Philippe Ségur, né en 1964, est un juriste et écrivain français. En 1980, il soutient une thèse de droit sur les relations entre le temps et le pouvoir politique. En 1994, il devient agrégé des facultés de droit et aujourd’hui il enseigne le droit constitutionnel et la philosophie politique à l'université Perpignan. Vacance au pays perdu date de 2008.
Le narrateur, graphiste publiciste dépressif et végétarien décide de s’octroyer une semaine de vacances à l’étranger, sans sa famille mais avec son meilleur copain, avocat de son état : son but, faire un break pour fuir la société de consommation. Après hésitations, son choix se porte sur l’Albanie !
Avant même d’ouvrir le livre - si vous ne connaissez pas l’humour de l’écrivain - le terme « vacance » au singulier devrait vous interpeler comme on dit aujourd’hui. Vacances avec un « s » signifie congés, ce qu’en général on associe à des pensées positives, alors qu’à l’inverse sans ce « s », on pense au vide ou au manque… et vous l’avez compris, nous sommes dans ce cas de figure.
Nos deux lascars, dont on ne connait pas les noms, l’avocat étant appelé « mon cricri » tout au long du roman par le narrateur, vont donc s’embarquer dans un périple digne de Bouvard et Pécuchet, dans ce pays si proche de nous géographiquement parlant, mais si lointain aussi à les en croire, et j’espère que l’auteur parle en connaissance de cause car sinon ce ne serait pas très gentil pour les Albanais (« L’Albanie était une tragédie permanente »).
Les deux gars en vadrouille vont cumuler tous les problèmes liés à l’exotisme, une langue inconnue et incompréhensible pour eux d’où quiproquos, erreurs etc., des infrastructures locales en piteux état (modes de transports, hôtels, restaurants où la nourriture n’est pas à la hauteur de leurs espérances, etc.). Le « cricri » se prétendant voyageur expérimenté, tente toujours de communiquer avec les locaux dans un sabir mêlé d’espagnol ( !) qui ne donne que de piètres résultats mais qu’un hasard heureux compense allégrement.
Tout cela est gentiment amusant, dans le genre humour pince-sans-rire. La scène du raki, bien que trop longue, évoque la fameuse séquence alcoolisée des Tontons flingueurs. Un roman sympathique, assez court pour ne pas finir par tourner en rond, mais du Philippe Ségur car au-delà de l’angle amusant du récit, pointe la critique sociale : ces bobos voulant rejeter notre type de société, partant fleur au fusil vers des ailleurs qui seraient plus « vrais » mais qui bien vite peinent à se passer des avantages perdus.