Par le vent pleuré · Ron Rash

Par le vent pleuré · Ron Rash
Madame Couette qui n’aime pas un roman de Ron Rash? Eh ben, on aura tout vu! J'étais loin de me douter que ça puisse m'arriver un jour. J’ai lu Par le vent pleuré avec curiosité, avidité même. Mais tout du long, une lassitude diffuse m'habitait. Je n’ai surtout pas eu l’impression de retrouver le Ron Rash auquel je suis habituée: celui de Une terre d’ombre et d’IncandescencesAu coeur d'une petite ville paisible au cœur des Appalaches. Eugene, la soixantaine maganée, tombe sur un article de journal. Des ossements viennent d’être retrouvés. Ce sont ceux de Ligeia, une hippie dont il a été amoureux fou à l'adolescence. Eugene croyait la jeune fille évaporée dans la nature, quelque part en Floride. Mais non. Il veut éclaircir le mystère entourant sa mort.   Par le vent pleuré · Ron RashRetour à la fin des années soixante. Eugene et Bill vivent avec leur mère et leur grand-père paternel tyrannique. Les gamins n’ont qu’à bien se tenir, sous peine d’être coupés de vivres, voire reniés. Le week-end, les deux frères font le ménage au cabinet de leur grand-père. Les dimanches après-midi, ils vont pêcher à la rivière. Ce dimanche-là, Ligeia surgit, telle une sirène sortie des eaux.Ligeia arrive tout droit de Floride. Elle a été expédiée chez son oncle et sa tante, parce que ses parents n’arrivaient plus à la garder dans le droit chemin. Au lieu de rentrer sagement dans le moule, Legeia utilise ses charmes pour attirer Bill et Eugene. Pour Eugene, impressionnable et influençable, c’est le coup de foudre. Enjôleuse, Ligeia le manipule à sa guide, en fait son petit chien de poche. Eugene gagne en indépendance et sort du giron de son frère et de la coupe de son grand-père. Sex, Drugs and Rock & Roll... Mais le mood hippie ne s’est pas encore pointé à Sylva. Si Bill voit ce nouveau vent de liberté d'un oeil suspect, Eugene sort du chemin tracé par son grand-père.Près de cinquante ans plus tard, Eugene est un alcoolique fini. L’alcool a été sa maîtresse. Il a tué sa relation avec sa femme – dont on ignore à peu près tout –, usé celle qu'il entretenait avec sa fille et étouffé son talent de romancier. Les révélations sur les circonstances de la mort de Ligeia viennent sortir Eugene de sa torpeur. Du moins pour un temps...

Je ne prendrai pas de pincettes ni de gants blancs: Par le vent pleuré est une cuisante déception. J'ai eu l'impression de me retrouver au coeur d'une bluette fleur bleue. Tous les personnages m’ont exaspérée. Eugene est une épave; Bill, un mouton; Ligeia, une manipulatrice; le grand-père, un tyran exécrable; la mère des garçons, un fantôme soumis. Eugene est un loser de première. J'aime les losers. Beaucoup, même. Mais les losers complaisants qui passe leur temps à se gratter le nombril, j’ai ben de la misère. Des personnages statiques, sans grande aspérité.Je vais donner à César ce qui lui revient. J’ai trouvé l’intrigue mollassonne, mais tout de même habilement menée. L’alternance entre le passé et le présent a maintenu mon intérêt. L’atmosphère brumeuse d’un petit patelin à l’aube des changements culturels qui ont balayé l’Amérique est bien rendue. Mais à part de ça? Pas grand-chose. Je retiendrai à quel point l'alcool peut faire des ravages et détruire des vies. C'est bien mince, mais c'est déjà ça!Clete a été enchanté, Eva a été touchée et Krol a été séduite. Mais... Samantha a été frustrée et Jules l'a abandonné. Du coup, je me sens moins seule! J'aime bien, moi, quand un roman ne fait pas l'unanimité!

Par le vent pleurer

, Ron Rash, trad. Isabelle Reinharez, Seuil, 208 pages, 2017.