont assez basiques. On a droit à une alternance des 4 héros, des tranches de vie qui se succèdent et qui en apparence ne semblent pas forcément destinées à se recouper. Il faut attendre 2 heures avant que enfin les Défenseurs agissent de concert, pour la première fois. Du coup l'intérêt augmente et on se prend enfin au jeu d'un produit, comme toujours filmé avec soin, et assez plausible pour peu qu'on n'avance pas des prétentions artistiques exagérées, clairement impossibles à exiger dans ce contexte précis. Autre défaut structurel, la série parait hermétiques aux nouveaux arrivants, qui n'ont pas suivi ce qui a précédé. De nombreuses références rendent le propos confus, et comme porte d'entrée, on a déjà vu beaucoup plus accueillant. Ne comptez pas sur moi pour critiquer le jeu d'acteur ou ceux qui ont été choisis pour incarner Jessica Jones, Danny Rand, Luke Cage ou Matt Murdock. Je les trouve chacun dans leur domaine assez pertinents, même si c'est vrai que Luke est un peu trop gentil et mollasson par rapport à ce qu'on voit dans les comics, et que je comprends parfaitement en quoi Iron Fist peut être irritant, voir mièvre pour beaucoup. Daredevil est hors catégorie, tant Charlie Cox domine le diable de Hell's Kitchen. Il a tout compris de la manière de le faire agir, se comporter, ressentir, et c'est un grand plaisir de le voir encore une fois dans ce rôle. La nouveauté c'est aussi Sigourney Weaver, une actrice qui ne tient pas là le rôle de sa vie certes, eu égard à un impressionnant curriculum. Elle est une "grande méchante" à l'écran, une des curiosités indéniables de ces Defenders. Puisque c'est elle l'antagoniste principale de ces épisodes, on va aussi reparler de la Main, ces ninjas qui hantent Netflix, depuis la saison une de Daredevil. (edit : Et on n'abordera pas le sujet de Stick, qui est la coolitude en personne)La Main, ce sont des combattants hors pair, qui aiment investir les sommes colossales dont les méchants disposent dans la finance new-yorkaise. Danny Rand n'est pas heureux du tout de cette décision. Le pauvre découvre le capitalisme moderne d'une série à l'autre, et son chi ne peut pas y faire grand chose. Les ninjas de la Main se battent admirablement bien dans un épisode, puis se font rétamer comme des débutants, d'un revers de la main, dans le suivant. Le recrutement doit laisser à désirer. Heureusement pour eux, ils maîtrisent les techniques de la résurrection, de quoi obtenir de précieux esclaves lobotomisés, du genre Elektra, par exemple...La dynamique entre les quatre Défenseurs est globalement bonne. Les caractères sont assez opposés pour engendrer des scènes drôles ou conflictuelles, qui donnent de la vie et du relief à des moments plus creux, qui fatalement ne manquent pas au cours de cette série. Alexandra (S.Weaver) est inquiétante et nimbée de cet halo de supériorité qu'ont ces vilains mythiques qui pensent avoir tous les droits, car marchant à l'ombre de la vérité absolue, celle pour laquelle le concept de bien ou de mal n'existent pas. Mais il manque clairement ce grand moment final, cette envolée qui transforme l'essai et rend le personnage stratifié et complexe, comme peut l'être un Wilson Fisk des grands jours. Nous sommes aussi un ton en dessous en terme de chorégraphie urbaine, de scènes spectaculaires, tournées souvent en plan séquence, où les combats, les taquets et autres coups de tatane donnent du peps aux moments clés de la série. Ici il faut avant tout placer quatre pions en simultané sous les feux de la rampe, et ce n'est pas simple, avec une armoire à glace qui ne craint ni les balles ni les gifles, et une détective privée qui a plus souvent recours à ses talents de déduction et de fouine, qu'à sa force pourtant considérable. Parfois l'histoire avance par le biais de d'intuitions, d'indices nébuleux qui en une seconde deviennent clairs comme de l'eau de source pour nos Defenders, qui n'ont pas trop le temps de lambiner, après avoir gaspillé trois épisodes à se réunir, il n'en reste que cinq pour emballer et vendre la marchandise aux clients! Mais n'allez pas croire que je suis en train de faire la fine bouche, ou vous déconseiller de regarder ce nouvel effort. Au contraire, je suis assez heureux de constater que l'univers urbain de Marvel poursuit son extension, avec une certaine classe visuelle, et sans trop s'éloigner des lignes directrices annoncées dès le tout début. D'autant plus que le trailer final, annonçant l'arrivée imminente du Punisher, ne fait qu'ajouter un peu de poivre sur un plat déjà plutôt épicé. Ne soyons pas blasés, et prenons ces séries pour ce qu'elles sont. De l'entertainment soigné, qui dépasse largement les rêves les plus dingues que nous avions il y a encore une décennie. N'en déplaise aux haters qui ont tout de même téléchargé illégalement Marvel's Defenders dès le jour de sa sortie, avant de descendre les épisodes en flèche sur Internet, en avant-avant première.