Le camp des autres, Gaspard l’a rejoint. Après avoir quitté la maison familiale où son père le battait comme plâtre, le gamin s’est retrouvé seul dans la forêt avec son chien. Il a affronté le froid, la faim, la peur, les loups. Recueilli par Jean-le-Blanc, un ermite vivant au cœur des bois, il s’est remis sur pied avant de partir sur les routes avec la Caravane à Pépère, une bande d’exclus épris de liberté qui sillonna la France au tout début du 20ème siècle. Des sans-abris, des sans-famille, des sans patrie. Des revenus du bagne, des voleurs à la tire, des gitans. La lie d’une société bourgeoise que Clémenceau écrasa avec ses brigades du tigre en 1907. Parmi ces « récalcitrants », « Gaspard va découvrir la vie en marchant sur le monde ».
Un roman plein de souffle qui ne pouvait que me plaire. Les chapitres courts, comme autant de longs paragraphes, donnent la mesure. La partie en forêt est riche de descriptions proches du naturalisme et m’a rappelé les superbes envolées de Louis Pergaud dans son recueil « De Goupil à Margot ». La seconde, sur les routes, est une ode au peuple nomade et à son mode de vie sans frontière ni barrière. Les deux se complètent et forment un tout cohérent, porté par une langue magnifique.
C’est un texte à lire à voix haute pour profiter du balancement des phrases, de leur rythme, de l’équilibre entre le son et le sens. Un texte habité, engagé, une poésie sèche sans emphase inutile. Tout ce que j'aime et que je retrouve trop peu souvent dans la littérature française actuelle.
Le camp des autres de Thomas Vinau. Alma, 2017. 195 pages. 17,00 euros.
Une lecture commune partagée avec l'incontournable Stephie.