La reine des délices, Sarah Addison Allen
Editeur : PocketNombre de pages : 307
Résumé : À la mort de son père, Josey décide qu'elle doit cesser ses caprices de petite fille et fait la promesse de se dévouer corps et âme à sa mère. Vingt ans plus tard, éteinte d'avoir été trop couvée, elle soigne sa solitude dans le placard de sa chambre, ou elle cache des monceaux de sucreries. Et le jour où Della Lee Baker, battue par son compagnon, vient se réfugier dans cette même penderie, la vie de Josey bascule. Titillée par son aînée, elle s'ouvre enfin au monde et rattrape le temps perdu d'une jeunesse bridée. À 27 ans, elle commence enfin à vivre...
- Un petit extrait -
« – Vous êtes une lectrice, alors ?Elle s’arrêta en lui tournant le dos, caressa le dos d’une rangée de livres.– J’ai … une relation particulière avec les livres.– Ils peuvent être possessifs, hein ? Vous marchez dans une librairie, et soudain l’un deux vous saute au visage, comme s’il avait bougé de lui-même, rien que pour attirer votre attention. Parfois, ce qui se trouve à l’intérieur change votre vie, mais parfois il n’y a même pas besoin de le lire. Sa simple présence peut être réconfortante… »
- Mon avis sur le livre -
On m’a parfois demandé ce qui m’attirait dans les challenges littéraires comme la Coupe des 4 maisons. La réponse tient en deux raisons : non seulement ces challenges me motivent à lire même lorsque le moral est au plus bas ou que je ne suis pas en forme, car l’appât des points marche assez bien chez moi, mais en plus ils me permettent de sortir de ma pile à lire des livres qui y auraient trainés bien des mois encore sans eux. C’est par exemple le cas de La reine des délices, gagné lors d’un concours, dont le résumé m’attirait mais dont le format poche me rebutait (mes yeux capricieux n’aiment pas spécialement les livres de poche), qui attendait déjà depuis bien longtemps sur son étagère et qui aurait pu attendre encore bien longtemps sans l’apparition de l’item éphémère « lire un livre à la couverture sucrée » … Au final, je suis bien ravie de lui avoir laissé sa chance !
A Bald Slope, lorsqu’il est question de Josey Cirrini, c’est toujours pour évoquer ses caprices enfantins, ses nombreuses bêtises et son indiscipline légendaire. Pourtant, maintenant âgée de 27 ans, Josey n’a plus rien de cette enfant insupportable qui s’acharnait sur la vaisselle en porcelaine de sa pauvre mère : désormais dévouée toute entière à la femme qui lui a donné la vie, Josey s’enferme dans ce quotidien solitaire de dame de compagnie. Comme remède à cette vie monotone, Josey s’est aménagé dans son armoire un véritable garde-manger garni de sucreries et autres douceurs. Mais son existence connait un chamboulement incroyable le jour où, venant chercher de quoi grignoter, Josey découvre dans sa penderie Della Lee Baker, serveuse délurée qui fuit les coups de son compagnon. Bien obligée d’accepter cette cohabitation si elle ne veut pas voir son secret dévoilé au grand jour, Josey va progressivement se laisser influencer par Della Lee … et commencer à vivre pour elle-même et non plus seulement pour cette mère qui ne sait qu’énoncer des reproches et jamais le moindre remerciement pour son dévouement.
Ce roman porte très bien son titre : j’ai littéralement dévoré ce véritable délice littéraire en une petite journée à peine tellement j’étais plongée dedans. Il s’agit d’un livre vraiment très particulier : s’il semble au premier abord très prévisible et affreusement banal, la vérité est toute autre ! A travers cette histoire, nous suivons les destins entremêlés de trois femmes bien différentes les unes les autres, que rien ne prédestinait à se rencontrer. Josey, mal à l’aise dans les relations sociales, Della Lee, excentrique à souhait et Chloé, effrayée à l’idée que quelqu’un découvre un jour son secret, forment un trio de personnages attachants à souhait. Elles n’ont rien d’extraordinaires, elles ne ressemblent pas à des héroïnes de roman, et c’est justement pour cela qu’on les aime : elles sont tellement proches de nous, tellement humaines, tellement fragiles … Mais surtout, elles ont en elles ce petit quelque chose qui change tout : elles respirent la bonté, la gentillesse et la bienveillance. J’ai beaucoup apprécié les personnages secondaires également : Adam me fait tout simplement craquer, j’ai envie d’aller consoler le pauvre Jake empêtré dans les conséquences de son honnêteté, et j’ai été attendrie par la si étrange Helena, si attentionnée à sa manière (un peu déroutante) que cela compense bien sa bizarrerie parfois légèrement inquiétante …
Outre les personnages, qui ont su trouver leur place dans mon petit cœur de guimauve, j’ai énormément apprécié l’histoire de ce roman : il est questions de secrets familiaux bien enfouis, de couples malmenés par la faute avouée (mais toujours pas pardonnée, même à moitié) d’un des deux partenaires, de violence conjugale … Ces éléments de l’intrigue ont un arrière-gout de bonbons piquants, que l’on aime déguster en dépit de cette amertume : ils offrent à ce roman, assez court, une bonne dose de tension dramatique sans qui l’intrigue ne pourrait captiver le lecteur. Mais à côté de cela, il y a également l’histoire d’amour entre Josey et Adam, le facteur. Une romance toute douce, faite de bonhommes de neige et d’écharpes bien chaudes, qui réconforte aussi efficacement qu’une bonne tasse de chocolat chaud accompagnée de biscuits bien tendres et sucrés. Sans oublier, bien sûr, cette petite dose de magie insoupçonnée qui rappelle Noël, les senteurs de cannelle et de clémentine. Des petites touches magiques si discrètes que l’on se demande si elles sont vraiment là …
En bref, La reine des délices est un roman dont je sors apaisée et rassérénée : l’auteur signe ici une histoire pleine de douceur et de tendresse, une histoire qui se lit très facilement sans pour autant être creuse ou incohérente, une histoire qui berce le lecteur sans jamais l’endormir. Des petites touches de fantaisie font vivre cette intrigue toute simple : des livres qui apparaissent mystérieusement pour aider leur propriétaire à aller mieux, des promesses faites qui ne peuvent être brisées … tout juste ce qu’il fallait pour faire sortir ce roman du lot ! La plume de l’auteur est très fluide, toute en simplicité, brisée de temps en temps par une jolie métaphore sucrée qui donne envie d’aller se faire infuser une petite tisane au miel. Si je n’avais qu’un conseil à vous donner, ce ne serait pas de lire ce roman (je pense que vous l’aurez déjà compris), mais celui de le lire en plein hiver, emmitouflé dans une couverture bien douce en regardant les flocons de neige tomber par la fenêtre … Vous verrez, vous serez bien.
Ce livre a été lu dans le cadre de la Coupe des 4 maisons(plus d’explications sur cet article)