Après Dept H. ( Futuropolis) et Du Sang Sur Les Mains (Monsieur Toussaint Louverture), et en attendant son chef d'œuvre Mind MGMT, Matt Kindt continue d'avoir la cote avec Grass Kings qui se fait une place sur les étales françaises. Pour ce nouveau titre " creator owned ", il est accompagné aux dessins par Tyler Jenkins, et nous ouvre les portes d'une ville pas comme les autres.
Pour nous mettre dans l'ambiance, le récit commence par décrire les événements qui, tout au long de l'Histoire, ont émaillé le terrain où se trouve Grass Kingdom. On se rend vite compte ce lieu a été la scène de nombreuses guerres et son passé est sanglant. Il n'est donc pas étonnant, qu'on apprenne au détour d'une ballade en voiture que les habitants de la ville vivent en autarcie, en essayant au maximum de limiter le contact avec les villes mitoyennes. Au moyen de balles s'il le faut.
Grass Kingdom est une ville gérée par trois frères, en guerre à peu près ouverte avec Cargill, une ville voisine qui lui rend bien. Tout au long du premier chapitre, Matt Kindt nous promène dans la ville et nous montre son fonctionnement, son histoire et l'ambiance qui y règne, collaborative et fraternelle. L'animosité avec leurs voisins est montrée grâce à l'incursion d'un habitant de Cargill. Sans nous le dire explicitement, il semble y avoir des secrets et le passé à son importance.
Parmi les personnages présentés, celui qui a toute son importance est Robert, le frère qui dirige officiellement la ville. Son passé est lourd et il n'est plus l'homme qu'il était. Complètement déprimé et alcoolique en début de chapitre, Kindt va faire de Robert un personnage majeur de son histoire. Et ce en mettant en parallèle le passé avec un événement qui va faire basculer la vie des habitants de Grass Kingdom.
Matt Kindt livre un récit plein d'actions, de mystères et de violence. Son histoire est tout sauf manichéenne, tous ses personnages ayant leur lot de noirceur. Ce premier tome se lit d'une traite, avec une histoire captivante bourrée de rebondissements. Il laisse aussi çà et là des indices sur une histoire sous-jacente qui est très prometteuse. Ce polar dans l'Amérique coupée du monde est très réussi et immersif.
Si la lecture est bonne, la partie graphique n'est pas en reste. Avec son trait atypique, Tyler Jenkins ne cherche pas à faire un résultat parfait, mais son dessin est beau. Que ce soit les paysages ruraux, les scènes d'action ou encore les moments plus calmes, le dessinateur est à l'aise dans toutes les situations. Sa narration est claire, ses personnages plein de vie et sa colorisation à l'aquarelle donne un charme supplémentaire au titre. Clairement, il donne une identité visuelle forte au titre, qui rend Grass Kings original. L'édition de Futuropolis lui rend vraiment justice, comme d'habitude avec cet éditeur. Encore un bon point pour ce tome !