Ça faisait un bout, non? Manquant de temps, je n’ai rien publié mercredi dernier. Et dire que v’la pas si longtemps, j’arrivais à publier deux-trois billets par semaine... Faut dire que dans ce temps-là, je n’avais pas de cuisine décente pour cuisiner! Là, c’est autre chose. Y’a du potage et de la croustade aux pommes dans le frigo et, pour une fois, c’est du homemade! Y’a aussi la mini saucisse à faire marcher quotidiennement. Mais j’arrive toujours à trouver le temps de lire. Beaucoup à part de ça. Me voilà donc de retour, bien en selle.
MANUEL DE LA VIE SAUVAGE – JEAN-PHILIPPE BARIL GUÉRARD
C’est l’histoire de Kevin Bédard, un étudiant en informatique un brin désabusé. Il se trouve un job pas trop stimulant: faire de l’«optimisation immobilière». Qué cé ça? Il doit rentabiliser au maximum les immeubles locatifs du propriétaire pour lequel il travaille. Pour y arriver, quelques entorses aux lois sont de rigueur. Un sale boulot qui ne fait jamais de fleurs aux locataires. Kevin voit de la détresse humaine à tour de bras et doit fermer les yeux. Il fait rentrer au boulot son colocataire et chum de gars dépressif. Un coup bas de cet ami et de son patron changera son destin. Kevin a de la graine d’entrepreneur. C’est de famille. Ambitieux, il veut changer le monde et devenir riche. À la Steve Jobs. Mais il lui faut avant tout trouver LA bonne idée. Il finira bien par la trouver, cette idée, mais elle viendra avec des hauts, et surtout avec beaucoup de bas. La réussite peut avoir un goût bien amer...
Ce Manuel de la vie sauvage m’a complètement requinquée. Cette histoire de self-made man bien ancrée dans la réalité d’aujourd’hui m’a prise dans ses filets. L’univers des start-up n’est pas un monde qui m’est familier. Et justement à cause de ça, j’ai suivi l’évolution de ce Kevin avec une attention redoublée. Jean-Philippe Baril Guérard montre bien comment des décisions qui paraissent souvent anodines, insignifiantes, peuvent déterminer le reste d’une vie. Il évoque avec une finesse subtile la mort, l’amitié et la trahison, l’opportunisme, l’ambition, la technologie et l’éthique. J’ai apprécié le brin de cynisme présent au creux de ces pages. Les personnages sont étoffés, le style est incisif et lumineux. Les conseils d’un entrepreneur expérimentés, prodigués tout au long du roman, viennent pimenter l’intrigue. Un roman surprenant et astucieux, d’une légèreté profonde. J’en redemande!Dans quinze ans, vous ne serez plus la personne qui lit ce livre en ce moment, et ça ne peut être que pour le mieux. Il ne peut y avoir de meilleure option que celle que vous choisirez, parce que vous êtes humain, et que les humains ont cette formidable capacité d’analyse, et une intuition incroyable: vous prendrez toujours la meilleure décision qui soit, en vous basant sur les informations que vous avez et que vous êtes capables de traiter. Et si vous avez un jour l’impression de commettre une erreur, c’est qu’elle sera nécessaire pour que vous appreniez. Il ne faudra pas regarder derrière; peu importe ce qu’on fait, on emprunte toujours le meilleur chemin possible. Alors fermez les yeux et foncez tête baissée: il y a un plan. Il y aura toujours un plan.Manuel de la vie sauvage, Jean-Philippe Baril Guérard, Ta mère, 320 pages, 2018.★★★★★DERNIÈRE JOURNÉE SUR TERRE – ÉRIC PUCHNER
Amandine, une jeune aventurière, part sur les traces de son grand-père. Elle monte à bord du El Brontosaurio à destination de Toucania, une île légendaire enveloppée d’un épais brouillard. Ce dernier ne se lève que le temps d’une journée, à tous les cinquante ans. Une fois le bateau accosté, Amandine est enivrée par les odeurs, éblouie par les couleurs, mais surtout elle est captivée par tous les animaux qu’elle rencontre. Il faut dire que les créatures étranges sont légion. Le temps presse et elle doit trouver l’endroit favori de son grand-père, cet endroit qui lui a inspiré le nom de l’île.
Chez Marianne Ferrer, la nature est d’une richesse luxuriante. Son univers déborde de douceur et de fantaisie. La jeune auteure-illustratrice rivalise d’imagination pour décrire la vie de cette île féérique tout en entremêlant un pan de son histoire familiale. Les jeux de mots sur les animaux sont bien trouvés et les illustrations mettent chacun d’eux en valeur: sirénours, fraisans, colibellules, hérisseuils, chimpantères, etc. Un seul petit bémol: le récit aurait eu avantage à être resserré. C’était un tantinet trop long. N’en demeure pas moins que c’est une histoire inspirante, servie par un graphisme poétique qui fait la part belle à l’imaginaire, à la filiation et aux souvenirs. Les amoureux de la nature en auront pour leur bonheur.