Éditions J'ai lu, 2003 (177 pages)
Ma note : 15/20Quatrième de couverture ...
Sarah Bernhardt (1844-1923) connut de son vivant une destinée extraordinaire. Sa " voix d'or " lui valut le qualificatif de Divine.
Pendant plus d'un demi-siècle, elle incarna les héroïnes tragiques et triompha dans Phèdre, Théodora ou L'Aiglon. Directrice de théâtre, elle monta des pièces à grand spectacle qui firent sa célébrité. Actrice moderne, elle mena une carrière internationale et sut monnayer son image de star. Se définissant comme une artiste complète, elle exposa tous les ans au Salon ses peintures et ses sculptures. Amoureuse fougueuse et exigeante, elle eut une vie sentimentale mouvementée.
Elle fascinait autant par son courage et ses folies qu'elle inquiétait par sa neurasthénie et son cynisme.
La première phrase
" L'enfance, l'adolescence de celle qu'on appellera plus tard "la Divine", "la Voix d'or" ou encore "l'Enchanteresse" ne furent pas particulièrement heureuses. "
Mon avis ...
Sarah Bernhardt est un personnage qui me fascine depuis un long moment maintenant. Petite, j'ai pu la découvrir dans une BD Lucky Luke (appartenant à mes grands-parents), tandis qu'en 2016 j'ai eu l'occasion de l'imaginer sur son fort, à Belle-Île-en-Mer. De son apparence physique, de sa personnalité, j'en savais finalement assez peu. Lorsque j'ai reçu cette biographie, offerte par mon petit-frère à l'occasion de mon anniversaire, il me tardait donc d'ouvrir cet écrit et de me plonger dans le vécu de cette personnalité qui a inspiré bon nombre de ses contemporains.
Avec cette biographie, Claudette Joannis signe une bonne entrée en matière pour qui ne connaîtrait pas encore Sarah Bernhardt. De son enfance malheureuse à ses débuts au théâtre, en passant par ses liaisons amoureuses (courtes et tumultueuses), le lecteur se fait rapidement une première idée du caractère de cette actrice française. Entière, passionnée, Sarah Bernhardt l'était sans doute. De son talent pour les pièces tragiques en passant par l'aménagement de ses logements, rien n'était fait dans la demi-mesure. J'ai ainsi appris qu'elle pouvait vivre dans un total désordre, entourée d'oiseaux exotiques, d'un crocodile, et même de lions rapportés de ses voyages ! La simplicité n'était donc pas vraiment de mise. Pour autant, Sarah Bernhardt présente un certain côté attachant. Enfant, elle a quasiment été abandonnée par sa mère pour être confiée chez une nourrice en Bretagne. Adolescente, elle a grandi chez les Sœurs. On imagine alors une personne en manque d'amour, qui n'aura de cesse de le rechercher dans ses histoires sentimentales, ou encore dans la fascination dont elle pouvait être l'objet.
Car oui, Sarah Bernhardt fascine. J'ai été étonnée d'apprendre que Victor Hugo la vénérait presque, tandis qu'elle était une grande amie d'Alexandre Dumas ou d' Edmond Rostand (à l'origine des termes "reine de l'attitude et princesses des gestes" la qualifiant). Sarah Bernhardt était aussi une grande voyageuse, n'hésitant pas à se rendre jusqu'aux États-Unis pour faire découvrir son talent. Et bien sûr... il y a ses fameuses douleurs au genou qui lui vaudront une amputation de la jambe en 1915. Pour autant, et ce jusqu'à la fin de sa vie, Sarah Bernhardt n'exprimera qu'une envie : monter sur scène, encore et encore. Le portrait dressé par l'auteure est donc on ne peut plus intéressant. Rousse, à la silhouette mince (quasi androgyne), le physique de Sarah Bernhardt se situait aux antipodes des canons de beauté de l'époque. Pour autant, elle aura réussi à conquérir son public et à se faire une place au soleil.
J'ai grandement apprécié cette biographie tant elle se montre concise, et paradoxalement assez complète. Claudette Joannis ne s'attarde cependant pas sur certains aspects qui avaient pu défrayer la chronique à l'époque : la prétendue homosexualité de l'actrice ou encore ses colères monumentales. Pour autant, quelques illustrations (situées au milieu de l'ouvrage) sont une vraie plus-value. Grâce à cette biographie, on peut dire que j'ai beaucoup appris sur Sarah Bernhardt. Pour les lecteurs recherchant un écrit encore plus complet ou plus intime, ils peuvent tout à fait se tourner vers Sarah Bernhardt, ma grand-mère (de Lysiane Bernhardt). Les ouvrages ne manquent en tout cas pas.
Extraits ...
" Au milieu de cette bizarre orgie d'orientalisme et de modernité, Sarah reçoit ses hôtes étendue théâtralement sur des fourrures, peau d'ours ou d'élan (animal qu'elle aurait tué aux environs de Moscou dans une chasse au tsar), étrange princesse lointaine tenant avec des laisses d'argent couchés près d'elle Bélisaire et Marc-Antoine, ses lions préférés, dans un jacassement de perroquets multicolores, de cris de singes grimpés aux palmiers. "
" En 1923, peu avant de mourir, après avoir médité sur son existence, elle conclut :
"La vie est courte, même pour ceux qui vivent longtemps. Il faut vivre pour quelques-uns qui vous connaissent, vous apprécient, vous jugent et vous absolvent et pour lesquels on a la même tendresse et indulgence. Le reste est "fouletitude" joyeuse ou triste, loyale ou perverse, de laquelle on n'a rien à attendre que des émotions passagères, bonnes ou mauvaises, mais qui ne laissent aucune trace. Il faut haïr très peu, car c'est très fatigant. Il faut mépriser beaucoup, pardonner souvent et ne jamais oublier que le pardon ne peut entraîner l'oubli. Pour moi du moins." "