Panini Comics va devoir, par la force des choses, étendre le contenu de ses Intégrales X-Men à de nombreuses séries dérivées. C'est que nous sommes désormais de plein pied dans les années 90, époque bénie des grands crossovers mutants, dont ce troisième volume, pour 1993, constitue un exemple parfait. Attractions Fatales propose en effet de relire US Uncanny X-Men 301-304 et Annual 17, X-Men Unlimited 1, X-Factor 92 et X-Force 25. Au menu, Magneto pas content du tout, mais alors pas du tout, et Wolverine qui va y laisser des plumes. Pardon, de l'adamantium.
Il s'agit peut-être du pinacle de la prestation de Lobdell et Nicieza sur les X-Men. Magneto, que l'on croyait mort à tort, est de retour, et il parait plus puissant que jamais. Les tensions raciales aussi sont plus exacerbées que par le passé. Les X-Men sont une parabole de tout ce qui se fait en terme de boucs émissaires dans le monde, et le rêve de Charles Xavier d'une cohabitation pacifique, entre mutants et humains normaux, vacille sérieusement. Devant la furie des Acolytes qui ne se soucient guère des dommages collatéraux, et la décision de Magneto de lancer une vaste attaque contre le spectre electro magnétique de la Terre, ce bon vieux Charlie va devoir à son tour se radicaliser. Il a beau débattre en direct à la télévision et chercher une échappatoire dans la raison, la seule issue au conflit inéluctable qui se profile est d'agir définitivement face à son ancien ami, et d'envisager l'impensable. D'autant plus que Magneto, amer et trahi, est sans pitié. C'est Cable qui se fait découper en petites tranches (il est fait de métal en partie, mauvaise pioche face au seigneur du magnétisme), avant le face à face qui va marquer la décennie, à savoir Wolverine et son adamantium, face à celui qui peut le contrôler par la pensée, jusqu'au dernier gramme. Oui, Logan va souffrir, et ça va le marquer pour de longs mois, dans la chair et dans l'esprit.
Ce qu'on aime dans les X-Men d'alors, c'est cette dimension politique bien campée, cette crédibilité dans les enjeux, qui trouvent toujours un écho dans notre réalité géopolitique, des lustres plus tard. Xavier professe paix et compréhension mutuelle, mais un certain Craydon Creed développe des idées extrémistes et racistes qui commencent à séduire l'opinion publique, vaincue par la peur, alors que le Sénateur Kelly, à coté, semble être un homme pragmatique et modéré, avec qui Xavier est prêt à s'allier, s'il le faut. Un professeur X qui peu à peu renonce à sa déontologie de fer, pour combattre son adversaire, en le replongeant dans les affres des drames du passé (les camps de concentration), et n'hésite pas à demander le sacrifice ultime de ses élèves, pour le bien de la communauté (Jean Grey). Ou encore à charger Tornade de voler pour son compte. Jusqu'à ce que les événements se précipitent, et qu'il lui faille apporter une conclusion au duel éternel face à Magneto. Les mots n'ont servis à rien, la main tendue a été rejetée, l'heure est venue de déchaîner des pouvoirs psychiques redoutables, quitte à lobotomiser celui qui fut autrefois un ami. Pendant ce temps Illyana Rasputin nous quitte, terrassée par le virus Legacy, que ni Le Fauve, ni les autres scientifiques mutants de la planète, ne sont parvenus à guérir. Il n'en faut pas plus pour que Colossus, le frangin, ne se terre dans un mutisme effrayant, qui va déboucher sur un changement de camp aussi momentané que choquant, à une première lecture.
Ah quelle chance avons nous eu de découvrir tout ceci en temps réel, dans les années 90, en sautant allégrement de Special Strange aux versions intégrales Semic, nous autres les anciens. Avec des dessinateurs de la trempe de John Romita Jr, Greg Capullo, Joe Quesada, Adam Kubert, ou Richard Bennett. Cette troisième intégrale X-Men 1993 explique en grande partie pourquoi nous nous sommes tant attachés à cette bande de mutants en costumes criards, dont les multiples épreuves, joies et drames, ont constitué le soap super héroïque par excellence de mes années lycée. Les gars, je vous aimerais toujours.
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