BLUEBELLS WOOD, Guillaume Sorel (Glénat)

Par Hubrislibris @HubrisLibris
Depuis la disparition de sa femme, William vit reclus dans sa maison située entre une côte brumeuse et une forêt aux allures de conte de fées. Incapable de se reconstruire, il mène une existence solitaire et sans saveur, ne parvenant à se réfugier que dans la peinture. Ses seules visites de l’extérieur sont Victor, son ami et agent, et Rosalie, sa jeune modèle. Jusqu’au jour où William fait la rencontre d'une créature aussi belle que farouche et pour laquelle il nourrit des sentiments contradictoires : une sirène. Mais est-elle seulement réelle ? Ou ne s’agit-il que d’une illusion venue pour remplacer le fantôme de sa femme disparue ?
▬  BLUEBELLS WOODGUILLAUME SORELGLENAT96 PAGES25 AVRIL 2018FANTASTIQUE, DEUIL, ARTISTE, FABLE ▬ 
L'intérêt débute toujours avec cette même curiosité envers la couverture. Un tracé sublime, une femme vue de dos. S’en suit un titre en anglais, et me voici à ouvrir délicatement les pages. 
Roman graphique ou bd, la différence devient de plus en plus complexe. Peut-on parler d’un roman graphique du fait que certaines planches ne contiennent qu’une unique case ? Pour moi, il sera question de roman graphique, d’autres classeront Bluebells Wood dans le registre des bd’s. A chacun son commentaire sur le sujet. 
De roman, il n’en a que le côté graphique lors des premières pages. Aucun texte. C’est une déambulation dans un rêve, ou peut-être cauchemar. Un champ, un homme, et une femme, créature sublime qu’il ne peut atteindre. William, c’est cet homme que l’on observe, cet artiste cloitré à sa baraque égarée entre forêt enchantée et côte escarpée. William, c’est l’artiste désenchanté suite au décès de sa femme - silhouette fantomatique qu’il croise à travers quelques rêveries. 
Une bd sur le deuil. Pas seulement.
Le surnaturel s'immisce à travers les fantasmagories de William. Si on croit à un rêve aux premières pages, on accepte bien rapidement la présence de ces créatures de l’écume ; sirènes. Leur beauté égale à leur monstruosité. De sublimes, elles passent à laiderons bardés de crocs, griffes et barbouillées de sang. Une belle représentation du mythe, sans fioriture Disney. Commence alors une histoire entre William et une sirène, amour à sens probablement unique, amour qu’on imagine orchestrée par le monstre. S’en suivent quelques péripéties, des planches offrant le spectacle d’un onirisme noir, où les filles de l’eau tentent de venir sur terre, d’envahir la demeure de l’artiste pour y retrouver leur camarade amourachée d’un humain.  

Le dialogue se fait rare, on pourrait dire qu’il est précieux. Un dialecte maigre entre les différents personnages, ce qui permet de se focaliser sur les dessins. Et des dessins, parlons de leur superbe. Que ce soient les paysages, les corps, ou les expressions, Guillaume Saurel parvient à créer le réel tout en l’aspergeant d’irréel. Corps de femme, ou corps de monstre libidineux ? La réalité se joint à la fantaisie, aux fantasmes du personnage, offrant ainsi une palette sublime de représentations corporelles. 
Vérité des créatures marines ou fabulations ? La réponse ne se trouve pas à la fin du récit.C’est à l’imagination du lecteur, à ce qu’il souhaite croire.J’y choisis l’écho à Edgar Allan Poe. 

‣ l'interprétation du mythe des sirènes. on côtoie des créatures sublimes et sanguinaires, empreintes de folie meurtrière. et leur représentation graphique est magnifique.‣ l'histoire qui ne connait pas de réelle fin, qui est à l'interprétation de chacun.‣ les paysages qui valsent de beauté en désenchantement.

‣ un léger manque de dialogues