La critique a pulvérisé ce roman. « On s’en fout », écrivent Les Inrocks ; « on n’y comprend rien », renchérit Télérama ; « tout est exagéré », conclut Alice Ferney pour Le Figaro. Les journaux de toutes les sensibilités s’accordent à n’y voir au mieux qu’un charabia poétique.
Il faut dire que le retour tardif à l’écriture de Muriel Barbery, neuf ans après son best-seller L’Élégance du hérisson, rendait la critique particulièrement curieuse. Ajoutons que le choix de rester dans l’ombre, malgré un succès international, a pu vexer une partie de la presse.
Qu’en est-il, en réalité ? La Vie des elfes est un roman fantasy imité de Tolkien et de J. K. Rowling. C’est donc un livre pour la jeunesse, qu’il faut appréhender comme tel. L’intrigue, une guerre entre les elfes et les humains qui métaphorise le désenchantement de l’imaginaire chez les enfants d’aujourd’hui, est sans doute empruntée à L’Histoire sans fin de Michael Ende (1979). « Mais nous espérons en des temps d’alliance et poursuivons l’illusion des poètes anciens », proclame le chef des elfes à la dernière page, annonçant un second tome que l’autrice a promis d’écrire.
Vu comme tel, c’est donc un très bon roman pour enfant. Le genre fantastique est actualisé par des maléfices scientifiques (ainsi les « cavaliers de l’antimatière », p. 236). Chaque page est dépaysante et au bout de quelques pages, l’on a décidément franchi la frontière de la réalité. L’ambiance rustique et la vie naturelle des elfes sont très plaisantes, surtout quand on mène une vie parisienne comme moi.
Ainsi ce livre justifie pleinement l’existence de blogs littéraires, parce que c’est sur internet, et non dans les journaux de référence, qu’on trouve les chroniques les plus fines sur ce roman, et qu’on lui rend le mieux justice. Lisez par exemple l’expérience de lecture d’une Mahaut Hellequin, irremplaçable pour apprécier la spiritualité des romans à contenu philosophique. Lisez aussi ces blogs littéraires habitués à la littérature fantasy pour jeunesse et young adults, qui a fort apprécié le roman, comme Onee, qui lui trouve « un petit côté Harry Potter« , Un livre sur mes lèvres qui voit, je cite, « cantiques et réalité quantique », isalire enthousiaste également. Il y a bien des lectrices et des lecteurs qui attendront le second tome avec impatience. À quand une adaptation au cinéma ?
Muriel Barbery, La Vie des elfes, Gallimard, 2015, 304 p., 19,50€.
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