Il ne s’agit pas d’un roman mais d’un récit autobiographique avec cette particularité qu’il s’appuie sur les lieux ou les territoires chers à l’écrivain ; nous suivons donc son parcours, d’enfant à homme jeune, sur des cartes géographiques. Du Faou dans le Finistère, à Morlaix et Rennes, ce qui nous vaut de belles pages amoureuses de sa Bretagne, mais nous le suivrons aussi en Irlande ou sur les bords de la Loire et même à Rome avant d’en terminer avec Paris.
Après nous avoir maintes fois avertis ou fait comprendre que « les lieux m’avaient en général toujours plus attiré que les gens », le lecteur constatera qu’en réalité le récit et la vie de Philippe Le Guillou, se nourrissent beaucoup de ses rencontres avec d’illustres personnages, le plus souvent des écrivains mais aussi de moins célèbres comme les deux sœurs libraires, ou dans un autre ordre d’idée, d’hommes d’Eglise ou d’un organiste (Jean Guillou). Ces nourritures le conduiront à la littérature comme membre actif, « la littérature était une famille, une fraternité. »
Si les descriptions et émotions liées aux lieux sont belles et nombreuses, la littérature tient ici une place pour ainsi dire prépondérante. Impossible de citer tous les auteurs mais Montherlant, Julien Gracq, Michel Déon, Patrick Grainville et Dominique Fernandez qu’il rencontrera et avec lesquels il aura de longues conversations ou correspondances, comptent parmi ses mentors.
J’ai peiné à entrer dans le livre car il m’a semblé trop intellectuel, un peu difficile d’accès mais subjugué par l’écriture je me suis accroché et quand j’ai compris à quelle genre de littérature j’avais affaire, je me suis régalé. La langue est belle même si au début je l’ai trouvée trop appuyée ou ostentatoire - d’où ma prévention initiale - ou si parfois on faille tomber dans la pâmoison avortée, le vocabulaire riche et pointu (« l’hiver des terres gastes et la promesse de la reverdie »), les images et les sensations placent le lecteur dans un état de douce béatitude intellectuelle (Heu ?) d’autant que le religieux est aussi de la partie. Le texte s’achève en beauté sur un éloge du piéton de Paris qui m’est allé droit au cœur…