EMPRUNT MÉDIATHÈQUE
► Titre : Le Maître du Haut Château
Titre original : The Man in the High Castle Auteur : Philip K. Dick
Traductrice : Michelle Charrier Sorti en octobre 1962 Lu en novembre Editions J'ai Lu Genre : Science-fiction (uchronie)
► 4 eme de couverture :
En 1947 avait eu lieu la capitulation des alliés devant les forces de l'axe. Cependant que Hitler avait imposé la tyrannie nazie â l'est des Etats-Unis, l'ouest avait été attribué aux japonais. Quelques années plus tard la vie avait repris son cours normal dans la zone occupée par les nippons. Ils avaient apporté avec eux l'usage du Yi-King, le livre des transformations du célèbre oracle chinois dont l'origine se perd dans la nuit des temps. Pourtant, dans cette nouvelle civilisation une rumeur étrange vint à circuler. Un homme vivant dans un haut château, un écrivain de science-fiction, aurait écrit un ouvrage racontant la victoire des alliés en 1945...
Philip K. Dick est un auteur que j’avais déjà lu et chroniqué sur le blog, en 2015 et en anglais. J’avais beaucoup apprécié la version bilingue de Minority Report, un premier pas au cœur de l’univers de la science-fiction, un genre que j’aime et de plus en plus et que je prends plaisir à explorer. Je suis, par hasard, tombée sur ce livre à la médiathèque, c’est d’abord sa couverture qui m’a interpellé avant de me souvenir qu’un ami m’avait conseillé ce livre il y a plus de 5 ans… Je finis souvent par lire les titres que vous me conseillez, mais bien des années plus tard, ne désespérez pas les amis.
Avec Le Maître du Haut Château, l’auteur nous propose une uchronie, le topo est assez simple : les Allemands ainsi que les Japonais sont les vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale, rien que cela. J’avoue que c’est intrigant, que l’on a envie de connaître les tenants et les aboutissants d’un monde dans lequel la France et ses alliés auraient perdu la guerre, toutefois… je vous le dis de suite, je ressors très mitigée de cette lecture, un goût âpre et douteux dans la bouche, comme une sensation de malaise grandissante et persistance. Je trouve ce livre beaucoup trop complexe pour être agréable, la lecture est immédiatement rendue plus compliquée que nécessaire, ce qui n’a pas facilité mon immersion, loin de là.
Le roman a, semble-t-il, été adapté en série depuis peu « The man in the high castle » ou la bande-annonce que l’on exècre sur Twitch car elle est synonyme de pub interminable. J’espère sincèrement que la série est beaucoup plus accessible que le livre en lui-même, que les réalisateurs ont fait le choix de la simplicité sans pour autant dénaturer les messages. Même si je garde un sentiment plus que mitigé ainsi qu’une certaine réserve quant au roman de K. Dick, je suis tout de même curieuse de voir ce que cela peut donner sur petit écran… Sans doute est-ce la fan de lecture qui parle, la fille qui aime à comparer les adaptations.
« Ce qu’ils ne comprennent pas, c’est l’impuissance de l’homme. Je suis faible, petit, je ne compte pas dans l’univers. On ne m’y remarque pas ; je vis sans être vu. Mais pourquoi est-ce mal ? N’est-ce pas mieux ainsi ? Celui que les dieux remarquent, ils le détruisent. Soyez petit… et vous échapperez à la jalousie des grands.
Pour être totalement franche, je trouve que les personnages de ce récit sont presque insipides, sans réelle profondeur, comme si l’auteur n’avait pas pris le temps de creuser leur personnalité. L’attachement au moindre d’entre eux est quasi impossible, les émotions sont absentes, ne subsiste qu’un goût de trop peu, une sensation de manque que l’histoire ne parvient pas à combler. Les personnages sont multiples, peut-être trop, cela disperse l’attention, sème la confusion dans l’esprit du lecteur. Entre les noms à consonance japonaise, allemande, américaine et même juive, il apparaît compliqué de se souvenir de tout, de mettre des visages sur chacun d’entre eux, c’est ce que je déplore…
Lire Le maître du haut château s’avère être un exercice éprouvant, nécessitant une grande concentration pour finalement… Finalement me laisser sur ma faim. C’est éprouvant d’une part car l’histoire part dans tous les sens, je ne savais plus où donner de la tête, et d’une autre part car la plume de l’auteur est certes très riche, mais surtout excessivement compliquée. Le style de Philip K. Dick est ici beaucoup trop lourd, pesant et donne l’impression de lire un pavé alors qu’il n’en est rien. Le ton employé semble beaucoup trop grave et sérieux, alourdissant encore le récit qui s’éternise, encore et encore… Je n’étais plus animée que par une seule envie : enfin finir ce livre, je voulais connaître le fin mot de l’histoire afin d’être en mesure de juger ce livre dans sa globalité.
Plusieurs fils rouges viennent alimenter ce récit, parvenant tant bien que mal à capter mon attention. Je peux par exemple citer le livre Le poids de la sauterelle dont il est question, à de multiples reprises dans le livre. Nous avons en effet un jeu de mise en abyme, l’auteur de ce best-sceller ayant lui aussi écrit une uchronie, et si la France et ses alliés avaient gagné la guerre… Un petit jeu intrigant mais assez vite agaçant, comme si l’auteur se projetait lui-même dans le livre, un moyen d’évoquer une partie de sa propre histoire peut-être ? Toujours est-il que le procédé ne m’a pas totalement convaincu, loin de là.
Abordons maintenant quelques aspects plus réjouissants, car oui, il y en a. Ce livre traite de thèmes passionnants tels que l’Histoire ou encore le faux. Au fil de la lecture, nous avons l’impression que certaines choses ne sont que des illusions, des prétextes destinés à nous faire douter, à pousser toujours plus loin notre réflexion sur le vrai et la valeur que nous accordons aux objets historiques. Il est question d’historicité, un terme que je ne connaissais pas mais qui va être ici au cœur de quelques intrigues. L’auteur exploite notamment ce sujet par le biais des bijoux et des contrefaçons, de ce marché noir qui fait douter plus d’une personne. On sent une certaine volonté de rendre hommage à l’Asie en général, à la mentalité et manières des Asiatiques.
« Nous vivons dans un monde psychtique.
Les fous sont au pouvoir. Depuis quand en avons-nous la certitude ?
Depuis quand affrontons-nous cette réalité ? Et... combien sommes-nous à le savoir ? »
L’auteur ne manque pas d’idées et d’inspirations, c’est le moins que l’on puisse dire. De très nombreuses pistes sont explorées, empruntant pour cela des chemins dérivés, nous permettant de comprendre que les personnages sont liés entre eux mais je ne se rencontreront jamais. C’est un brin frustrant je dois le reconnaître. Chacun semble jouer un rôle sans le savoir, membres d’une machination géante dont seul l’auteur connaît l’issue finale. Ce sont deux visions qui s’opposent et parfois se rejoignent, un étau qui se referme progressivement… Le Japon et l’Allemagne. Réels vainqueurs ? Qu’en est-il en vérité ? De l’autre côté, les États-Unis sont divisés en trois..
Il y a énormément de choses, d’éléments en superposition dans ce livre, quelques explications annexes nous sont fournies par une personne extérieure ; c’est appréciable mais on se sent un peu bête et j’avoue que les détails et précisions énoncées ne m’ont pas totalement convaincue, je reste sceptique. Toujours est-il que je n’ai pas réussi à m’attacher à qui que ce soit, les personnages se perdaient en considérations et en manières, ce qui a eu le don de m’agacer plus qu’autre chose. J’ai le sentiment que l’auteur a voulu en faire trop, que ce livre n’est pas assez épuré, provoquant une sensation de longueur et ne permettant pas une immersion totale.
En définitive, malgré un contexte et une époque qui me parlaient, je n’ai finalement pas été transporté par l’histoire. Je suis restée en surface, incapable de plonger totalement au coeur du récit. Je voulais à tout prix connaître le fin mot de l’histoire, mais je reste malheureusement sur ma fin. Une fin qui d’ailleurs retourne le cerveau et laisse de trop nombreuses questions en suspens. Je reconnais que les thèmes abordés sont passionnants, que l’intrigue est complexe, mais sans doute trop compliqué pour que je l’apprécie. La plume de l’auteur est certes recherchée mais beaucoup trop lourde, brisant le rythme de la lecture. Je ressors donc plus que mitigée et pas du tout convaincue par ce titre, là où j’avais adoré Minority Report. J’espère sincèrement l’adaptation en série Du Maître du Haut Château est accessible que le livre. Un rendez-vous manqué pour moi, cela fait partie du jeu de la lecture.
► 3 raisons de lire Le Maître du Haut Château :
- Un livre adapté en série depuis peu
- Un univers très riche
- Une uchronie sur la seconde guerre mondiale
Pour pouvez vous procurer cette uchronie ici