Cette semaine, nous sommes fiers de laisser la parole à la dernière recrue des LesComics.fr, Comics Grincheux. Lui son domaine c'est l'écrit, il chronique pour le site de Matt les dernières sorties mais propose également des analyses poussées d'auteurs qui nous plaisent bien ici. On lui laisse la parole afin qu'il se présente par l'intermédiaire de 5 comics qui l'ont marqué.
Watchmen
Alors, je vous rassure, je n'ai pas commencé mon aventure dans le monde des comics par là ! Pourtant, c'est ce récit qui marque le moment où je suis passé du lecteur fan de super-héros à celui de lecteur de comics. Je l'ai commencé en VO quand j'avais 16 ans et j'ai dû abandonner la lecture faute de compréhension globale de l'histoire. Mais quand Panini a ressorti le comics pour la sortie du film, je me suis jeté dessus et je l'ai dévoré !
Pouah, quelle claque dans la face ! C'est la première grosse baffe que j'ai pris parce que j'ai compris comment il était possible de raconter une histoire sur plusieurs niveaux. Le genre de trucs que le prof de français en Première tente de te faire comprendre mais auquel je ne panais rien du tout ! Là, j'ai compris comment les cases racontaient l'histoire, comment elles pouvaient supplanter le cinéma dans leur façon de mettre en scène les choses. J'ai découvert un récit où tout a une importance et une signification.
Immédiatement, j'ai développé une fascination pour Alan Moore et Watchmen est devenu une bible pour moi. Elle est la conjonction de tout ce que j'aime dans un comics, l'alliance parfaite entre le propos et le dessin. C'est le premier moment où je me rends compte qu'il est possible de parler des super-héros en les mettant à nu, qu'il est possible d'emboîter les narrations pour raconter une seule et même histoire qui accumule les sens, qu'il est possible de jouer sur les symboles connus dans la pop-culture. Bref, ça a été une révélation pour moi et chaque lecture est une perpétuelle redécouverte et un éternel approfondissement.
Je crois que c'est le comics qui guide finalement le plus mes goûts actuels et me pousse à être relou. Forcément, il se devait d'être en premier.
Hawkeye
Hawkeye est une lecture finalement assez récente et pourtant, elle m'a fait découvrir Matt Fraction et David Aja. A travers eux, j'ai compris ce que j'aimais le plus dans le comics : l'alchimie entre les artistes. Comment le dessin est capable de nourrir le scénario jusqu'à pouvoir se substituer (presque) totalement à lui. Le duo est, comme tous ceux que Matt Fraction forme d'une complémentarité totale.
Pourtant, Hawkeye n'a rien des standards que j'aime dans son scénario. C'est une histoire simple, d'un type ordinaire qui essaye d'aider les gens mais qui accumule les bourdes et s'engueule tout le temps avec tout le monde. En plus, Hawkeye est un personnage qui m'ennuie profondément. Pourtant, le texte possède une belle profondeur sur la notion de communauté à travers le microcosme social que forme cet immeuble. Ce sont aussi des choses que j'aime dans le comics, comment l'auteur parvient à faire passer des messages mais en les dissimulant pour rendre la lecture aisée.
Surtout, le récit est d'une qualité de tous les instants, riche en personnages forts, pas avare en humour et en scènes d'action. Elle jouit de dialogues ciselées à l'extrême qui offre de sacrés
moments.
Finalement, ça m'a permis de découvrir Matt Fraction qui est un auteur foisonnant, qui
cherchant toujours l'efficacité dans la simplicité, contrairement à cette tendance qui me gonfle
à trop dialoguer ainsi qu'à sur-expliquer les évènements. Mais c'est aussi par lui que je me
suis intéressé massivement au creator-owned.
Saga
Pas vraiment d'originalité. Je pense que beaucoup de monde lit Saga et l'apprécie. C'est par là que j'ai découvert Brian K. Vaughan et la richesse thématique qu'il pouvait déployer au sein
de ses œuvres.
C'est une série qui sait me parler pour plusieurs raisons. Déjà, c'est une grande fresque de science-fiction et c'est quelque chose que j'ai du mal à retrouver dans le comics. Oui, Marvel et DC ont des univers galactiques mais je ne trouve jamais ça transcendant (au-delà des concepts imaginés par Jack Kirby). Saga a un univers qui me parle à 200%, c'est coloré, c'est riche, il y a une imagination de tous les instants dans la direction artistique.
C'est aussi une série qui parle de thèmes que j'affectionne : la transmission, l'héritage, la paix, les familles non-conventionnelles, la tolérance. Tout ça dans un enrobage qui n'oublie jamais que le moteur d'une excellente histoire, ce sont les personnages. C'est une série qui me permet souvent d'évoluer et d'essayer d'être meilleur envers les gens qui m'entourent.
Alors, oui, ça prend son temps, ça ne raconte pas grand-chose à chaque numéro et pourtant, en creux, c'est toujours l'histoire de personnages qui ne comprennent pas le monde dans lequel ils vivent et qui sont obligés de fuir pour vivre. Saga, c'est la vie.
Grant Morrison présente Batman
Oui, je mets un run entier. Plusieurs raisons à cela. La plus évidente, c'est que je n'arrive pas à détacher un morceau de l'histoire. Tout est lié dans chacun des arcs et ils ne cessent de se répondre. Je ne peux alors pas dégager un arc en particulier. Par contre, je n'aime pas Le retour de Bruce Wayne !
Ensuite, j'adore ce que Grant Morrison raconte sur le personnage tout au long de son run. Je crois qu'il est le premier auteur avec lequel je m'entends aussi parfaitement sur le personnage. Batman, pour moi, ce n'est pas qu'un justicier. C'est surtout un symbole. Le symbole du mec qui lutte pour ne pas que d'autres enfants se retrouve dans sa situation. Le symbole de celui qui a réussi à s'élever au-dessus du commun des mortels et à toucher du doigt les Dieux jusqu'à en devenir un lui-même. Batman, c'est aussi celui qui est nécessaire pour nous protéger, c'est celui qui a toujours un plan, même quand il semble le plus démuni. Batman, c'est celui qui n'est jamais seul. Bref, il y a énormément d'éléments que j'aime dans la vision de l'auteur et où je me retrouve totalement.
Alors, oui, il y a des passages franchement chiants où Grant Morrison semble plus préoccuper à se donner du plaisir qu'à transmettre ce plaisir ( Le retour de Bruce Wayne, c'est toi que je vise), c'est rempli de dialogues et de moments abscons. Mais, c'est brillant ! Parce que ça parvient à rendre crédible et cohérent des choses qui ne devraient pas l'être (Zur-En- Arrh). Mais aussi parce que Grant Morrison a livré au monde un personnage sublime qui est Damian Wayne et qu'il a su redonner une force et un corps à Batman.
Aujourd'hui, c'est ce run qui m'a permis de comprendre pourquoi j'aime tant ce personnage.
Captain America et Spider-Man
Sous ce titre un peu bizarre se cache la première fois où j'ai ouvert un comics. Mon père bossait dans une entreprise qui mettait à disposition de ses employés une bibliothèque et parfois, elle vendait des vieux trucs. Un soir, il m'a ramené un comics intitulé Captain America et Spider-Man compilant un épisode de Spider-Man en team-up avec Cap' (le numéro 52 de Marvel Team-Up) et des épisodes de Captain America (178 et 179).
J'aimais beaucoup Spider-Man à cause du dessin-animé qui passait sur TF1 mais je n'avais jamais eu l'occasion de lire un comics. Je découvrais Captain America par la même occasion. J'avais beaucoup aimé quand je l'avais découvert et je l'ai souvent relu jusqu'à l'oublier avant de refaire ce portrait. L'histoire en team-up est encore super fun et la relire est toujours assez particulier pour moi. Les deux histoires de Captain America se déroulent à un moment crucial de sa carrière puisque c'est juste avant qu'il ne décide de devenir Nomad. On a alors un résumé de ses origines ainsi que de sa carrière et de sa vie. Mine de rien, étant jeune, je ne connaissais rien à ce personnage et j'avais là un parfait résumé de sa vie éditoriale.
Donc voilà, je suis un fan de DC Comics mais ma première lecture fût du Marvel et le resta pendant plusieurs années. Je suis né en 1990 et je n'ai pas connu Strange et toutes ses revues iconiques dont mon père me parlait. Au moment où j'ai voulu me mettre sérieusement au comics, les publications étaient dispersées et j'ai ingurgité des tonnes de base de données avant de commencer à y comprendre quelque chose.