Chronique ciné : Cézanne et moi

Joyeux Noël en retard ! Mon dernier film : Cézanne et moi, avec Guillaume Canet et Guillaume Gallienne.

Chronique ciné : Cézanne et moi

J’avais repéré ce film il y a un moment, pour l’aspect artistique et l’histoire d’amitié. Je ne l’ai pas autant adoré que je le pensais, mais j’ai tout de même passé un bon moment.

L’intrigue repose sur la relation entre les amis d’enfance Émile Zola (Guillaume Canet) et Paul Cézanne (Guillaume Gallienne). Après la proximité fusionnelle de leur jeunesse, leurs personnalités et leurs parcours les éloignent : Zola, sérieux, engagé, s’arrache de son milieu pauvre pour remporter le succès tandis que le tumultueux Cézanne, pourtant beaucoup plus gâté par l’existence au départ, tient le rôle de l’artiste écorché et capricieux, incompris et un peu maudit. L’un est aussi passionné et inconstant que l’autre semble posé et rigoureux ; une vraie tendresse demeure cependant entre eux… Jusqu’à L’Œuvre, ce roman de Zola sur un artiste raté où Cézanne croit se reconnaître, comme un coup de couteau en plein cœur.

Je ne saurais pas dire précisément ce qui m’a manqué dans ce film, sans doute une myriade de petites choses. Le personnage de Cézanne est très retentissant, explosif, provocateur, mais n’exprime le plus souvent sa vulnérabilité qu’en bravades. Zola, lui, est très en retrait, dans le silence et le sous-entendu — mis à part une scène beaucoup plus viscérale, brillante, où il avoue à son ami tout ce qu’il a mis de lui-même et de son douloureux rapport à la création dans L’Œuvre.

Il y a, autour de ces deux hommes, des femmes qui mériteraient elles aussi d’être creusées. D’abord Alexandrine, ancienne maîtresse de Cézanne devenue épouse de Zola — un couple entre proximité et éloignement, qu’on a du mal à saisir et qui reste en arrière-plan par rapport aux deux hommes (l’hostilité entre Cézanne et Alexandrine prend la majeure partie de l’espace). Jeanne aussi, jeune femme de chambre pour qui Zola nourrit une attirance coupable et une véritable fascination — le personnage en lui-même n’est pas creusé, mais la manière dont elle est filmée est très esthétique et troublante, tout en délicatesse. Et puis Hortense, éternelle maîtresse de Cézanne et mère de son fils, mais qu’il se refuse toujours à épouser. Là aussi, c’est une scène en particulier qui me marque, une crise de rage où la femme au désespoir se révolte contre son rôle de modèle, réclame d’être aimée et non pas peinte. En vain, car Cézanne reste avant tout obsédé par ses tableaux et continue de la négliger.

Pour résumer, j’en voulais encore plus — plus d’exploration des émotions et des non-dits, peut-être aussi plus sur le rapport à l’art… Je sais, je suis sans doute trop gourmande. Il y a tout de même de beaux moments d’émotion, et une très bonne performance des acteurs. Des deux rôles principaux, Guillaume Canet m’a un peu plus touchée, mais cela tient en premier lieu à l’écriture du personnage. J’ai aimé sa sobriété, sa réserve, mais l’impression d’un tourment secret qui bouillonnait sous la surface.

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