Inhumaine : Retour aux sources
Roseau déposa le petit paquet sur le bureau. Une tache de sang auréolait le tissu grossier. La jeune fille songea avec un frisson qu’il ne faisait pas bon devoir de l’argent à Hicham. Un certain gratte-papier du palais l’apprendrait bientôt à ses dépens.
Edité chez Edition du 38, Inhumaine est le dernier roman de Sophie Moulay dans la collection du Fou. Lu dans le cadre du Prix Sirius SF dont je fais partie en tant que membre du jury, le roman fait partie de cette mouvance post-apocalyptique sur fond d’écologie.
Roseau est une jeune femme encore adolescente évoluant dans notre monde après que ce dernier est vécu un cataclysme. L’eau qui ne cessait de monter à un jour entièrement ravagé le monde pour détruire entièrement les continents de l’Hémisphère nord et les Européens ont du fuir vers l’Afrique, seul continent à avoir survécu. Le flux migratoire devient important et les dominances s’inversent. L’homme noir détient le pouvoir et asservi le blanc. Ces derniers ne sont plus alors que des domestiques sans droits.
Derrière ce contexte, se développe toute une quête initiatique pour Roseau qui revient sur ses origines et son histoire. Elle rencontre un jeune poète du nom de Cicade ayant le vers Doré. Petite pointe d’humour dans ce roman très sérieux axé young adult qui m’aura fait tiquer. Le young Adult est la dénomination littéraire qui me dérange le plus et qui souffre à mon sens de certaines facilitées dont Inhumaine met les deux pieds dedans. Parce qu’en effet, Inhumaine n’a pas été une expérience littéraire que je retiendrais.
Premier souci, le contexte. Derrière un contexte qui aurait pu être intéressant à développer, surtout dans un roman qui porte un message écologique, Inhumaine peine à rendre crédible son histoire. C’est dommage, car d’une certaine manière, ce roman est presque de l’anticipation à l’heure où la planète nous fait clairement comprendre qu’il y a un problème. C’est à mon sens la partie qui aurait pu être le plus intéressant ! La trame scénaristique, est quant à elle trop prévisible. J’ai très vite retrouvé toutes les mécaniques du Young Adult que j’ai déjà pu voir avec le roman qui fait désormais la base du genre : Hunger Games. On retrouve cette héroïne à peine sorti de l’adolescence qui essaye de sauver le monde tout en faisant face à son mal adolescent. Un passage en particulier m’aura fait lever les yeux au ciel tellement je m’y attendais.
Pourtant, le roman est loin d’être mal écrit avec un vocabulaire riche et ciblé à son univers avec des passages très intéressants (je pense entre autres à la découverte de ruine du monde ancien), mais tous ces ingrédients mal ficelés et faciles m’auront donné une sensation de travail bâclé sans grande originalité. J’ai pourtant apprécié cette idée d’inverser les dominances et de faire comprendre aux Blancs que leur comportement avant la catastrophe était vraiment cruel, mais encore une fois, c’est juste une ligne dans le roman. Ligne qui m’a plus donné l’image d’une l’autrice qui voulait juste être dans cette mouvance « ouverture d’esprit » sans être vraiment d’accord avec l’idée que tout Homme est égal.
Ça me dérange beaucoup de devoir dire autant de choses négative dans un roman nominé pour un prix, mais je suis le plus sincère possible concernant mon ressenti et ce ne fut vraiment pas une bonne expérience de lecture. À trop vouloir surfer sur une tendance sans apporter quelque chose de novateur, on se casse les dents.
En conclusion, c’est un livre malheureusement déjà vu pour moi avec un contexte mal exploité malgré la possibilité de faire quelque chose de vraiment pousser et trop proche d’un Young Adult pour que je puisse vraiment l’apprécier.
Edition du 38
268 pages
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Lu dans le cadre du Prix Sirius SF 2019