Taxi de Carlos Zanón

Par Isa S.

Éditeur : Le livre de Poche
Parution : 06/09/2018
Nombre de pages : 415
Genre : littérature espagnole

L'auteur :


Carlos Zanón est né à Barcelone en 1966. Il est poète, romancier, scénariste et critique littéraire. Soudain trop tard, paru chez Asphalte en 2012, a remporté le prix Brigada 21 du meilleur premier roman noir. Il est également l'auteur de N'appelle pas à la maison (2014)  et J'ai été Johnny Thunders (2016). Ses livres ont été traduits et publiés aux Etats-Unis, en Italie, aux Pays-Bas et en Allemagne.
Quatrième de couverture :
"Il faut qu'on parle", annonce un matin Lola à son mari Sandino, chauffeur de taxi. " Ce soir, à mon retour ", répond celui-ci, avant de se laisser absorber par la ville. Et il ne rentre pas, entamant une odyssée de sept jours et six nuits, travaillant sans relâche pour éviter cette discussion fatidique, car il le sait : sa femme, lasse de ses infidélités, veut le quitter. Sandino l'insomniaque parcourt Barcelone et les clients défilent, tous pénitents dans son taxi-confessionnal. Dans cette fuite vers l'avant, il tâche de venir en aide à sa collègue Sofía et à son ami Ahmed, mais ce faisant, c'est lui-même qu'il va mettre en danger. Avec ce roman total, Carlos Zanón montre de nouveau son pouvoir narratif en mettant en scène des personnages justes, complexes, humains.

Mon avis : 


« Qu'importe le miroir, seul compte le reflet.L'impunité de mentir à un étranger. Ce n'est rien d'autre que l'art du mensonge pour le mensonge. Le chauffeur de taxi ne te crois pas, et toi, tu ne le crois pas non plus. La ville défile tout autour de toi, qui es enfermé dans ce bathyscaphe, derrière des vitres sur lesquelles défilent des fonds d'écran que tu connais par cœur, qui ne font plus partie de ta réalité et qui montrent toujours des endroits paumés.Sandino veut croire que la plupart des choses qu'on lui raconte ou qu'il entend sont des mensonges. Il veut le croire. Parce ce que si c'est la vérité, alors c'est effrayant. »


Comment continuer à avancer quand on est désabusé par le morne quotidien d'une vie que l'on n'a pas choisi ? Sandino déteste conduire. Pourtant, il s'est retrouvé chauffeur de taxi tout comme son père et son frère avant lui, en dépit de ses rêves de grandeur. A cause de la crise. Pour gagner honnêtement sa vie à défaut de la vivre pleinement. Alors, pour s'offrir un peu de piment et d'évasion, Sandino multiplie les conquêtes féminines, quitte à se brûler les ailes au feu de passions éphémères qui ne sont pas du goût de sa légitime épouse. Arrive le jour où cette dernière lui dit : "Sandino, il faut qu'on parle". Inutile d'être fine mouche pour deviner ce que sa femme veut lui annoncer. Alors il prend la fuite. Ce récit nous raconte les sept jours d'errance pendant lesquelles il va multiplier les bourdes et s'enfoncer dans le pétrin, en voulant fuir la réalité et jouer les bons samaritains pour aider une collègue qui se trouve en fâcheuse posture après avoir essayé de berner des malfrats. Sandino va apprendre à ses dépens qu'il est dangereux de confondre la vie réelle avec un film de Tarantino...
Tout comme dans le féroce "N'appelle pas à la maison", Carlos Zanón nous entraîne dans l'univers trash et désespéré de losers invétérés qui cherchent en vain la lumière et la rédemption dans les bas-fonds de Barcelone. Fidèle à son style narratif percutant, sans fard ni fioritures, l'auteur nous livre une épopée urbaine plutôt bien rythmée qui oscille habilement entre action et réflexion. En bref, un très bon moment de lecture qui confirme ma première impression sur les écrits du señor Zanón : une savoureuse plume noire à suivre de très près...