Éditeur : French pulp éditions
Parution : 23/11/2016
Nombre de pages : 476
Genre : policier
L'auteur :
Né à Paris, Michel Lebrun (1930-1996), de son vrai nom Michel Cade, est un critique littéraire, scénariste, traducteur et auteur de romans policiers. La centaine de romans qu'il a publiés ont reçu des multiples prix et lui ont valu le surnom de "Pape du Polar", ainsi qu'un prix à son nom qui récompense chaque année le meilleur polar francophone : le Prix Michel Lebrun.
Quatrième de couverture :
Véritable citadelle plantée au cœur de la banlieue, le Géant est un supermarché modèle. Son directeur, Jean Montescourt, se prend pour un capitaine de paquebot et le chef de la sécurité, Spada, joue facilement les justiciers sadiques. L'ordre règne à bord. Jusqu'au jour où Pierre, une jolie fille au prénom d'homme, part à l'assaut du bâtiment avec son gang de mauvais garçons, où l'équipage entre en mutinerie, où la panique se transforme en naufrage... Et c'est au moment où les rats quitteront le navire que l'on pourra dénombrer les victimes du Géant. Après Autoroute, superbe roman-catastrophe, Michel Lebrun nous entraîne dans une formidable course-poursuite et nous fait découvrir les coulisses des grandes surfaces. On trouve tout au Géant, même son destin.
Mon avis :
« Dans cette ville qu'est le Géant où règne perpétuellement une sourde agitation, que domine une incessante frénésie de vente et d'achat, où la convoitise trouve à chaque instant son assouvissement, où l'acte de regarder un objet, de le palper, de le saisir, prend valeur valeur de possession érotique, le temps s'est arrêté, l'espace d'un clignement d’œil, d'un battement de cœur. »
Années 1970, région parisienne. Bye bye les petits commerces de proximité et vive le "Géant", un immense temple dédié à la consommation où l'on vous promet de pallier à tous vos besoins et de satisfaire chacune de vos envies, même les plus folles. Alimentation, vêtements, outillage, produits de beauté, électroménager, loisirs, papeterie... Demandez et vous aurez. Une vraie révolution ! Dans cette ruche bourdonnante d'activité plongée en permanence dans la lumière artificielle, tout est pensé pour pousser l'acheteur à consommer plus. Promotions, publicités, animateurs-démonstrateurs cernent de toutes parts le client. On avait besoin de pain et on repart avec un aspirateur ; on souhaitait simplement acheter un paquet de bonbons et on quitte le magasin avec le vélo convoité par sa progéniture. Le monarque de ce palais de la consommation se nomme Jean Montescourt. Obséquieux avec la clientèle et redoutable avec le petit personnel, ce dernier n'est au service que d'un seul maître, son magasin bien-aimé. Le roi Jean va pourtant déchanter. Il suffit parfois d'un grain de sable pour enrayer une mécanique bien huilée...
Pamphlet contre la société de consommation, ce polar social nous plonge dans les entrailles d'un hypermarché. Méthodes de vente parfois peu scrupuleuses, grèves du personnel revendiquant de meilleurs salaires et conditions de travail, chasse aux voleurs... tout est passé à la moulinette avec une ironie mordante. Bien qu'écrit dans les années 1970, ce roman n'a pas pris une ride. Visionnaire, l'auteur imagine un futur où l'on demanderait une grande polyvalence aux caissières, comme c'est le cas actuellement dans les enseignes discount : « Une caissière à son tiroir-caisse dans l'attente de ses clients, c'est un gaspillage de temps et une rémunération inutile. [...] On pourra et on devra, lorsqu'un creux se fera sentir, les utiliser dans le magasin à d'autres tâches : étiquetage, réapprovisionnement, nettoyage, marquage, voire décoration, animation et pourquoi pas contrôle divers. Les responsables d'entreprises qui sauront faire admettre ce progrès en tireront le profit maximum... ». Après avoir lu ce récit incisif du "Pape du Polar", aussi cruel qu’hilarant, vous envisagerez certainement l'univers de la grande distribution d'un autre œil !