Why, Dexter, Why ?
( lors de l’épisode finale de la série Dexter… )
Chéri (la télécommande en main, excité): Prête pour la conclusion ?
Moi (dans le même état): Vas-y, lance l’épisode. J’espère une fin digne des premières saisons…
( à la fin de cet épisode)…
Chéri (dépité et quittant le salon): No comment… Je vais me chercher une canette de coca…
Moi (résignée et prenant le cahier Death Note posé sur la table): Bien, bien, bien… Je note: les scénaristes de la série Dexter…
TITRE: Serial Killeuse
ÉDITEUR, ANNÉE: Denoël, 2018
NOMBRE DE PAGES: 544 pages.
Autant lors du final de « Six feet under« , où l’acteur Michael C. Hall tient un rôle principal, j’étais au bord des larmes, autant pour son personnage de Dexter, j’avais des envie de meurtre… Et en parlant de meurtre, la jeune femme que je vais vous présenter semble en raffoler. Voici « Serial killeuse » de C.J. Skuse
« Résumé: »
« Vous pensez que Rhiannon est simplement cette jeune assistante éditoriale, un peu terne et effacée, pas bien jolie, celle que personne ne remarque au bureau? Souvenez-vous, elle a fait la une des journaux il y a une vingtaine d’années : cette enfant, seule survivante d’un massacre chez sa nourrice, c’était elle! Toutes les télés en ont parlé et ont diffusé les images de cette gosse terrifiée par plusieurs jours de séquestration. Depuis, Rhiannon a grandi, s’est «reconstruite», comme on dit : un job, un petit copain, des amis qui parlent mariage et fringues, tout semble normal. Mais le soir, Rhiannon n’est plus la même : elle écume les sites de rencontres sur Internet, se balade dans les coins malfamés de la ville, drague certains types louches. Et, secrètement, elle fait des listes de «gens à tuer» : depuis le caissier de Lidl qui l’a fait attendre, jusqu’au chauffard qui a failli la renverser, tous ne méritent qu’une chose : sa vengeance. Vous croyez qu’elle plaisante, vous avez tort! »
Une soirée entre amies, où l’on félicite le futur mariage de l’une et le proche accouchement d’une autre, cela semble être un superbe moment pour tout le monde… Enfin, presque ! Derrière un petit sourire de façade et de quelques phrases pour marquer un semblant d’intéressement pour la discussion, Rhiannon supporte ce « rituel convivial » afin de donner bonne figure. Ne faut-il pas se fondre dans la masse afin de paraître « normale » et loin de tous soupçons ? Un conseil bien avisé à suivre lorsque vous avez ces pulsions meurtrières qui ne désirent qu’à être satisfait. Rhiannon semble l’avoir bien compris et, à travers son journal qui nous révèle son quotidien, nous découvrons une jeune femme qui n’a rien de l’héroïne habituelle.
Dans une comédie sanguinolente à l’humour tranchant, la jeune femme nous dévoile sans détour et parfois crûment, comment elle comble ses envies de meurtres. Mais nous sommes bien les seuls, car pour son entourage, Rhiannon se dissimule sous un masque de « normalité ». Alors oui, si comme moi, vous avez lue ou regarder la série de Dexter, il est clair que vous aurez un effet de « déjà-vu ».
Mais l’autrice arrive à y apporter une touche d’originalité en reprenant certains codes de la « Chick Lit »:
– Nous avons une jeune femme entre 20/30 ans, entourée d’amies prêtes à se marier ou être maman; travaillant dans une boîte dont elle aimerait que l’on fasse enfin attention à ses capacités ou bien trouver un boulot qui la convienne; en couple avec un homme qui n’est vraiment pas le bon et le grand amour qui est prêt à se présenter à elle.
En reprenant ses éléments, l’autrice s’amuse à les éclater afin de nous livrer un récit « brut de décoffrage », avec une héroïne au langage joliment fleuri et d’un humour cynique qui a fait mouche avec moi. Et malgré son hobby sanglant, on s’attache très vite à elle.
Il se peut que la touche de violence parfois gore et le cynisme de Rhiannon puisse ne pas plaire à tout le monde. Pour ma part, j’ai trouvé cela rafraîchissant de voir une jeune femme aussi atypique et qui a su m’embarquer dans une histoire complètement ahurissante. Et en dehors de ses pulsions de trucider ceux qui la rendent folle et ses passages à l’acte pour certains, elle montre aussi qu’elle n’est pas la seule à mettre un masque face à la société pour cacher ses sentiments et ses secrets. Comme dans le roman d’ « American Psycho », où l’auteur, Bret Easton Ellis, offrait une critique de la société dorée américaine des années 80, l’autrice C.J. Skuse livre ici un portrait assez vitriolé de la société anglaise de nos années actuelles.
Conclusion:
« Serial killeuse » est ce genre de roman complètement dingue dont je raffole la lecture. Et sous sa couche d’humour noir et de quelques scènes sanglantes, se cache une critique de notre société que l’on ne peut nier.
Quant à Rhiannon et sa petite liste de noms de gens qu’elle a envie de trucider, présente avant chaque chapitre, elle vous fera sourire, certes, mais vous renverra peut-être à ses petits moments qui, sous le coup de l’énervement , vous avez eu envie d’étrangler des personnes:
– par exemple, ceux qui sont prêts à vous piétiner pour rentrer dans un train/bus/métro déjà rempli, ou bien, des collègues qui vous considèrent comme un « post-It » (on utilise, on jette), ou des connaissances qui, « pour votre bien », se permettent des réflexions blessantes au lieu de se la fer… Enfin, bref ! Je pense que vous avez compris.
Si vous aimez les comédies noires, sachant manier le cynisme avec brio, je vous invite vivement à découvrir cette chère Rhiannon… Mais surtout, évitez d’être dans son collimateur !
(Image à la une de Harumi Hironaka )