© Timo Wagner
La noirceur épaisse et étouffante qui laissait entrevoir des respirations, enveloppait Sia. Elle ne bougea pas. Attendant simplement. Soudain, des mains la saisirent, elle tomba brutalement et sa tête heurta le sol. Elle étouffa un cri. Elle sentait des griffes partout sur son corps. Sa robe se déchira et elle se retrouva nue dans le noir face à un ennemi invisible et violent. Elle se sentit soulevée de terre. Fallait-il qu’elle se débatte ? Devait-elle garder son calme ? D’instinct, elle se cambra et lança un coup de pied dans le vide. Elle gigotait vivement, tentant de se libérer de l’emprise qui s’abattait sur elle. Survivre, vaincre, survivre, vaincre. Les mains la posèrent lourdement sur ce qui semblait être un siège, puis la ligotèrent. Les liens étaient serrés, elle ne pouvait plus bouger. Une lumière vive l’aveugla soudain. Sia ferma les yeux vivement. Lorsqu’elle les rouvrit, elle ne vit rien. Elle regarda autour d’elle. Une lampe avait été placée face à elle. Elle était attachée à une chaise en similicuir. Des liens entravés sa poitrine, ses bras et ses jambes. Elle tenta de bouger mais ni parvint pas. Survivre, vaincre, survivre, vaincre. Soudain, une silhouette sortit de l’ombre. L’homme portait un pagne noir et un masque doré et bleu recouvrait son visage. Il s’assit sur une chaise à côté d’elle. Seuls ses yeux indiquaient que cette personne était un être humain. Elle le regarda fixement et lui cracha à la figure. Des ricanements se firent entendre tout autour d’elle. Ils n’étaient pas seuls. L’homme se pencha et saisit une machine qu’elle n’avait jamais vue auparavant. Il mit en route la machine plusieurs fois puis la posa sur une petite table à côté de lui. Ensuite, il remplit un petit récipient d’un liquide noir. Sia était fascinée par sa gestuelle délicate et appliquée. Elle nota que ses mains étaient soignées. Elles semblaient douces. L’homme tourna le bras de Sia et frotta l’intérieur de son poignet avec un textile humide. L’odeur lui indiqua qu’il s’agissait d’alcool. L’inconnu se pencha, trempa la machine dans le liquide noir, la mit en route et commença son travail. Une douleur fulgurante s’abattit sur elle. Sia ne put réprimer un cri. La sensation que des centaines de chat se faisaient les griffes sur son bras la saisit. Elle tenta de se débattre mais l’homme resserra sa prise. Elle jeta un regard autour d’elle mais elle ne vit que la noirceur. Elle ne sut pas combien de temps dura son calvaire mais lorsqu’il eut terminé, une marque noire et boursouflée ornait l’intérieur de son poignet. Le symbole qui apparaissait sur la porte qu’elle avait poussé se trouvait désormais ancré dans sa chair. Plusieurs personnes sortirent de la pénombre et la détachèrent. Ils la portèrent jusqu’à un bassin entouré de bougies. L’homme au masque la porta dans ses bras et l’accompagna dans l’eau fraîche. Deux femmes nues les rejoignirent et entreprirent de laver Sia. Elle se laissa faire, témoin muet de sa propre initiation. La boue de ses cheveux souillait l’eau. Elle sentit son khôl couler sur son visage. Tandis que l’homme et les deux femmes la frictionnaient, elle observa les lieux. C’était une grande pièce où régnait une forte odeur. Plusieurs personnes de tout âge et de tout sexe se tenaient au bord du bassin et la regardaient d’un air bienveillant. Lorsqu’elle fut propre, on l’enjoignit à sortir. On la mena vers un vieil homme qui était assis au fond de la pièce. Elle était ruisselante et son poignet la brûlait. À sa vue, le vieillard sourit. « Bienvenue chez toi Vengeance. Que la crosse héka et le fléau te protègent. » Sia jeta un regard circulaire tandis que des milliers de voix répétait cette phrase. Dans un coin de la pièce, elle aperçut un visage qui ne lui était pas inconnu.
Ce texte est une suite des deux précédents ateliers: Texte 1 et texte 2.
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