Mon père sur mes épaules - Metin Arditi

Par Stéphanie @Stemilou

Présentation
Un père peut-il être un homme comme les autres ? Metin Arditi évoque le souvenir du sien, mort il y a vingt ans. En pélerinage dans les Grisons, où son père aimait aller, à sa table de travail, dans un bar d’hôtel, Metin Arditi rappelle à lui les souvenirs. Au fur et à mesure qu’ils reviennent, le portrait se précise, le non-dit s’entend, la vérité affleure.
Revenant à son enfance stambouliote, il retrouve son père avec des yeux de petit garçon ébloui : un homme toujours élégant, admirable et admiré, héros d’une famille juive cosmopolite. Il revit ses onze années d’internat en Suisse, un inoubliable amour d’adolescent avec Géraldine Chaplin, les leçons de sagesse offerts par ce père qu’il voyait à peine, et notamment : « Les livres, c’est autre chose. » Au fil de l’écriture, il revient sur l'éloignement et ses déchirures, l’affrontement sur la question juive, et la quête de l’estime d’un père qu’il continue de chercher après sa mort.
Un récit bouleversant, d'homme à homme.

Avis
Quoi de plus beau qu'un hommage à l'un de ses parents? L'auteur Metin Arditi consacre ces quelques pages à un père qu'il connaît finalement si peu, lui qui a été "écarté" de la famille très jeune, à peine sept ans, pour être envoyé dans un pensionnat en Suisse.
Ce père chéri et craint était un homme d'affaires stambouliote qui savait tout à la fois charmé son monde et le tenir d'une main de fer, est finalement découvert au fil des pages pour apparaître en fin d'ouvrage comme un homme distant qui passa si peu de temps avec son fils préférant lui offrir une éducation stricte plutôt que de la tendresse. Est-ce véritablement la mort prématurée de sa soeur qui fit craindre le pire au père au point d'écarter son fils de la vie d'Istanbul ?

Le changement fut en tout cas brutal pour Metin qui passa d'une ville bouillonnante au montagne de la Suisse, passant ces week-end et vacances au pensionnat et attendant avec impatience les quelques jours passés avec sa mère au mois d'août. Et lorsque l'auteur annonce que le moment le plus heureux de sa vie était celui passé à l'hôpital après un accident grave pour la seule raison que ses deux parents furent présents et attentionnés, c'est dire la distance qui fut mise entre lui et eux... pour son bien.

Fait de souvenirs et d'anecdotes, de questions parfois sans réponses et de tentatives de comprendre un père qu'il faut finalement prendre comme il est, ce livre est une déclaration d'amour d'un fils à son père disparu. A celui qui lui a tant appris sans jamais lui enseigner quoi que ce soit. J'ai été ému par ce garçon cherchant presque désespérément des preuves de l'amour paternel, se retrouvant devant un mur mais l'aimant pour ce qu'il est. Une lecture pleine d'émotions et de révolte.

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