La Fabrique des mots d’Erik Orsenna, Stock
Pour résumer:
« Il y a des histoires qui sont des déclarations de guerre. Voilà pourquoi, moi, Jeanne, je me suis tue. J’ai préféré attendre que le temps passe. J’étais petite, à l’époque, dix ans et quelques mois. Mais l’heure est venue de parler. »
L’ignoble Nécrole a encore frappé. L’objet de sa bataille ? Les mots. Il y en a trop, beaucoup trop. Pour faire taire tous les incurables bavards, tous les poètes, tous les chanteurs, tous les raconteurs d’histoires, tous les amoureux qui disent et redisent leur flamme, tous les humiliés qui protestent, tous les journalistes qui révèlent et, trouve-t-il, polluent de leurs nuisances sonores jusqu’à la nuit, Son Excellence le très distingué Président à vie a édité une liste, pompeusement intitulée « Circulaire VIII.2012.3917 », celle des trente mots désormais autorisés.
Pour Mlle Laurencin et les élèves de CM2 de l’école Simon-Bolivar, c’est décidé, la guerre est déclarée.
Parmi les escales de cette croisade sur terre et sur mer bientôt suivie par l’île tout entière, on apprendra comment le Palais de justice fait les choux gras de deux brasseries aux drôles de spécialités et ce que le Pays de Tendre dit de l’amour, on découvrira qu’une salle de classe et un centre de stratégie militaire ne sont pas si éloignés et qu’une ancienne mine d’or peut renfermer bien plus précieux que le plus précieux des métaux.
Amis ou ennemis de Jeanne, en campagne ou non contre l’ignorance, on croisera le chemin d’une petite foule d’êtres et de créatures, parmi lesquels un élégant, trois jeunes à capuches, des pompiers, un Capitan accablé et très prolixe en anecdotes, un brochet plus vrai que nature, deux vieilles soeurs aussi virulentes qu’érudites, un certain M. Henri et, toujours, la furie de Nécrole…
Plus de dix ans après sa première déclaration d’amour à la grammaire, Erik Orsenna ne pouvait conclure qu’en explorant la fabrique des mots. Qui les crée ? D’où viennent-ils ? Comment combinent-ils leurs origines ? A-t-on le droit d’en inventer de nouveaux ? Si l’anglais domine toutes les autres langues, nos mots à nous seront-ils réduits à l’esclavage ? À toutes ces questions, Jeanne répond, une fois de plus, et raconte ses aventures au sein de cette mystérieuse fabrique.
Ce que j’en pense:
Lorsque Nérole interdit à sa population d’utiliser des mots pour n’en utiliser que douze, Jeanne et sa classe se révolte.
L’intrigue est simple mais efficace. Le lecteur suit Jeanne qui découvre avec sa classe la fabrique de mots. Tout le long du roman, nous sommes plongés dans les racine grecques et latines. On découvre les secrets de fabrication de notre langue. Les préfixes et les suffixes valsent en tout sens.
Tout le long de ma lecture, je suis restée scotchée. Comment un auteur peut- il réussir à captiver son lectorat en parlant de l’étymologie? Et c’est là tout le génie d’Erik Orsenna. Chaque enseignant devrait lire à sa classe ce roman afin de faire émerger chez lui cette conscience de notre langue et de sa formation.
L’intrigue est belle et poétique. Les personnages ne sont qu’un prétexte à parler de la beauté de notre langue.
Le style est travaillé juste ce qu’il faut. Les mots glissent doucement et ont un goût sucré parfaitement savoureux. C’est un petit bijou de la littérature française, un petit bonbon qui m’a donné envie de découvrir Erik Orsenna encore et encore.
Bref:
Un vrai coup de cœur.
Si je devais le noter:
Y a pas que moi qui en parle: