C’est ce qui reste.
Le manteau.
La parure qui définit l’animal.
Épaisse, fine, rugueuse souple et froide.
Passer ses mains au cœur de la matière.
Caresser pour mieux connaître.
Toucher puis imaginer. (p. 26)
C’est un recueil de poèmes à deux têtes et quatre mains. Claire Gohard, taxidermiste du Muséum d’Histoire naturelle du Havre, était sans doute la poète idéale pour rythmer et donner quelques respirations à l’incontrôlable déclamation anatomique de Lara Dopff, fondatrice des éditions Phloème.
Les deux écrivaines y décrivent la matière vivante sous toutes ses coutures, cherchant à donner vie à un livre que l’édition a relié, à la main, d’un fil de chanvre issu de fibres végétales, cirées à l’amidon de pomme de terre.
Ainsi, au Havre, sous les abîmes de moellon de Perret (ou à côté), grouille une vie culturelle qui autorise encore les rencontres créatrices. Dépêchons-nous d’en profiter, car au Havre les autorités ont bien l’intention d’expulser toute agitation artistique qui ne serve pas leurs intérêts.
elle fit le don de ses actes.
inconscient choix de la matière,
poétique éminence de l’artiste.
créer, créateur.
l’artiste ne choisit la matière de ses expressions,
c’est la matière qui lui dicte chair. (p. 73)
On l’aura compris, aucun recueil de poèmes ne pouvait mieux convenir aux éditions Phloème, dont le nom même est emprunté au tissu conducteur de sève des végétaux.
Claire Gohard et Lara Dopff, Les traits de l’extinction – Morceaux choisis, Phloème, 2017, 96 p., 23€.