Ci-dessus, Momo, notre neveu, que l'on garde de temps en temps. Je sais. Vous ne pouviez pas continuer votre lecture sans savoir, j'espère que ça va mieux maintenant !
Donc, après l'horreur d'hier, avec Jessie et Stephen King, il est temps de pratiquer une autopsie avec ce titre de Jean-Louis Fournier (oui, on fait ce qu'on peut avec les intros, c'est dur parfois). Ça faisait longtemps que je n'avais pas lu cet auteur, et là, avec un titre pareil, je ne pouvais pas passer à côté. Il faut savoir que depuis la série McCallum, sur un médecin légiste, j'ai une espèce de fascination pour les dissections et autres autopsies (et j'étais amoureuse de John Hannah). Ne vous inquiétez pas, j'avais 8 ans, hein, mais promis, je n'ai découpé personne depuis (et je n'ai pas l'intention de le faire)(sauf ce mec qui m'a poussé dans le métro tout à l'heure).
C'est pas le pire qui pouvait m'arriver."
Jean-Louis Fournier s'est fait autopsier par la charmante Égoïne pour qu'on sache ce qu'il avait dans la tête, dans le cœur et dans le ventre.
Vous reprendrez une goutte de formol ?
Niveau méta, vous êtes à fond dedans avec ce roman. Jean-Louis Fournier, narrateur, est mort. Comme il a fait don de son corps à la science, il a la chance de servir d'autopsie d'essai à une jeune et jolie étudiante en médecine, Égoïne. Mais Jean-Louis ( permettez que je vous appelle par votre prénom ? J'ai lu l'intérieur de votre corps) n'est pas un mort comme les autres, il est conscient et analyse toute la chose. Heureusement, il ne sent rien, mais il ressent tout, les coupes, les prélèvements d'organes, j'en passe et des meilleurs. N'ayant rien de mieux à faire qu'admirer la plastique de son étudiante et attendre la prochaine étape, Jean-Louis va s'interroger sur sa vie, son passé, sa carrière, ses enfants, son mariage. Après le niveau méta, vous êtes à fond dans l'introspection.
Jean-Louis est fidèle à son ton et à sa plume habituelle, l'humour est au rendez-vous et l'ensemble est d'une facilité déconcertante à lire. MAIS comme vous vous en doutez, se souvenir de sa vie à son crépuscule, post-mortem, implique une certaine notion de confession, de vérité. Le propos, caché sous une grande légèreté, est assez difficile. Par exemple, j'ai bien senti que sa non-relation avec sa fille, devenue nonne, représentait un grand regret pour lui.
À la fois fictionnel (Jean-Louis est encore bien vivant) et autobiographique, Mon autopsie est vraiment très étrange à lire et, se faisant, on ne peut que s'interroger sur sa propre vie, sur ce qu'on a fait et sur ce/ceux qu'on va laisser. Ponctuant chaque coup de scalpel d'Égoïne d'une anecdote (le cœur, l'amour, le cerveau, la carrière, le pénis... Je vous laisse imaginer), Jean-Louis Fournier s'éloigne du morbide inhérent à l'autopsie humaine pour apporter une tout autre signification à l'expression -que je viens juste d'inventer- (ou pas) "disséquer sa vie". C'est passionnant.
L'auteur n'hésite pas à se présenter sous un mauvais jour, notamment avec son égocentrisme exacerbé (moi moi moi) et son besoin compulsif d'attention. Il en vient même à s'inventer une amourette avec son étudiante, laquelle doit juste être contente de patouiller l'un de ses premiers cadavres. Qu'on s'intéresse ou non au bonhomme, Mon autopsie est un beau récit de vie, qui donne envie de découvrir les autres ouvrages de Fournier, largement autobiographique aussi, histoire d'en savoir plus sur tel ou tel sujet qu'il a abordé.
Le titre, quand on ne connait pas spécialement le travail de Jean-Louis Fournier, peut faire peur. Toutefois, j'ai l'impression que découvrir le bonhomme grâce à Mon autopsie est une bonne idée. Il aborde, petit à petit, l'ensemble de ses œuvres, donne un aperçu de ce qu'il est et fait une belle démonstration de son style littéraire si particulier et si jouissif. Jeu de mots, phrases rythmées, belles et/ou assassines, on ne s'ennuie pas une seconde ! C'est drôle, c'est triste, c'est joli, c'est frais et difficile, c'est surprenant et captivant, c'est un excellent Fournier !
Je vous mets une petite citation, pour le fun, mais vraiment, j'aurais quasiment pu surligner l'intégralité de ce roman, tant tout fait mouche.