Chronique « PARIS 2119 »
Scénario de ZEP
Dessin de Dominique BERTAIL, couleurs de Dominique BERTAIL & Gaëtan GEORGES
Public conseillé : Ado / Adultes
Style : Anticipation
Paru le 23 janvier 2019 aux éditions RUE DE SÈVRES,
82 pages couleurs
17,00 euros
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Ça commence comme ça…
Paris 2119. Un jeune homme, Tristan Keys, s’enfonce dans une bouche du Métro parisien. Scanné par un drone, il lui fait un doigt d’honneur et monte dans une rame. Il apprécie tout de ce moyen de transport antique. L’obscurité, l’odeur de caoutchouc brûlé, plus personne ne se déplace comme ça, à part quelques touristes.
A côté de lui, une vieille femme, les yeux hagard, l’air d’une droguée, s’assoit. Arrivé à destination, il sort du métro, se retrouvant à l’air libre, marche encore un peu dans une alternance de pluies et de zones ensoleillées et arrive enfin chez son amie. La belle et élégante Kloé se jette sur lui, pour lui faire l’amour.
Après ce moment récréatif et agréable, Kloé lui apprend qu’elle va voyager pour raison professionnelle sous peu. Tristan, lui, doit rencontrer une éditeur, pour qui il écrit des ??…
Ce que j’en pense
Fidèle à son orientation, chez “Rue de Sèvres”, Zep, le créateur de “Titeuf” nous propose une nouvelle histoire à destination des adultes, sur fond de réflexion personnelle et futuriste. Le cadre de son nouveau récit est clairement affiché dans le titre, Zep nous embarque dans un récit d’anticipation à Paris, en 2119. Dans ce futur pas si lointain, la météo est pluvieuse en permanence, le contrôle des individus est omniprésent (des drones scannent le moindre de vos gestes) et les gens ne se déplacent plus physiquement. A la place, la société “Transcore” a mis la téléportation à la porté de tous. Pour un mini déplacement dans la ville, comme pour un voyage à l’autre bout du monde, Transcore est là, rendant les individus totalement dépendants et fainéants.
Dans ce futur plutôt sombre, le jeune Tristan Keys ne semble pas se plaire. Nostalgique, il prend encore le vieux Métro parisien et marche dans les rues. Au fil de ses pérégrinations, Tristan devient le témoin d’événements mystérieux. Il croise la même personne en plusieurs endroits, et se lance dans une enquête au sujet de ce “dédoublement”. Comment est ce possible ? “Transcore” est-il d’une manière ou d’une autre impliqué ? Sans en dire plus, sachez que Zep s’interroge sur l’humanité. “Identité réelle” et “double numérique”, comment faire la différence ? Au milieu de cette vision sombre de notre futur, avec un brin d’humeur (très légers et visuel), Zep porte un message contemporain et “moral” sur la perte d’humanité qui nous pend au nez…
Au côté de Zep, c’est Dominique Bertail au dessin qui assure une superbe réalisation. S’accaparant le récit de son compère, il nous immerge dans un Paris futuriste protéiforme aussi beau que sale. Un peu à la façon de “Brazil” (Terry Gilliam, 1982), il re-travaille à sa sauce des lieux connus, mélange improbable de cartes postales et de bas-fonds glauques. L’ambiance immersive et épurée qui s’en dégage est glaciale. Entre le traitement graphique et la mise-en-couleur (de Dominique Bertail & Gaëtan Georges), cela m’a fait fortement penser à Enki Bilal (une belle référence !).
Seul ombre au tableau, une fin tellement ouverte qu’elle ne ressemble pas à une fin. Peut-être est ce la marque d’une suite potentielle…
Cette chronique fait partie de la « BD DE LA SEMAINE ». Réunion chez Stéphanie, cette semaine.