Publié au Livre de Poche,
Ils ont 20, 40, 70 ans, ils sont retraités, SDF, salariés plus ou moins précaires, les uns plutôt marginaux, les autres tant bien que mal intégrés dans l'ordre économique et social tel qu'il fonctionne - et dysfonctionne, surtout, malmène et brutalise les individus... Ils sont une quinzaine, dont pour la plupart on avait fait connaissance dans le premier volume. Les revoici, assemblée hétérogène d'individus dispersés à tous les horizons de la sphère sociale mais physiquement réunis, comme agglomérés autour de Vernon Subutex... J'avais adoré le premier tome de Vernon Subutex, lu au mois d'octobre dernier. J'avais sous le coude, le deuxième tome que je tardais à lire pour le plaisir de patienter. Celui-ci est bon, voire meilleur que le premier opus. Virginie Despentes nous balade d'un bout à l'autre. J'avais donc laissé mon vieux Vernon en bien mauvaise posture dans le tome 1. SDF, chassé de tous ses squats, sans amis, il n'allait pas quand même crever tout seul sur son banc parisien. On le retrouve donc en compagnie d'autres marginaux comme lui, des exclus, des poivrots, des fous, des dingos, des paumés. Vernon semble s'être habitué à sa nouvelle vie. Il s'est fait de nouveaux compagnons de galère et il est à mille lieux de se douter qu'on le cherche un peu partout. Pendant ce temps-là, en effet, on recherche assidûment Vernon. Pas pour l'héberger ou le câliner, non. Ce sont toujours ses enregistrements d'Alex Bleach qui défoulent les passions. Mais l'auteur a l'intelligence de nous emmener là où ne nous serions jamais allés. J'admire profondément la façon qu'à Virginie Despentes de faire avancer son intrigue sans en avoir l'air. Chaque " mini chapitre " (il n'y a pas vraiment de découpage en tant que tel), nous laisse plonger au cœur des pensées d'un des personnages. Et il y en a une sacrée galerie (à tel point qu'elle en a fait un sommaire en début d'œuvre). On suit donc Pamela Kant (j'adore!) la porno-star; Charles, le poivrot; Emilie; la Hyène; Laurent et j'en passe, dans leur vie quotidienne. Sous couvert de décrire ses personnages, l'intrigue avance. C'est vraiment brillant! L'auteur décrit toujours avec verve et cynisme la société dans laquelle nous vivons. C'est piquant à souhait, parfois blessant, souvent offensant mais tellement vrai. Impossible de s'ennuyer avec cette écriture acide qui dit beaucoup de nous-mêmes. Alors certes, on s'éloigne un peu du personnage de Vernon mais j'ai tellement aimé en savoir plus sur les autres. Virginie Despentes me donne l'effet d'être dans une position de voyeuse. J'aime scruter ses personnages, les disséquer, les connaître au plus profond d'eux. Je sais que ce n'est pas toujours bien mais j'aime tellement cela!Avec ce deuxième tome, Virginie Despentes apporte beaucoup de réponses à son lecteur. Elle transforme l'essai avec une intrigue toujours aussi prenante et une langue truculente. Une vraie réussite!