Vide grenier…
Chéri (ouvrant la porte du grenier): As-tu trouvé des choses intéressantes pour le vide grenier ?
Moi (tournant les pages d’un grand livre relié): Oui, je suis tombée sur des vieux journaux illustrés de la fin du XIXème qu’une vieille librairie nous avait offert pour les gravures en couleurs. Là, je regarde l’exemplaire du « Journal des voyages » de 1885. Tu peux constater que j’ai un peu de mal à desserrer les dents
Chéri (s’asseyant à mes côtés): Je te comprends. Vu l’époque, on ne peut pas être étonné de la condescendance, voir limite, le mépris de certains récits pour les pays cités.
Moi (fermant le livre): Mouais… De justesse que d’autres récits contrebalancent ce sentiment… Bon, direct dans le carton vide gre… Mais que fait Doudou dedans !
Chéri (se levant d’un coup, apparemment pressé): Euh… Je crois que le téléphone vient de sonner en bas…. J’y vais !
Moi (courant derrière lui): Pourquoi as-tu mis Doudou dans le carton !
AUTEUR: M.J. Carter
TITRE: Maharajah
ÉDITEUR, ANNÉE: Cherche-Midi, 2017
NOMBRE DE PAGES: 416 pages
Après une petite discussion avec Chéri, j’avais besoin d’un moment de détente et je me suis dirigée vers ma bibliothèque. Mon regard s’est posé sur un roman qui se déroule à peu près dans la même période que les journaux retrouvés…
En route pour l’Inde de la seconde moitié du XIXème siècle dans : « Maharajah » , de M.J. Carter.
Résumé:
Calcutta, 1837. Le pays est sous la régence de la Compagnie britannique des Indes orientales. Figure haute en couleur chez les expatriés anglais, l’écrivain Xavier Mountstuart vient de disparaître dans les profondeurs de la jungle, alors qu’il faisait des recherches sur une secte d’assassins, les thugs. L’armée de la Compagnie envoie à sa recherche Jeremiah Blake, un agent spécial, grand spécialiste des mœurs du pays, accompagné d’un jeune officier, William Avery. C’est le début d’une aventure passionnante au pays des temples et des maharajahs. En approchant de la région où Mountstuart a disparu, celle des thugs, adorateurs de Kali, déesse de la mort et de la destruction, Blake et Avery vont bientôt découvrir une incroyable conspiration.
Quelles désillusions… Bercés par les romans de Xavier Mountsuart, William Avery s’est engagé dans l’Armée de la Compagnie afin de vivre, à son tour, de grandes aventures en Inde. Pourtant, la réalité est très éloignée de ses rêves. Endetté et avec peu de chances de monter grades, le jeune homme commence à avoir le mal du pays et désire rentrer en Angleterre. Mais voilà, le destin semble être farceur avec lui, car il va devoir retrouver la trace de son auteur préféré, qui a disparu, avec l’aide de Jeremiah Blake, un agent spécial assez taciturne.
La narration se passe par William Avery qui a tout du… Colon blasé qui regarde de haut une civilisation bien différente de sa chère Angleterre et qui ne lui offre pas les merveilleuses aventures que lui promettaient ses nombreuses lectures. Je vous avoue que sur le coup, j’ai un peu grogné… mais avec un léger sourire, car je pensais bien deviner pourquoi l’auteur nous dresse un tel portrait dès les premières pages.
Suite à un ordre donné par la Compagnie qui a imposé la présence anglaise en Inde, il va aller à la rencontre de Jeremiah Blake qui est son total opposé.
Certes, Blake n’est pas vraiment un joyeux luron et ne donne pas beaucoup d’occasions de vraiment découvrir l’homme qui se cache derrière son attitude assez froide. Mais ce n’est pas pour autant qu’il n’essaie pas d’ouvrir les yeux d’Avery sur la vie de la population indienne sous le joug de la Compagnie qui n’est pas aussi parfaite qui semblait être. D’ailleurs, le jeune homme le verra de lui-même tout le long du voyage qui a tendance à nous faire penser à un parcours initiatique.
Ils feront la rencontre de plusieurs personnages qui enrichiront l’intrigue:
– On retiendra en premier les Thugs, une confrérie d’assassins et adorateurs de la déesse Kali. Ils furent, d’ailleurs, très popularisé dans le monde par divers romans publiés à la même période où se déroule cette histoire
– Puis, il y’a ceux qui apportent différents regards, en plus de ceux d’Avery et Blake sur l’Inde: source de richesse pour certains, d’autres d’un air « paternaliste » pensent offrir une meilleure qualité de vie et de savoir à une société indienne bien trop archaïque pour eux, des souverains indiens qui essayent de maintenir leurs trônes pour conserver leurs territoires face à la domination anglaise etc….
On sent qu’on est sur une poudrière prête à exploser et l’avenir ne va faire que confirmer ce ressenti.
D’accord pour le contexte, mais l’intrigue ? Tout d’abord, il a tout du roman d’aventures:
– traverser la jungle pleine de dangers, en quête d’une personne disparue et se battre contre des bandits prêts à vous écorcher vifs…
Dit comme cela, je ne peux m’empêcher de voir les éléments des histoires que lisaient Avery et une des raisons qui l’ont poussé vers l’Inde. Pourtant, tout en reprenant les codes du genre, l’auteur nuance le côté le romanesque en y incluant des personnages historiques avec leurs véritables contributions au sein de la Compagnie, mais aussi un regard lucide de la situation à travers le personnage de Blake. Peut-être que j’extrapole, mais il est possible d’y voir une certaine ironie de la part de l’auteur, sur ses récits qui pullulaient dans les journaux lors de la période coloniale.
Le seul point gênant durant ma lecture fut la présence de quelques longueurs lors du trajet et a levé les yeux face aux lamentations d’Avery. Mais lorsqu’une scène d’action arrive, je peux vous dire qu’elles sont efficaces et bien dynamiques.
Conclusion:
« Maharajah » est un roman qui m’a beaucoup plu pour son traitement du contexte historique et son duo, qui là encore, j’aimerais retrouver dans d’autres récits afin de surtout voir continuer l’évolution d’Avery auprès de Blake.
Le style est agréable et on ne peut qu’apprécier le travail minutieux de l’auteur pour les détails historiques. Côté aventure, bien qu’il y’ ait quelques longueurs, on se laisse facilement entraîner par cette enquête qui touche les hautes sphères de la Compagnie.
A conseiller surtout pour ceux qui aiment lire des romans historiques fort bien détaillés et sachant retranscrire avec lucidité et sans condescendance une période riche en événements.
(Image à la une de tejomaya )