Nani a huit ans et vit sur une île, qu’on imagine dans le Pacifique. Entourée de ses parents Janek et Youmi, de son grand-mère Enoha et de sa grand-mère Moo, la vie de Nani est douce.
Mais la pluie s’abat, qui ne s’arrête pas. L’île pourrait même être submergée.
Après avoir longtemps hésité, les parents de Nani décident de partir. Enoha, son grand-père, infirme, ne veut pas abandonner la terre de ses ancêtres. C’est donc entourée de ses seuls parents que Nani part en hâte, courant vers le bateau qui leur permettra de rejoindre une autre terre.
Au port, la famille prend sous son aile Semeio, un jeune garçon dont le grand-père vient de mourir et qu’il doit laisser là, à la merci des flots, sous les racines d’un grand arbre.
Et c’est à quatre qu’ils finissent par embarquer, en direction de l’inconnu.
C’est le parcours de l’exilé que Kochka nous décrit là, tout en finesse et en douceur, le vide matériel ressenti, l’absence des proches, l’absence de la terre maternelle, la fuite des sensations, des souvenirs. Et la peur de l’inconnu, de l’avenir qu’il faut entièrement reconstruire.
Tout au long de son parcours, Nani découvre les lettres que son ipa Enoha lui a données à son départ. Des petits bouts d’île, des souvenirs, des mots de réconfort… On reçoit de plein fouet tout l’amour d’un grand-père, qui l’accompagne dans son parcours d’exilée, dans les épreuves qu’elle traverse. Puis la voix du grand-père de Semeio s’y mêle, deux aïeux dont les âmes se font présentes pour leurs petits-enfants.
En parallèle, le récit de l’errance de Nani apparaît plus distancié. Les sentiments de la petite fille sont moins présents, ce qui à mon goût manque un peu pour que les jeunes lecteurs puissent s’identifier. C’est peut-être volontaire, car qui peut réellement se mettre dans la peau d’un exilé, imaginer ce qu’il perçoit, ce qu’il endure et comment cette expérience marque un être à tout jamais ? C’est aussi la réalité de leur exil, sa dureté, que cette distance exprime.
Enfin, c’est avec une lettre de Nani et Semeio, les deux frères d’exil qui se sont trouvés dans cette nouvelle destinée, que se conclut cette belle histoire. Eux aussi vont se trouver un avenir sur une nouvelle terre, vont donner une suite à leur aventure, vont se poser, s’enraciner à leur tour, faisant le lien avec leur île, rassurant par là-même leurs « ipa ».
Un très joli livre, tout en pudeur, sur l’exil des enfants.
Kochka est franco-libanaise. Avocate, elle devient auteure pour la jeunesse. Kochka signifie « chat » en libanais.
Tom Haugonat est un illustrateur français né en 1985.
Frères d’exil est paru chez Flammarion jeunesse en septembre 2016 (12€).
Un livre lu dans le cadre de la sélection CM2-6ème du Prix des Incorruptibles 2017-2018.
Lecture partagée sur le blog Devine qui vient bloguer avec la rubrique « Chut, les enfants lisent » et sur Un Petit Bout de Bib(liothèque).
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