Au lendemain de la révolution iranienne de 1979, et jusqu’à nos jours, ce roman suit plusieurs personnages, plusieurs générations, autant de portraits dont la vie a été marquée par les soubresauts de l’histoire, dont les destins s’entrecroisent et se répondent.
Il y a Omid, Sara, Neda ou Forugh, bébés ou jeunes enfants enlevés à leurs mères, voire nés dans les prisons où leurs mères sont enfermées, où leurs pères sont morts, condamnés pour leur soif d’une société plus juste, pour leur activisme politique. Elevés par leur grand-mère Zinat et leur tante Leila qui a renoncé à son grand amour et à ses rêves pour endosser le rôle de mère de substitution, ils ont grandi protégés de la violence.
Certains sont restés en Iran d’autres ont pu émigrer et ont quitté ce pays qui a tant fait souffert leurs parents. Tous tissent avec l’Iran des rapports singuliers, faits d’amour et de haine, entremêlés comme les branches du jacaranda, souvenir olfactif de la maison familiale.
Lorsqu’ils se retrouvent autour de Zinat dont la vie s’achève, les souvenirs affluent, les douleurs, les grands malheurs et les petites joies aussi, les souvenirs ravivent les blessures. Mais ces jeunes-là nous parlent aussi d’un autre Iran, d’une génération qui a grandi sur les débris, les rancoeurs, les peurs de leurs aînés et qui, comme eux, aspire à un futur meilleur.
J’ai beaucoup aimé cette saga familiale en même temps qu’historique, qui revient sur des épisodes historiques tragiques, qui nous présente l’Histoire à travers les histoires d’individus, qui humanise les protagonistes d’un système déshumanisant.
Toute la sensibilité de l’auteure est perceptible dans son écriture subtile, qui donne à sentir la profondeur des sentiments, des douleurs, des combats, des convictions et des luttes. On y découvre toute la noirceur d’un régime totalitaire, l’impact sur les vies ordinaires. Sarah Delijani, qui s’est inspirée de sa propre histoire, donne ainsi la parole à tous ces anonymes qui l’ont vécu, qui ont souffert, revenant sur un passé familial illustrant celui de milliers d’autres familles, touchées à leur manière, et dont les répercussions touchent toujours les générations actuelles.
Une fresque bouleversante, qui m’a beaucoup émue.
Sarah Delijani est une romancière irano-américaine.
Les jacarandas de Téhéran est paru chez Albin Michel en avril 2014 (19,50€).