école des loisirs - janvier 2019 - 192 pages
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Jeff et son frère Norbert trouvent un fugitif dans leur cave. Un homme très étrange qui semble être traqué... " Norbert ne m'a pas menti : sa peau est d'une blancheur surnaturelle. Son visage n'exprime rien : ni colère, ni effroi, ni tension, ni surprise. " Il ne sait parler autrement qu'en faisant claquer sa langue. Pourquoi cet homme s'est-il réfugié ici ? Est-ce un migrant ? Un malade mental échappé d'un asile ? Un criminel en cavale ?
Norbert se lève tôt tous les matins et enfourche son vélo sans que personne ne sache où il va. Le père est au chômage, il ne se lève qu'à midi et ne fait rien de ses journées. La mère trime toute la journée dans un immense entrepôt pharmaceutique. L'immeuble dans lequel ils vivent sera bientôt évacué ; il est voué à la destruction, dans le cadre de la rénovation de la cité. Il sera dynamité à la fin de l'été. Pour soutenir les habitants, un atelier d'écriture est organisé, où chacun dépose des mots sur ce qu'il ressent face à l'imminence de la destruction et de la restructuration du quartier.
Jeff évolue dans un quotidien morne, où la violence des mots est aussi prégnante que celle des coups. Chômage, misère, petits trafics et harcèlement ne sont jamais loin. Et cette image qui le hante : ses parents plantés devant la télévision, le regard vide... Jeff se sent différent d'eux ; il ne se reconnaît pas dans sa famille - cette famille dont le climat me rappelle celui de Comment tout a commencé.
Sa rencontre avec l'étranger va lui apprendre des choses sur son frère, sur ses parents. Il va les voir sous un nouvel angle. Finalement, il suffit de l'irruption d'un étranger dans sa vie pour que la révélation de ce qu'il a sous les yeux s'opère.
Un roman, dont les chapitres sont numérotés à rebours, qui nous offre une réflexion forte sur l'altérité. Un roman où l'on croise des personnages qui apparaissent dans d'autres récits d'Eric Pessan, comme l'adolescente perdue Dans la forêt de Hokkaido...
Un roman lumineux et magique, qui nous pousse à croire à une vie qui viendrait d'ailleurs et qui fait voler en éclats certains préjugés. L'univers et la prose d'Eric Pessan sont toujours aussi oniriques et exultants. Ses mots m'ont transportée ailleur s, littéralement. ❤
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" Je me demande si l'étranger est l'altérité absolue, l'autre qui est tellement différent de nous qu'il est impossible de le connaître... "