Il y a beaucoup de tristesse et de solitude dans les nouvelles de Callan Wink. Beaucoup de retenue aussi chez ses personnages taiseux jamais prompts à se livrer. J’ai adoré les suivre au fil de quelques pages et les laisser au bord du chemin pétris d’incertitudes, incapables d’assumer ni de prendre une décision. L’écriture est simple et directe, les ellipses nombreuses. Pas d’esbroufe dans les grands espaces du Montana où la plupart de ces histoires se déroulent, même si la virilité de façade cache une fragilité à fleur de peau.
Un très beau recueil empreint d’une douce mélancolie, où la nature, bien que présente, ne tient à aucun moment le premier rôle. La dernière nouvelle est de loin ma préférée, avec l'inoubliable veuve Lauren entourée de son improbable ménagerie : "Tout en travaillant, elle songea aux gens qu'elle avait connus qui étaient morts ou avaient fichu le camp, et elle essaya de les mettre sur le plateau d'une balance en regard de ceux qui étaient encore en vie et faisaient partie de son existence. Jamais la recherche d'un équilibre n'avait paru plus vaine". Seule au monde Lauren, affrontant sans se plaindre la rudesse d'une existence qui jamais ne fait le moindre cadeau. Comme tous les personnages de Callan Wink en somme, un écrivain dont l'univers ne pouvait à l'évidence que m'aller comme un gant.
Courir au clair de lune avec un chien volé de Callan Wink. Albin Michel, 2017. 292 pages. 22,00 euros.