Tous les ans, j'attends la rentrée littéraire avec impatience et bien sûr le dernier Nothomb. Sous ce titre, Les prénoms épicènes, se cache un nouveau récit écrit avec une plume toujours aussi exquise. Amélie Nothomb dépeint des personnages, des vies, au vitriol et sonde ce qu'il y a de plus noir dans l'âme humaine, mais aussi ce qu'il y a de plus beau : l'envie d'être aimé et d'aimer.
Et puis, il y a cette rage qui émane de ses protagonistes, qu'elle soit fondée ou non, ici on n'aime pas, on rage, on a faim d'amour et de reconnaissance. Ainsi Dominique va faire la connaissance de Claude. Claude parait parfait et pourtant, derrière ce masque de sollicitude se cache un pervers narcissique qui s'ignore (ou pas), un manipulateur sans conscience. Dominique est la femme qui subit sans subir. Elle est aveugle et ne voit que les fariboles que lui sert cet époux si froid, sauf quand il attend d'elle quelque chose de bien précis. Puis il y a Epicène, leur fille. Adorée par sa mère, haïe par un père qui la tolère à peine. Épicène elle aussi à la rage, celle de vivre, de sortir de ce cercle vicieux instauré par un homme qu'elle ne supporte que pour sa mère, qu'elle rêve de voir crever ; son père.
Si j'ai bu les mots plus que je ne les ai lus - je suis très friande, voire gourmande de la plume d' Amélie Nothomb -, je n'ai pu m'empêcher de trouver que ce nouveau titre ressemblait - comme une sorte de miroir inversé - à Frappe toi le cœur sorti un an plus tôt. On retrouve ces personnages en manque d'amour, mais qui veulent aimer. Dans Frappe toi le cœur la mère, égocentrique narcissique, déteste sa fille, ici, c'est le père. Mais quoi qu'il en soit, les deux enfants ont plus la niaque que leurs parents, c'est indéniable. Epicène sera celle qui épaulera sa mère quand cette dernière ouvrira enfin les yeux. Mais Dominique est forte à sa manière et Claude, cet homme horrible n'aura que ce qu'il mérite.
Les prénoms épicènes est au final un joli roman, une ode à la femme, au féminisme, mais surtout à l'amour. On a envie de secouer Dominique qui se fait avoir dans les grandes lignes, elle qui rêvait de liberté, d'émancipation, se retrouve sous la coupe d'un homme qui a acheté son amour à coup de Chanel N°5. Dominique a été faible et cette faiblesse lui fera perdre un paquet d'années, mais... rien n'est jamais perdu. Quant à Epicène, elle est le portrait type des adolescentes de notre époque : forte, un brin froide qui se méfie des hommes. Mais la force de ces personnages, c'est l'amour.
Encore un très beau récit magnifiquement écrit que j'ai dévoré avec passion.