Une délicieuse « Cherrie Pie »
Nadia (assise dans mon salon, savourant sa bouchée): Hum… Délicieuse ! C’est une recette que tu as créé.
Moi (surprise et déposant une assiette face à Catherine): Non. C’est une tarte qui fait référence à la série Twin Peaks. Tu connais Twin Peaks, n’est-ce pas ?
Nadia (ne faisant pas attention aux signes désespérés de Catherine): Non. C’est une nouvelle série sur Netflix ?
Moi (les yeux brillants et prenant la télécommande): Non, pas du tout. C’est une série culte de David Lynch. Je vais mettre le film « Twin Peaks: Fire Walk with Me » qui est le préquelle. Tu vas adorer…
Catherine (envoyant un message à son petit ami Liam): Bloquée chez Klo. C’est le retour des « soirées Twin Peaks ».
AUTEUR: Robert Jackson Bennett
TITRE: AMERICAN ELSEWHERE
ÉDITEUR, ANNÉE: Albin Michel Imaginaire, 2018
NOMBRE DE PAGES: 784 pages
Il y’a quelque temps, j’ai eu l’opportunité de lire un des premiers romans de la nouvelle collection « Imaginaire » d’Albin Michel. C’est donc en me rappelant avec gourmandise de la Cherrie Pie que je vous présente: « American Elsewhere » de Robert Jackson Bennett.
Résumé:
« Un merveilleux cadeau pour les fans de Stephen King et Neil Gaiman. » Library Journal Veillée par une lune rose, Wink, au Nouveau-Mexique, est une petite ville idéale. À un détail près : elle ne figure sur aucune carte. Après deux ans d errance, Mona Bright, ex-flic, vient d y hériter de la maison de sa mère, qui s est suicidée trente ans plus tôt. Très vite, Mona s attache au calme des rues, aux jolis petits pavillons, aux habitants qui semblent encore vivre dans l utopique douceur des années cinquante. Pourtant, au fil de ses rencontres et de son enquête sur le passé de sa mère et les circonstances de sa mort (fuyez le naturel…), Mona doit se rendre à l évidence : une menace plane sur Wink et ses étranges habitants. Sera-t-elle vraiment de taille à affronter les forces occultes à l oeuvre dans ce lieu hors d Amérique ? »
Parfois, vous avez une bouffée de nostalgie grâce à la senteur d’un parfum, à la vue d’une photographie ou en visitant une rue où vous vous rendiez souvent autrefois, ou bien à la saveur d’un aliment… Bref ! Ces doux souvenirs peuvent surgir par différentes manières. Pour moi, elle peut surgir à cause d’une ambiance… Bien particulière…
C’est celle de ses histoires de petites villes tranquilles, à tous points parfaits et où les familles peuvent y élever leurs enfants en toute sécurité… Mais, lorsque l’on gratte cette couche de perfection, on y décèle plusieurs secrets sordides et pires encore. J’étais friande de ce genre de récit que je découvrais plus jeune dans des séries tels que la « Quatrième dimension », « Twin Peaks » ou en me plongeant avec délice dans les romans de Stephen King. C’était un de mes « petits instants de bonheur » qui me faisait croire qu’au delà de la réalité, pouvait se cacher des choses, lieux ou entités encore inconnu de l’Homme. Oui, je vous l’avoue, mon imagination était en pleine ébullition à ces instants !
Alors, lorsque j’ai débuté le roman « American Elsewhere » et que j’ai laissé l’auteur me conduire, en compagnie de son héroïne Mona, dans la ville de Wink, un grand sourire est né sur mes lèvres.
Lorsqu’une maison d’édition cite Stephen King, Lovecraft, Neil Gaiman, Dean Koontz ou autres comme grandes références pour un roman sorti, j’ai tendance à le prendre avec des pincettes. Malheureusement, on a plus souvent droit à une déception qu’à autre chose…. Mais pas avec ce roman !
Une maison dans le Nouveau-Mexique… Mona apprend avec stupeur, après les obsèques de son père, qu’elle hérite d’une maison appartenant auparavant à sa mère, morte lorsqu’elle fut petite. Et si cela n’était pas suffisant, la jeune femme a bien du mal à retrouver la ville de Wink sur une carte actuelle. Après plusieurs recherches, elle la trouve enfin et se rend sur les lieux. Certes, elle n’arrive pas au meilleur moment, mais cette petite ville qui semble couper de tout, a un petit charme vintage et semble être la bonne occasion pour reprendre sa vie en main. Et puis, Mona pourra peut-être en savoir plus sa mère… Mais voilà, à travers ce semblant de tranquillité, Wink se révèle plein de secrets… De terribles secrets…
« American Elsewhere » est un roman d’ambiance. L’auteur prend son temps pour mettre en place ses personnages ainsi que l’intrigue. Le rythme est bien fluide, car il arrive à ponctuer son récit d’événements inattendus et de « petites fissures » qui nous dévoilent peu à peu ce que cachent Wink et le lien qui l’unit à la mère de Mona. Mais il est aussi à souligner qu’il y’a quelques passages dont on aurait bien pu s’en passer en raison de leur manque d’intérêt pour l’intrigue.
Malgré cela, vous aurez cette sensation de rentrer, à votre tour, dans cette ville et de ressentir un trouble face à l’attitude de ses habitants.
L’attraction que vous allez ressentir pour cette ville n’est pas le seul point positif. Mona, l’héroïne, est une jeune femme touchante, téméraire, agile, sûre de soi mais avec une part de fragilité en raison d’événements personnels. On prend plaisir à la suivre dans cette étrange péripétie. Et nous sommes, tout comme elle, déconcertés par la ville de Wink, mais épris par la curiosité de découvrir ce qui se cache. Quant aux autres personnages, ils ont tous un rôle important dans la continuité de l’intrigue et ne sont pas de « simples figurants » que l’on oublie dès la page tournée.
Pour finir, les lecteurs habitués à ce genre de romans d’ambiance où la frontière de notre réalité semble bien plus perméable à ce que l’on pourrait penser, vous aurez plaisir à y déceler des petites références à des auteurs tels que King et Lovecraft, mais aussi à des films ou séries. Je vous avoue que tous ces petits éléments ont renforcé ma petite bulle de nostalgie où je me complaisais à m’y blottir.
Je précise tout de même, pour ceux dont se seront les premiers pas dans ce genre, « American Elsewhere » est un bon roman pour débuter et qui, j’espère, vous donnera la curiosité de vouloir découvrir les auteurs qui ont inspiré Robert Jackson Bennett.
Conclusion:
Avec « American Elsewhere », Albin Michel marque d’un grand coup l’arrivée de sa collection « Imaginaire ».
Bien qu’il soit un roman d’ambiance, ce qui peut freiner certains, car l’auteur prend son temps pour bien mettre en place son intrigue et que quelques révélations arrivent un peu trop tôt selon moi, le récit ne reste pas moins palpitant et vous allez être soufflés par le final titanesque qu’il nous a réservé.
Entre fantastique, science-fiction et policier, je vous invite à faire un tour dans la ville de Wink… A vos risques et périls.
Pour ma part, je vais continuer à prolonger cette sensation de nostalgie en me plongeant de nouveau dans « Twin Peaks ».
(Image à la une de Kurt Hugging )