Les heures rouges de Leni Zumas

Les heures rouges de Leni Zumas
Éditeur : Les Presses de la cité
Parution : 16/08/2018
Traduction : Anne Rabinovitch
Nombre de pages : 398
Genre : littérature française

L'auteure :


Les heures rouges de Leni Zumas












Diplômée de Brown, Leni Zumas enseigne l'écriture créative à l'université de Portland et publie régulièrement dans la presse nationale. Les Heures rouges est son premier roman traduit à l'étranger.
Quatrième de couverture : 


États-Unis, demain. Avortement interdit, adoption et PMA pour les femmes seules sur le point de l'être aussi. Non loin de Salem, Oregon, dans un petit village de pêcheurs, cinq femmes voient leur destin se lier à l'aube de cette nouvelle ère. Ro, professeure célibataire de quarante-deux ans, tente de concevoir un enfant et d'écrire la biographie d'Eivør, exploratrice islandaise du xixe. Des enfants, Susan en a, mais elle est lasse de sa vie de mère au foyer – de son renoncement à une carrière d'avocate, des jours qui passent et se ressemblent. Mattie, la meilleure élève de Ro, n'a pas peur de l'avenir : elle sera scientifique. Par curiosité, elle se laisse déshabiller à l'arrière d'une voiture... Et Gin. Gin la guérisseuse, Gin au passé meurtri, Gin la marginale à laquelle les hommes font un procès en sorcellerie parce qu'elle a voulu aider les femmes.
" Drôle, mordant, poétique, politique, alarmant, inspirant, Les Heures rouges révolutionne la fiction de notre époque. " Maggie Nelson ( Une partie rouge, Les Argonautes)
Mon avis :
« Deux ans plus tôt, le Congrès américain a ratifié l'amendement sur l'identité de la personne, qui accorde le droit constitutionnel à la vie, à la liberté et à la propriété à un œuf dès l'instant de sa conception. L'avortement est aujourd'hui illégal dans les cinquante Etats. Les avorteurs peuvent être accusés de meurtre au second degré et les femmes désireuses d'avorter, de complicité de meurtre. La fécondation in vitro est également interdite au niveau fédéral, parce que l'amendement condamne le transfert d'embryons du laboratoire dans l'utérus (les embryons ne sont pas en mesure d'y consentir). »
Le récit se déroule  dans un futur très proche. Les Etats-Unis sont gouvernés par un président misogyne et tyrannique qui depuis son élection n'a de cesse de rogner sur les droits des femmes et de revenir sur des acquis qu'elles croyaient immuables, tel l'arrêt "Roe v. Wade", rendu en 1973 par la Cour Suprême américaine et légalisant le droit à l'avortement en le reconnaissant comme un droit constitutionnel. 
A travers les destins de quatre femmes qui vont se croiser et s'entremêler, l'auteure nous dresse le portrait d'une société en pleine régression, prônant le modèle familial traditionnel (un papa, une maman, des enfants) comme le seul valable pour l'épanouissement de sa progéniture. 
Roberta, une enseignante et biographe célibataire âgée de 42 ans, essaie en vain de concevoir un bébé et s'affole car une loi va bientôt interdire le droit à l'adoption pour les femmes seules. 
Mattie, une brillante lycéenne qui s'est retrouvée enceinte accidentellement est confrontée à un tout autre dilemme : Doit-elle garder l'enfant et ruiner ses chances de faire une carrière scientifique ou bien avorter en cachette au risque de devenir une criminelle aux yeux de la loi ? 
Susan quand à elle, est une mère de famille frustrée d'avoir renoncé à une carrière d'avocate pour élever ses enfants. Elle échafaude des plans hasardeux et irréalisables pour se défaire des liens sacrés d'un mariage étouffant qui la mine tellement qu'elle envisage parfois le suicide. 
La quatrième voix de ce roman polyphonique est celle de Gin la  "guérisseuse" qui vit seule dans les bois et subit l’opprobre de ses congénères qui n'hésiteraient pas un instant à la faire griller sur un bûcher s'ils en avaient la possibilité !
Comment ces quatre femmes vont-elles réagir face à l'adversité ? Pourront-elles seulement tirer leur épingle du jeu dans un monde en pleine mutation qui leur reconnaît de moins en moins de droits et essaie de briser toute velléité de résistance à l'autorité suprême d'un gouvernement liberticide ? 

Inquiétante, furieusement crédible et loin d'être innocente, cette dystopie à la couverture écarlate raisonne comme une mise en garde à l'attention de toutes les femmes, susurrant à l'oreille de ces dernières : Attention mes belles, ne vous endormez pas sur vos lauriers. Secouez-vous et réagissez avant que le loup n'entre dans la bergerie et vous dévore toute crue. Pensez à vos mères et grand-mères qui se sont battues pour vos droits et faites en sorte de les défendre et de les faire perdurer ! A la fois tragique, poétique et incendiaire, ce troublant roman de Leni Zumas ranime la flamme de nos peurs les plus profondes, telles la perte de nos droits fondamentaux ou le retour à un monde archaïque où l'on pratiquait en toute impunité la chasse aux sorcières ! 
Les heures rouges de Leni Zumas
Merci à Babelio et aux éditions Les Presses de la Cité