Nous avons pu le constater en en discutant avec d'autres lecteurs, il s'avère que la série Descender, de Jeff Lemire, ne fait pas l'unanimité. Et pourtant nous sommes vraiment des inconditionnels de ce titre, publié chez Urban Comics. Comme très souvent dans ses belles oeuvres, le scénariste utilise le prétexte d'un ample récit de science-fiction, pour s'attacher au parcours intimiste de quelques personnages, pris dans les engrenages d'une situation politique qui les dépasse largement. Il y est question d'empire spatial, il est question aussi d'une révolte cosmique des robots, mais en réalité, ce qui compte, c'est l'humanité des personnages . Humanité à entendre dans sa plus grande variété, car nous avons affaire à des petits androïdes, à des extraterrestres, des créature robotiques géantes en apparence assez frustres, et bien entendu à des êtres humains. Tous se retrouvent placés sur l'échiquier et l'histoire continue.
Ce quatrième tome par exemple, s'ouvre avec trois lignes narratives qui finissent par se recouper. Le duel entre Tim 21 et la version 22, que l'on pourrait qualifier de maléfique, l'évasion de Tesla accompagnée par le professeur Qwon, et les retrouvailles sensuelles entre Andy Tavers et son amour de jeunesse, transformée en une jeune femme en partie mécanique. Une fois encore le lecteur va être emporté dans une aventure qui possède en germes la grandeur de Star Wars, mais se contente (et nous en sommes bienheureux) d'exploiter le filon intimiste, qui a fait le succès de Sweet Tooth par exemple, pour rester chez Lemire.
On trouve encore de tout dans ce tome 4. Des rebondissements avec une évasion, un échange de personnalités, des plans de guerre qui s'echafaudent, et de nouvelles petites révélations sur l'importance du robot Tim 21, dont le codex implanté est la clé de tout ce qui a précédé et pourra suivre. Encore une fois ce sont les moments liés à la famille, les ombres du passé (comme lorsque Andy apprend la vérité sur la responsabilité de la tragédie qui a coûté la vie de sa mère) qui viennent faire basculer l'histoire, confirmant l'idée que l'intime est le moteur de l'universel, et que c'est en allant voir de près les plaies de l'esprit (et du coeur) que la souffrance cosmique et la terreur trouvent une explication rationnelle.
Descender a une carte artistique notable à jouer, celle des dessins à l'aquarelle de Dustin NGuyen. Là encore, on est loin d'un avis unanime, et j'ai entendu nombre de personnes se plaindre de ces pages, les jugeant hâtives, brouillonnes. Nous pensons l'exact contraire. Le travail du dessinateur est superbe. Délicat, aérien, avec une texture en apparence sommaire, mais attentive à chaque nuance, même quand les fonds de cases restent souvent blancs. De plus l'illusion d'une impression sur papier gaufré donne à Descender un charme qu'on perçoit peu ces temps derniers sur une série du genre, avec une unité graphique et une capacité de transmettre des émotions en quelques coups chirurgicaux de pinceaux, qui sont assez uniques et bouleversants par endroits (la scène érotique qui ouvre l'album est un coup de maître). Bref, on est peut-être des grands sensibles, mais on est conquis.
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A lire aussi :
Descender, Tome 3
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