A la rentrée, j'ai été reçue dans la #TeamThriller du Cherche-Midi, un groupe de joyeux foufous, où l'on va pendant un an lire et déconner et s'amuser et lire et, bref un an de lectures autour du thriller, du polar et du huis-clos psychologique. Je remercie d'ailleurs Benoît pour m'avoir intégrer à l'équipe et pour l'envoi du roman (avec un tout joli post-it personnalisé à l'intérieur, c'était trop chou).
Avec Rituels, j'ai donc fait ma rentrée officielle accompagnée de ma marraine de la TTCHM (c'est comme une réunion des AA en fait mais nous, on boit de l'alcool), Chaton Rosemary, avec qui on s'est fait une lecture commune trépidante.
Spécialiste des neurosciences, Sayer Atair travaille pour le FBI. Elle mène des études sur les tueurs en série, afin de déceler d'éventuelles prédispositions biologiques à la violence. Déroutée par une scène de crime très particulière, sa hiérarchie fait appel à elle. On vient de retrouver dans une maison abandonnée de Washington le corps d'une jeune fille enfermée dans une cage. Si l'autopsie ne discerne aucun signe de sévices sexuels, la victime a subi de nombreuses injections d'une drogue hallucinogène très particulière, utilisée lors des cérémonies rituelles par les chamans d'Amazonie. On a également retrouvé sur les lieux la photo d'une autre jeune fille, enfermée ailleurs dans les mêmes conditions, ainsi qu'un film où figurent d'étranges symboles mayas. Bientôt, c'est entre les catacombes et les sous-sols de la ville que l'enquête va se concentrer, sur la piste d'un tueur aussi étrange qu'insaisissable.
Petit aparté : Je ne compte pas vous parler de l'intrigue, déjà j'aurais trop peur de laisser passer un truc, et puis, je suis de l'école pour tout ce qui touche au thriller de " moins on en dit, mieux est la surprise ".
Mais rassurez-vous, on va causer.
Ici, on aime bien les petits thrillers/policiers sous la couette qui tiennent éveillé jusqu'au bout de la nuit. Et ce fût carrément le cas pour Rituels, premier opus de ce qui semble être une future saga policière autour de l'agent du FBI, Sayer Altair, brute de décoffrage, nerveuse et à fleur de peau. Petite parenthèse qui nous a bien plu avec Chaton, c'est que Sayer est présentée comme étant une femme noire et je ne sais pas vous, mais moi je n'ai pas beaucoup vu passer en littérature policière des héroïnes féminines, haut placées dans la hiérarchie et de couleur, se passant aux Etats-Unis, en plus. La diversité, on dit oui !
Rituels se dévore donc, pages après pages. Ellison Cooper, pour qui c'est son premier roman, a écrit là un policier terriblement enlevé dans lequel il est quasi impossible de s'ennuyer. Enchaînant les actions à tour de bras, les dialogues (y en a beaucoup. Oui on va en reparler) et les révélations à chaque fin de chapitre, le rythme fonctionne très bien. Propre et efficace.
Mais...
peut-être un peu trop.
Car, malheureusement, le gros point noir, le pépin dans la pépinière, le caillou dans la godasse, le cheveu dans la soupe, la verrue sur l'orteil, c'est
L'écriture
L'écriture
L'écriture
L'écriture
Parce que niveau " je te pose une ambiance avec des personnages bien dessinés " on y est clairement pas. Là, je pense que je vais être plus sévère que mes camarades de classe, mais en même temps, vous me connaissez, Mimine n'est pas toujours choucarde.
L'écriture est terriblement impersonnelle et lisse ; expéditive sur les détails et sur les descriptions réduites au minimum syndical. Du coup, j'ai eu du mal à visualiser la plupart du temps les scènes, les lieux et quasi tous les personnages souvent caricaturés. Ellison Cooper a eu du mal a leur donné du corps et c'est dommage parce qu'on sent que derrière il y a quelque chose d'intéressant et de réfléchi qui aurait pu être plus approfondi : Sayer Altair est l'agent en chef du FBI, neuro-scientifique, qui attise les convoitises et qui a un lourd passé de famille et sentimental. Son partenaire, quant à lui, Vik Devereaux est un poil mystérieux sur sa famille, qui apparemment à beaucoup de ramifications dans différents milieux. Même le voisin de Sayer qu'on voit de temps en temps possède ce petit truc, des petites caractéristiques qui me font dire que c'est certainement mon personnage préféré. Voilà. C'est peut-être les 3 seuls personnages un minimum développés qui apportent quelque chose de neuf (pour le voisin notamment). Et encore, malgré ça, les personnages restent en 2 dimensions, esquissés, à qui il manque quelques coups de crayon, et leurs relations et interactions ne sont que fonctionnelles à l'intrigue.
Il y a BEAUCOUP trop de dialogues.
En fait, j'ai plus eu l'impression d'être dans le scénario d'un film que dans un roman et moi cette façon d'écrire me dérange beaucoup car elle m'empêche de m'impliquer émotionnellement. Si bien que la narration est très souvent squeezée par l'énonciation c'est à dire l'action et l'instant présent.
Alors c'est bien qu'on fasse la passerelle entre le cinéma et la littérature, deux arts qui ont beaucoup de points communs. Or, il faudrait pas oublier que les deux genres fonctionnent différemment et que si le cinéma a besoin de dialogues pour présenter les personnages, pour savoir qui ils sont intérieurement, la littérature a besoin de narration. Ici, avec Rituels, il y a beaucoup de chapitres entiers qui ne sont constitués que de dialogues. Conséquence ? Il n'y a plus de place pour construire une atmosphère qui se serait bien prêtée à l'histoire : des jeunes filles enlevées et torturées... ce n'est pas un boulevard que l'autrice avait devant elle, c'était une piste d'atterrissage. Enfin je veux dire, j'ai plus flippé ma race sur des thrillers où y avait pas un mort, pas une goutte de sang, pas de policier, RIEN (je pense fortement à Une femme entre nous), qu'ici où, normalement, on est censé être dans l'ambiance de la traque d'un serial killer...
Alors je vais pas vous mentir, j'ai pris plaisir à dévorer le bouquin parce que, ça faut le reconnaître, Ellison Cooper a très bien su maintenir et gérer le suspens ainsi que les révélations de l'intrigue, mais dès que je le refermais, j'avais cette arrière-goût de plaisir vite fait bien fait, sans saveur. Comme j'ai dit à Chaton lors de nos débriefings à bâtons rompus, Rituels m'a fait l'effet d'un repas au McDo : sur le moment, on y prend du plaisir, un peu coupable, mais rapide et efficace. Ce n'est qu'après qu'on regrette car on sait que ce qu'on vient d'ingurgiter comme un ogre, c'était pas bon.
Forcément, cet avis est extrêmement personnel parce que nous n'avons pas tous la même définition du roman ni de ce que nous voulons y trouver. Rituels n'est pas un mauvais policier, il fait le job, encore une fois je le répète, le rythme est excellent, mais pour moi, il m'en fallait plus. Je sais que dans mon cas, la narration j'en ai besoin. J'ai besoin des descriptions, j'ai besoin des introspections des personnages pour m'y attacher, pour avoir l'impression de les connaître, d'accéder à des pensées intimes et donc d'être dans une relation privilégiée qui me rapproche d'eux, que se soit le vieux plouc du coin, la mère au foyer ou le psychopathe des familles, qu'importe. C'est ça qui me fait entrer dans l'histoire, qui me fait même participer à l'histoire dans le cas d'un policier.