L’âme sœur d’Agnès Karinthi chez L’Astre Bleu Éditions
En 1995, leur relation s’était arrêtée net suite au déménagement de la famille de Philippe. La vie d’Anne quant à elle, a été bouleversée par un accident de voiture dans lequel elle a perdu son père, sa sœur et la mémoire. Depuis, elle s’est construite sur ce qu’on a bien voulu lui dire sur sa vie d’avant. Le moins que l’on puisse dire est qu’elle ne sait pas grand-chose. Pour sa mère, toute la période précédant le drame est mystérieusement tabou.
Philippe est le seul qui peut la faire renouer avec son passé évanoui.
« Tu n’imagines pas ce que je ressens, Maman. Ma vie a commencé quand j’avais neuf ans, au milieu des blouses blanches de l’hôpital. Avant, c’est le trou noir. J’ai perdu ma sœur. Nous devions être très proches, mais je ne le sais pas. J’ai perdu mon père. Il devait être le plus merveilleux des papas, mais je ne me rappelle pas. J’ai perdu mes camarades de classe. Ce devait être une super classe, puisque vingt ans après, il y a un certain Philippe qui débarque chez moi dans le but de refaire connaissance. Mais comment savoir ? Quand le ciel nous est tombé sur la tête à toi et à moi, tu m’as coupée de mon passé. Je me suis construite sur du néant. Aucun repère…À part toi , bien sûr. »
Touchée par la gentillesse de Philippe et par son amour intact, Anne le laisse entrer dans sa vie. Il lui permet de reprendre contact avec la petite fille qu’elle était. Si vous vous attendez à un roman d’amour à l’eau de rose, je vous arrête tout de suite .
Très vite, l’amour du jeune homme devient envahissant, oppressant, exclusif. Il la coupe petit à petit du monde qu’elle s’était construit. La jeune femme essaie de mettre les choses au point .
« J’ai besoin de temps. J’ai besoin de m’acclimater à toi, de prendre conscience des sentiments que je crois avoir pour toi. On dit que l’amour engendre la souffrance. Je veux vivre le manque suscité par l’absence, le creux au fond de l’estomac à la pensée de l’être aimé. Je me dois de connaître tout ça. Comment pourrais-je vivre cette expérience si tu es tout le temps à mes côtés, dans mon appartement. »
Dans ce roman, le lecteur est en permanence sous tension. Le comportement des parents respectifs des deux enfants en 1994 et leur réaction de nos jours en apprenant que Philippe a repris contact avec Anne laissent supposer de lourds secrets.
Avec L’âme sœur, Agnès Karinthi signe un véritable thriller psychologique. La construction de l’intrigue basée sur l’alternance entre passé et présent fait monter le suspense au fil du roman. Je l’ai lu d’une traite et je ne peux que vous le recommander. J’avais déjà beaucoup aimé le premier roman de l’auteure, Quatorze appartements, mais celui-ci est encore plus abouti.